Rédigé par Frédéric Fabre docteur en droit.
La Cour de Révision peut casser une décision définitive dans deux cas, sur renvoi de la commission de révision,
- lorsqu'une décision fait l'objet d'un arrêt de la CEDH, la révision est de droit. Mais il s'agit alors non pas d'une décision définitive puisque la requête devant la CEDH prolonge l'instance en cour et ne rend pas la dernière décision interne définitive.
- lorsqu'un arrêt de condamnation est définitif, un fait nouveau permet à la Cour de Révision de casser cette décision mais le fait doit être vraiment nouveau et non connu de la dernière juridiction qui a rendu son arrêt. Ce fait nouveau doit en plus être de nature à faire naître "un doute sur la culpabilité du condamné". En pratique, il ne doit pas s'agir d'un doute mais d'une certitude et même plus.
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Titre II du Livre III du Code de Procédure Pénale
DES DEMANDES EN RÉVISION ET EN RÉEXAMEN
Chapitre Ier Des demandes en révision et en réexamen
Article 622 du CPP
La révision d'une décision pénale définitive peut être demandée au bénéfice de toute personne reconnue coupable d'un crime ou d'un délit lorsque, après une condamnation, vient à se produire un fait nouveau ou à se révéler un élément inconnu de la juridiction au jour du procès de nature à établir l'innocence du condamné ou à faire naître un doute sur sa culpabilité.
Article 622-1 du CPP
Le réexamen d'une décision pénale définitive peut être demandé au bénéfice de toute personne reconnue coupable d'une infraction lorsqu'il résulte d'un arrêt rendu par la Cour européenne des droits de l'homme que la condamnation a été prononcée en violation de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ou de ses protocoles additionnels, dès lors que, par sa nature et sa gravité, la violation constatée entraîne, pour le condamné, des conséquences dommageables auxquelles la satisfaction équitable accordée en application de l'article 41 de la convention précitée ne pourrait mettre un terme. Le réexamen peut être demandé dans un délai d'un an à compter de la décision de la Cour européenne des droits de l'homme. Le réexamen d'un pourvoi en cassation peut être demandé dans les mêmes conditions.
Article 622-2 du CPP
La révision et le réexamen peuvent être demandés :
1° Par le ministre de la justice ;
2° Par le procureur général près la Cour de cassation ;
3° Par le condamné ou, en cas d'incapacité, par son représentant légal ;
4° Après la mort ou l'absence déclarée du condamné, par son conjoint, le
partenaire lié par un pacte civil de solidarité, son concubin, ses enfants, ses
parents, ses petits-enfants ou arrière-petits-enfants, ou ses légataires
universels ou à titre universel.
La révision peut, en outre, être demandée par les procureurs généraux près les
cours d'appel.
Article 623 du CPP
La demande en révision ou la
demande en réexamen est adressée à la cour de révision et de réexamen. Celle-ci
est composée de dix-huit magistrats de la Cour de cassation, dont le président
de la chambre criminelle, qui préside la cour de révision et de réexamen. Les
dix-sept autres magistrats sont désignés, par l'assemblée générale de la Cour de
cassation, pour une durée de trois ans, renouvelable une fois.
Chacune des chambres de la Cour de cassation y est représentée par trois de
ses membres.
Dix-sept magistrats suppléants sont désignés dans les mêmes conditions. Le
conseiller de la chambre criminelle dont le rang est le plus élevé est désigné
suppléant du président de la chambre criminelle.
Article 623-1 du CPP
La cour de révision et de réexamen désigne en son sein, pour une
durée de trois ans, renouvelable une fois, cinq magistrats titulaires et cinq
magistrats suppléants composant la commission d'instruction des demandes en
révision et en réexamen. Cette dernière désigne en son sein un président. Les
magistrats qui siègent au sein de la commission d'instruction et leurs
suppléants ne peuvent siéger au sein de la formation de jugement de la cour de
révision et de réexamen.
Les treize autres magistrats composent la formation de jugement de la cour de
révision et de réexamen, qui statue en révision ou en réexamen. La formation de
jugement est présidée par le président de la chambre criminelle.
Le parquet général près la Cour de cassation assure les fonctions du ministère
public devant la commission d'instruction et la formation de jugement.
Ne peuvent siéger au sein de la commission d'instruction et de la formation de
jugement ou y exercer les fonctions du ministère public les magistrats qui, dans
l'affaire soumise à la cour de révision et de réexamen, ont, au sein d'autres
juridictions, soit fait un acte de poursuite ou d'instruction, soit participé à
une décision sur le fond relative à la culpabilité du requérant.
Chapitre II De la cour de révision et de réexamen
Article 623 du CPP
La demande en révision ou la
demande en réexamen est adressée à la cour de révision et de réexamen. Celle-ci
est composée de dix-huit magistrats de la Cour de cassation, dont le président
de la chambre criminelle, qui préside la cour de révision et de réexamen. Les
dix-sept autres magistrats sont désignés, par l'assemblée générale de la Cour de
cassation, pour une durée de trois ans, renouvelable une fois.
Chacune des chambres de la Cour de cassation y est représentée par trois de
ses membres.
Dix-sept magistrats suppléants sont désignés dans les mêmes conditions. Le
conseiller de la chambre criminelle dont le rang est le plus élevé est désigné
suppléant du président de la chambre criminelle.
Article 623-1 du CPP
La cour de révision et de réexamen désigne en son sein, pour une
durée de trois ans, renouvelable une fois, cinq magistrats titulaires et cinq
magistrats suppléants composant la commission d'instruction des demandes en
révision et en réexamen. Cette dernière désigne en son sein un président. Les
magistrats qui siègent au sein de la commission d'instruction et leurs
suppléants ne peuvent siéger au sein de la formation de jugement de la cour de
révision et de réexamen.
Les treize autres magistrats composent la formation de jugement de la cour de
révision et de réexamen, qui statue en révision ou en réexamen. La formation de
jugement est présidée par le président de la chambre criminelle.
Le parquet général près la Cour de cassation assure les fonctions du ministère
public devant la commission d'instruction et la formation de jugement.
Ne peuvent siéger au sein de la commission d'instruction et de la formation de
jugement ou y exercer les fonctions du ministère public les magistrats qui, dans
l'affaire soumise à la cour de révision et de réexamen, ont, au sein d'autres
juridictions, soit fait un acte de poursuite ou d'instruction, soit participé à
une décision sur le fond relative à la culpabilité du requérant.
Chapitre III De la procédure suivie devant la cour de révision et de réexamen
Article 624 du CPP
La demande en révision ou la
demande en réexamen est adressée à la commission d'instruction des demandes en
révision et en réexamen, qui se prononce sur sa recevabilité.
Lorsque la demande est manifestement irrecevable, le président de la
commission ou son délégué peut la rejeter par une ordonnance motivée non
susceptible de recours.
La commission peut ordonner l'exécution d'un supplément d'information confié à
l'un ou à plusieurs de ses membres aux fins de procéder, directement ou par
commission rogatoire, dans les formes prévues au présent code, à tout acte
d'information utile à l'instruction de la demande, à l'exception de l'audition
de toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de
soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction.
Après avoir recueilli les observations écrites ou orales du requérant ou de
son avocat, celles du ministère public ainsi que, si elle intervient à
l'instance, après en avoir été dûment avisée, celles de la partie civile
constituée au procès dont la révision ou le réexamen est demandé ou de son
avocat, le requérant ou son avocat ayant la parole le dernier, la commission
saisit la formation de jugement de la cour de révision et de réexamen si la
demande lui paraît recevable.
La commission statue par une décision motivée non susceptible de recours.
Cette décision, sur demande du requérant ou de son avocat, est rendue en séance
publique.
Article 624-1 du CPP
Lorsque la commission d'instruction des demandes en révision et en réexamen est saisie d'une demande en réexamen, son président statue par ordonnance. Il saisit la formation de jugement de la cour de révision et de réexamen des demandes formées dans le délai mentionné à l'article 622-1 pour lesquelles il constate l'existence d'un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme établissant une violation de la convention applicable au condamné.
Article 624-2 du CPP
Lorsque la commission d'instruction des demandes en révision et
en réexamen est saisie d'une demande en révision en application de l'article
622, elle prend en compte l'ensemble des faits nouveaux ou des éléments inconnus
sur lesquels ont pu s'appuyer une ou des requêtes précédemment présentées et
saisit la formation de jugement de la cour de révision et de réexamen des
demandes pour lesquelles elle estime qu'un fait nouveau s'est produit ou qu'un
élément inconnu au jour du procès s'est révélé.
Lorsque les éléments nouveaux laissent apparaître qu'un tiers pourrait être
impliqué dans la commission des faits, la commission en avise sans délai le
procureur de la République compétent, qui effectue les investigations
nécessaires et peut ouvrir une information judiciaire, laquelle ne peut être
confiée à un magistrat ayant déjà connu de l'affaire. Le procureur de la
République ou le juge d'instruction ne peut saisir un service ou un officier de
police judiciaire ayant participé à l'enquête à l'origine de la condamnation du
demandeur.
Article 624-3 du CPP
Si la formation de jugement de la cour de révision et de
réexamen estime que l'affaire n'est pas en l'état, elle ordonne l'exécution d'un
supplément d'information confié à l'un ou à plusieurs de ses membres aux fins de
procéder, directement ou par commission rogatoire, dans les formes prévues au
présent code, à tout acte d'information utile à l'instruction de la demande, à
l'exception de l'audition de toute personne à l'égard de laquelle il existe des
raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une
infraction.
Lorsque l'affaire est en état, la formation de jugement de la cour l'examine
au fond et statue, par un arrêt motivé non susceptible de recours, à l'issue
d'une audience publique au cours de laquelle sont recueillies les observations
orales ou écrites du requérant ou de son avocat, celles du ministère public
ainsi que, si elle intervient à l'instance, après en avoir été dûment avisée,
celles de la partie civile constituée au procès dont la révision ou le réexamen
est demandé ou de son avocat. Le requérant ou son avocat a la parole le dernier.
Le président de la cour peut, au cours des débats, demander l'audition par la
formation de jugement de toute personne utile à l'examen de la demande.
Article 624-4 du CPP
Pour l'application du présent titre, le requérant est représenté dans la procédure et assisté au cours des débats par un avocat choisi par lui ou, à sa demande, commis d'office. Si la demande en révision ou en réexamen n'a pas été déclarée manifestement irrecevable en application du deuxième alinéa de l'article 624 et que le requérant n'a pas d'avocat, le président de la commission d'instruction lui en désigne un d'office. La victime peut être représentée dans la procédure et assistée au cours des débats par un avocat choisi par elle ou, à sa demande, commis d'office.
Article 624-5 du CPP
Le requérant peut, au cours de l'instruction de sa demande, saisir la commission d'instruction des demandes en révision et en réexamen d'une demande écrite et motivée tendant à ce qu'il soit procédé à tous actes qui lui paraissent nécessaires pour l'instruction de sa requête. La commission statue sur la demande, par une décision motivée et non susceptible de recours, dans le délai de trois mois à compter de la réception de la demande.
Article 624-6 du CPP
Le requérant et la partie civile peuvent se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier. Si le dossier a fait l'objet d'une numérisation, cette copie est remise sous forme numérisée, le cas échéant par un moyen de télécommunication selon les modalités prévues à l'article 803-1. La délivrance de la première copie de chaque pièce ou acte du dossier est gratuite. La délivrance de cette copie doit intervenir dans le mois qui suit la demande de délivrance de cette dernière.
Chapitre IV De la décision de la cour de révision et de réexamen
Article 624-7 du CPP
La formation de jugement de
la cour de révision et de réexamen rejette la demande si elle l'estime mal
fondée. Si elle estime la demande fondée, elle annule la condamnation prononcée,
sauf lorsqu'il est fait droit à une demande en réexamen du pourvoi du condamné.
S'il est possible de procéder à de nouveaux débats contradictoires, la
formation de jugement de la cour de révision et de réexamen renvoie le requérant
devant une juridiction de même ordre et de même degré, mais autre que celle dont
émane la décision annulée. Toutefois, en cas de demande en réexamen et si le
réexamen du pourvoi du condamné, dans des conditions conformes à la convention
européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,
est de nature à remédier à la violation constatée par la Cour européenne des
droits de l'homme, elle renvoie le requérant devant l'assemblée plénière de la
Cour de cassation.
S'il y a impossibilité de procéder à de nouveaux débats, notamment en cas
d'amnistie, de décès, de contumace ou de défaut d'un ou de plusieurs condamnés,
d'irresponsabilité pénale, en cas de prescription de l'action ou de la peine, la
formation de jugement de la cour de révision et de réexamen, après l'avoir
expressément constatée, statue au fond en présence des parties civiles, s'il y
en a au procès, et des curateurs nommés par elle à la mémoire de chacun des
morts ; dans ce cas, elle annule seulement celles des condamnations qui lui
paraissent non justifiées et décharge, s'il y a lieu, la mémoire des morts.
Si l'impossibilité de procéder à de nouveaux débats ne se révèle qu'après
l'arrêt de la cour de révision et de réexamen annulant l'arrêt ou le jugement de
condamnation et prononçant le renvoi, la cour, sur la réquisition du ministère
public, rapporte la désignation par elle faite de la juridiction de renvoi et
statue comme il est dit au troisième alinéa.
Si l'annulation de la décision à l'égard d'un condamné vivant ne laisse rien
subsister à sa charge qui puisse être pénalement qualifié, aucun renvoi n'est
prononcé.
L'annulation de la condamnation entraîne la suppression de la fiche du casier
judiciaire. La cour de révision et de réexamen peut également ordonner la
suppression des mentions figurant dans les fichiers de police judiciaire, dans
le fichier automatisé des empreintes digitales, dans le fichier national
automatisé des empreintes génétiques et dans le fichier judiciaire national
automatisé des auteurs d'infractions sexuelles ou violentes si, compte tenu de
la finalité de ces fichiers, la conservation de ces données n'apparaît plus
nécessaire. Dans le cas prévu à l'avant-dernier alinéa, la suppression de ces
mentions est obligatoirement ordonnée.
Chapitre V Des demandes de suspension de l'exécution de la condamnation
Article 625 du CPP
La commission d'instruction et
la formation de jugement peuvent saisir la chambre criminelle d'une demande de
suspension de l'exécution de la condamnation. Le condamné peut également
demander la suspension de l'exécution de sa condamnation à la commission
d'instruction et à la formation de jugement, qui transmettent sa demande à la
chambre criminelle. Les membres de la chambre criminelle qui siègent au sein de
la cour de révision et de réexamen ne prennent pas part aux débats ni à la
décision.
La chambre criminelle, lorsqu'elle ordonne la suspension de l'exécution de la
condamnation, peut décider que cette suspension est assortie de l'obligation de
respecter tout ou partie des conditions d'une libération conditionnelle prévues
aux articles 731 et 731-1, y compris, le cas échéant, celles résultant d'un
placement sous surveillance électronique mobile.
Elle précise dans sa décision les obligations et interdictions auxquelles est
soumis le condamné, en désignant le juge de l'application des peines sous le
contrôle duquel celui-ci est placé. Le juge de l'application des peines peut
modifier les obligations et interdictions auxquelles est soumis le condamné,
dans les conditions prévues à l'article 712-6.
Ces obligations et interdictions s'appliquent pendant une durée d'un an, qui
peut être prolongée, pour la même durée, par la chambre criminelle.
En cas de violation par le condamné des obligations et interdictions
auxquelles il est soumis, le juge de l'application des peines peut saisir la
chambre criminelle pour qu'il soit mis fin à la suspension de l'exécution de la
condamnation. Il peut décerner les mandats prévus à l'article 712-17 et ordonner
l'incarcération provisoire du condamné en application de l'article 712-19. La
chambre criminelle doit alors se prononcer dans un délai d'un mois. Si elle ne
met pas fin à la suspension de l'exécution de la condamnation, elle peut
modifier les obligations et interdictions auxquelles le condamné est soumis.
Si la formation de jugement de la cour, statuant en réexamen, annule la
condamnation sans ordonner la suspension de son exécution, la personne qui
exécute une peine privative de liberté demeure détenue, sans que cette détention
puisse excéder la durée de la peine prononcée, jusqu'à la décision, selon le
cas, de la Cour de cassation statuant en assemblée plénière ou de la juridiction
du fond. Cette décision doit intervenir dans le délai d'un an à compter de la
décision d'annulation de la cour de révision et de réexamen. Faute de décision
de la Cour de cassation ou de la juridiction du fond dans ce délai, la personne
est mise en liberté, à moins qu'elle ne soit détenue pour une autre cause.
Pendant ce même délai, la personne est considérée comme placée en détention
provisoire et peut former des demandes de mise en liberté dans les conditions
prévues aux articles 148-6 et 148-7. Ces demandes sont examinées dans les
conditions prévues aux articles 148-1 et 148-2. Toutefois, lorsque la formation
de jugement de la cour de révision et de réexamen a renvoyé l'affaire devant
l'assemblée plénière de la Cour de cassation, les demandes de mise en liberté
sont examinées par la chambre de l'instruction de la cour d'appel dans le
ressort de laquelle siège la juridiction ayant condamné l'intéressé.
Chapitre VI Des demandes d'actes préalables
Article 626 du CPP
La personne reconnue coupable
d'un crime ou d'un délit par une décision pénale définitive ou, en cas
d'incapacité, son représentant légal ou, en cas de décès ou d'absence déclarée,
les personnes mentionnées au 4° de l'article 622-2 qui envisagent de saisir la
cour de révision et de réexamen d'une demande en révision peuvent saisir le
procureur de la République d'une demande écrite et motivée tendant à ce qu'il
soit procédé à tous actes qui leur paraissent nécessaires à la production d'un
fait nouveau ou à la révélation d'un élément inconnu au jour du procès. La
demande doit porter sur des actes déterminés et, lorsqu'elle concerne une
audition, préciser l'identité de la personne dont l'audition est souhaitée.
Le procureur statue sur la demande, par une décision motivée, dans un délai de
deux mois à compter de la réception de la demande. En cas de refus, le demandeur
peut former un recours auprès du procureur général, qui se prononce dans un
délai d'un mois.
Chapitre VII De la réparation à raison d'une condamnation
Art. 626-1 du CPP
Sans préjudice du chapitre
unique du titre IV du livre Ier du code de l'organisation judiciaire, un
condamné reconnu innocent à la suite d'une révision ou d'un réexamen accordé en
application du présent titre a droit à réparation intégrale du préjudice
matériel et moral que lui a causé la condamnation. Toutefois, aucune réparation
n'est due lorsque la personne a été condamnée pour des faits dont elle s'est
librement et volontairement accusée ou laissée accuser à tort en vue de faire
échapper l'auteur des faits aux poursuites.
Peut également demander une réparation, dans les mêmes conditions, toute
personne justifiant du préjudice que lui a causé la condamnation.
A la demande de l'intéressé, le préjudice est évalué par expertise
contradictoire réalisée dans les conditions mentionnées à la section 9 du
chapitre Ier du titre III du livre Ier du présent code.
La réparation est allouée par le premier président de la cour d'appel dans le
ressort de laquelle réside l'intéressé et suivant la procédure prévue aux
articles 149-2 à 149-4. Si la personne en fait la demande, la réparation peut
également être allouée par la décision d'où résulte son innocence. Devant la
cour d'assises, la réparation est allouée par la cour statuant, comme en matière
civile, sans l'assistance des jurés.
Cette réparation est à la charge de l'Etat, sauf recours contre la partie
civile, le dénonciateur ou le faux témoin par la faute desquels la condamnation
a été prononcée. Elle est payée comme frais de justice criminelle,
correctionnelle et de police.
Si le demandeur le requiert, l'arrêt ou le jugement d'où résulte l'innocence
du condamné est affiché dans la ville où a été prononcée la condamnation, dans
la commune du lieu où le crime ou le délit a été commis, dans celle du domicile
du demandeur, dans celles du lieu de naissance et du dernier domicile du
condamné, s'il est décédé ou déclaré absent ; dans les mêmes conditions, il est
ordonné qu'il soit inséré au Journal officiel et publié par extraits dans cinq
journaux au choix de la juridiction qui a prononcé la décision.
Les frais de la publicité mentionnée à l'avant-dernier alinéa sont à la charge du Trésor.
Les justiciables qui ont vu leur condamnation cassée sont peu nombreux. Les premiers sont le capitaine Dreyfus, Patrick Dils et une troisième personne condamnée en 2008 pour agression sexuelle, condamnation cassée le 20 juillet 2011.
Dans l'affaire Dany Leprince ci dessous, le manque d'ADN du condamné retrouvé sur le couteau et les aveux d'un tiers, hors d'une procédure judiciaire ont été jugés comme des indices non suffisants pour faire naître un doute.
AFFAIRE DANY LEPRINCE
Cour de cassation, chambre criminelle siégeant en COUR DE REVISION, Arrêt du 6
avril 2011 N° de pourvoi: 10-85247 rejet
Décision attaquée : Cour d'assises de la Sarthe du 12 décembre 1997
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE
CRIMINELLE, siégeant comme COUR DE RÉVISION, en son audience publique tenue au
Palais de justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur la requête en révision présentée par :
- M. Dany X...,
tendant à la révision de l'arrêt de la cour d'assises de la SARTHE, en date du
16 décembre 1997, qui, pour meurtres concomitants à d'autres meurtres, et
meurtres commis sur mineures de quinze ans concomitants à d'autres meurtres, l'a
condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté
de 22 ans
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 mars 2011 où étaient
présents : M. Louvel président, M. Monfort conseiller rapporteur, MM. Blondet,
Arnould, Mme Koering-Joulin, MM. Dulin, Pometan, Foulquié, Mmes Ract-Madoux,
Radenne, M. Moignard, Mme Canivet-Beuzit, M. Pers, conseillers de la chambre,
Mmes Leprieur, Divialle, Harel-Dutirou, Moreau conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Mathon ;
Greffier de chambre : Mme Daudé ;
Après avoir entendu M. le conseiller MONFORT en son rapport, Me BAUDELOT, avocat
du demandeur et M. l'avocat général MATHON en leurs observations orales
Le demandeur ayant eu la parole en dernier
Les parties ayant été avisées que l'arrêt serait rendu le 6 avril 2011 à 14
heures
Après en avoir délibéré en chambre du conseil
Vu les décisions de la commission de révision des condamnations pénales, en date
du 1er juillet 2010, saisissant la Cour de révision, et ordonnant la suspension
de l'exécution de la condamnation, à compter du 8 juillet 2010 ;
Vu les articles 622 à 626 du code de procédure pénale ;
Vu les pièces jointes au dossier, régulièrement communiquées au requérant
Vu les avis d'audience régulièrement adressés aux parties et aux avocats
Vu le mémoire produit par Me Baudelot et Me Bredin, avocats, pour Dany X...
Vu les conclusions écrites déposées par l'avocat général
Attendu que le dossier est en l'état
Attendu que, du dossier ayant conduit à la condamnation de Dany X..., il résulte
ce qui suit :
Sur le fond :
Le lundi 5 septembre 1994, vers 9 heures 20, les corps de M. Christian X..., 34
ans, Mme Brigitte Z..., 36 ans, son épouse, Sandra X..., 10 ans, leur fille
aînée, et Audrey X..., 6 ans, leur fille cadette, ont été découverts à leur
domicile de Thorigné-sur-Dué (Sarthe), au lieu-dit "... ", par M. Franck A...,
employé du garage appartenant à M. Christian X..., qui s'inquiétait de l'absence
de ce dernier, et par Mme Nelly B..., nourrice de la petite Solène, dernière
enfant du couple, âgée de 2 ans, qui ne lui avait pas été conduite ce matin là.
L'enfant Solène a été retrouvée en vie, sans trace de blessure, derrière la
porte de sa chambre, par le docteur C..., qui accompagnait les gendarmes lors
d'une première reconnaissance des lieux.
Les constatations effectuées par la brigade des recherches du Mans, et les
observations médico-légales, ont démontré la particulière brutalité des
violences exercées sur les quatre victimes :
Les premières traces relevées à l'extérieur se situaient à la limite des
propriétés de M. Christian X... et de son frère M. Dany X... qui, avec son
épouse Mme Martine D... et leurs trois filles, occupait une maison située à une
dizaine de mètres de celle de Christian : il est apparu que le corps de ce
dernier, frappé à l'angle des deux propriétés, près d'une boîte à lettres, avait
été tiré le long d'une haie de thuyas, puis dans la cour de sa maison, jusqu'à
l'entrée de la salle de séjour, où il a été découvert, partiellement dénudé.
Le corps de Sandra X... reposait dans le couloir d'entrée de l'habitation, en
partie recouvert par les jambes de son père.
Mme Brigitte X... gisait dans la cuisine, à gauche en entrant. Quant à la jeune
Audrey, frappée initialement dans la salle de bain, son corps avait été traîné,
le long d'un couloir, jusqu'à l'entrée de la chambre de ses parents.
Les corps, qui reposaient dans des mares de sang, présentaient de très
nombreuses et très importantes lésions au niveau de la tête et du cou, et
parfois des mains, ces dernières correspondant à des gestes de défense ; des
traces de lutte étaient relevées dans la salle de séjour.
L'autopsie a conclu à la similitude des lésions observables sur les quatre
victimes, tant par leur aspect général que par leur localisation ; le rapport
indiquait :
" Leur aspect permet d'affirmer qu'elles ont été produites par un instrument
très tranchant, ainsi qu'en témoigne la netteté des bords des différentes plaies
; lourd, compte tenu de leur profondeur, mais non contondant ; à manche court,
compte tenu de leur caractère circonscrit et précis ; à lame relativement
courte.
" Ces caractéristiques permettent d'éliminer une hache ou une hachette
(instrument à manche long), une machette (instrument à manche court, mais à lame
longue), un poignard ou un couteau (instruments légers)
" Elles font évoquer un outil de professionnel de la boucherie, tel qu'un
couperet, appelé feuille au sein de cette profession.
" L'importance des lésions cranio-encéphaliques et cervicales est telle qu'elle
a provoqué une mort quasi-instantanée des personnes concernées... "
Selon les experts, les décès étaient survenus le dimanche 4 septembre, entre 21
heures 30 et 23 heures.
M. Christian X... exploitait à son compte un commerce de garage-carrosserie, à
Thorigné-sur-Dué ; son épouse Brigitte travaillait à la poste de Connerré, une
localité voisine ; le couple et ses trois enfants vivaient, depuis une dizaine
d'années, dans une maison construite à proximité de celle occupée par M. Dany
X... et sa famille, elle-même bâtie, à la même époque, sur un terrain cédé par
les parents X..., Robert et Renée E..., qui habitaient à quelques centaines de
mètres de là.
M. Dany X... était employé à l'entreprise de boucherie SOCOPA, à Cherré, dans le
secteur des steaks hachés, et travaillait également à la ferme familiale,
exploitée à titre principal par son épouse Mme Martine D....
Les premières investigations ont établi que les quatre victimes, qui avaient
regagné leur domicile quelques jours auparavant à l'issue de vacances dans
l'Ardèche, avaient passé une partie de la journée du dimanche 4 septembre chez
les parents de Mme Brigitte X..., M. et Mme Z..., à Connerré, et avaient regagné
leur foyer vers 20 heures 45.
M. Dany X... a expliqué qu'il avait travaillé à la ferme, ce 4 septembre, et
qu'il était rentré chez lui vers 21 heures ou 21 heures 20 ; il avait pris sa
douche, avait dîné, et s'était rendu dans sa chambre, où, après avoir regardé
quelques instants la télévision, il avait éteint la lumière à 21 heures 54, car
il devait se réveiller dès 2 heures 30 du matin pour se rendre à son travail à
la SOCOPA, où il commençait à 3 heures 30.
Mme Martine X... a corroboré, dans un premier temps, les indications données par
son mari, précisant s'être couchée elle-même vers 23 heures, après avoir regardé
plusieurs programmes de télévision.
Tant M. Dany X... que sa femme Martine ont dit n'avoir rien remarqué de
particulier, et notamment l'importante flaque de sang constatée à proximité de
leur boîte à lettres, lors de leurs départs respectifs le lundi 5 septembre au
matin, vers 3 heures pour le premier, et 7 heures 45 pour la seconde ; l'arrivée
de M. Dany X... à la SOCOPA, à 3 heures 25, à l'issue d'un trajet en voiture
d'une vingtaine de minutes, a été confirmée par ses collègues.
Les premières pistes suivies par les enquêteurs (la visite de trois hommes en
Renault 6, le dimanche matin, chez M. Christian X..., le passage nocturne d'une
voiture au pot d'échappement bruyant, la présence dans la région de gens du
voyage, ou celle de jeunes fugueurs...) n'ont donné aucun résultat, de même que
les perquisitions réalisées, dès le 5 septembre, au domicile de Dany et Martine
X..., ainsi que dans leurs locaux agricoles.
Le mercredi 7 septembre 1994, à 19 heures 30, Mme Martine X... a pris contact
avec les gendarmes pour les aviser qu'elle venait d'apprendre, par la
télévision, que les meurtres avaient été commis au moyen d'une " feuille " de
boucher, et qu'elle ne retrouvait plus la sienne à l'endroit où elle la rangeait
habituellement. En présence des gendarmes, elle a appelé ses beaux-parents, qui
lui ont indiqué détenir cet outil, et sur instructions des enquêteurs, un ami de
la famille, M. Claude F..., s'est chargé d'aller le récupérer, pour le rapporter
chez Mme Martine X... : cette " feuille ", d'une longueur totale de 40
centimètres (la lame mesurant 26, 5 centimètres), était propre, et son manche en
bois paraissait humide.
Ce rebondissement a entraîné le placement en garde à vue de cinq membres de la
famille X..., à compter du mercredi 7 septembre à 20 heures 55 : M. Dany X... et
son épouse Martine, les parents X..., et M. Alain X..., le plus jeune des trois
frères X....
Le lendemain, jeudi 8 septembre, à 19 heures, Mme Martine D... épouse X... s'est
déclarée prête " à dire la vérité " aux enquêteurs, et, à partir de 23 heures,
elle a livré des faits la version suivante : son mari était rentré vers 21
heures 30, le dimanche soir ; après qu'il eut achevé son repas, et alors qu'elle
en rassemblait les reliefs pour les donner aux chiens, elle avait entendu des
cris à l'extérieur ; elle était sortie, et avait vu, au coin de la haie de
thuyas séparant les deux maisons, Christian X... aux prises avec un homme qui
brandissait un objet au-dessus de sa tête ; en s'approchant, elle avait reconnu
son mari, elle lui avait crié : " Arrête, arrête ", puis, contournant les deux
hommes, s'était dirigée vers la maison de sa belle-soeur, pour la prévenir ; en
entrant, elle avait découvert le corps de la jeune Sandra, près de la porte de
sa chambre, celui d'Audrey à l'entrée de la salle de bains, et celui de Brigitte
dans la cuisine ; mais elle n'avait pas vu la petite Solène. Elle était ensuite
sortie, avait contourné la maison pour ne pas rencontrer son mari, et s'était
réfugiée chez elle ; elle n'avait pas appelé les secours, croyant avoir fait un
cauchemar, et s'était couchée, vers 23 heures, aux cotés de son mari endormi.
Mme Martine X... a alors établi trois croquis des lieux, pour positionner les
corps, et illustrer le trajet qu'elle avait suivi.
Le vendredi 9 septembre 1994, entendue de nouveau à 12 heures 30, elle a réitéré
son récit des faits.
De son coté, Célia X..., âgée alors de près de 16 ans, entendue le vendredi 9
septembre, à partir de 11 heures 30 dans les locaux de la brigade de gendarmerie
de Conlie, a expliqué que, dans la soirée du dimanche 4 septembre, elle avait
profité d'une interruption publicitaire du programme de télévision pour sortir
les chiens, qu'elle avait perçu des hurlements provenant de la maison de M.
Christian X..., et qu'elle avait entendu quelqu'un courir sur le gravillon,
avant de voir un homme taper sur la tête de son oncle avec un objet, à proximité
de la boîte à lettres ; cependant, elle n'avait pas vu sa mère sur les lieux à
ce moment. Elle a présenté d'abord son récit comme s'il s'agissait d'un rêve,
avant d'affirmer qu'il correspondait à la réalité, et qu'elle avait reconnu son
père en la personne de l'agresseur, et de préciser qu'elle entendait encore des
" bruits bizarres " dans la maison alors que les deux hommes se battaient à
l'extérieur.
Lors de ses auditions en garde à vue, M. Dany X... a d'abord précisé son emploi
du temps du dimanche, et évoqué le climat familial, ainsi que ses difficultés
financières ; puis, le vendredi 9 septembre, à 12 heures 40, il a manifesté son
intention de s'expliquer sur les faits, indiquant s'être arrêté chez son frère "
dans un état second, où il n'avait pas pu se contrôler " ; il a évoqué ensuite
une possible implication de son épouse dans les crimes ; enfin, à 18 heures 15,
alors que sa garde à vue approchait de son terme, il a déclaré qu'il s'était
rendu chez son frère en fin de soirée, qu'il s'était disputé avec lui, et avec
Brigitte, son épouse, car ils ne voulaient pas l'aider financièrement, et
refusaient le prêt de 20 000 francs qu'il sollicitait ; comme Christian se
dirigeait vers chez lui pour aller chercher Martine, il avait couru après lui,
et l'avait frappé avec la feuille de boucher qu'il dissimulait dans son dos ;
son épouse Martine s'était approchée, lui avait demandé d'arrêter, mais il avait
continué de frapper. M. Dany X... a ajouté : " Quant au reste, je ne peux plus
rien dire ", et il a précisé : " Martine n'a rien à voir avec ce carnage, elle
est au courant de ce qui s'est passé, mais elle n'a rien pu faire ". Il a
terminé son récit en expliquant qu'il avait ensuite déposé la feuille de boucher
chez ses parents.
Ce point a été confirmé, dans un premier temps, par sa mère Mme Renée E...
épouse X... : entendue le vendredi 9 septembre 1994, entre 14 heures 15 et 18
heures 45, celle-ci a déclaré que le lundi 5 septembre, son fils était arrivé
vers 10 heures 30 ou 11 heures, et lui avait demandé de laver une " feuille "
qui se trouvait sur l'évier de la cuisine ; cette " feuille " était sale, rouge,
et elle avait fait le rapprochement avec les crimes ; elle l'avait effectivement
lavée et essuyée, avant de la ranger.
Une information a été ouverte au tribunal de grande instance du Mans, dans la
soirée du vendredi 9 septembre 1994.
Le premier acte du magistrat instructeur a consisté en l'audition, en qualité de
témoin, de Mme Martine X..., à 22 heures 55 : celle-ci a confirmé ses dernières
déclarations, livrant un récit détaillé de la scène au cours de laquelle elle
avait vu son mari frapper son frère Christian.
Présenté le 10 septembre, à 0 heure 27, au juge d'instruction, M. Dany X...,
après avoir renoncé à l'assistance d'un avocat, et accepté de s'expliquer
immédiatement, a confirmé avoir eu une dispute avec son frère, qui refusait de
lui prêter de l'argent, et lui avoir porté des coups avec la feuille de boucher,
qu'il avait cachée dans son dos. Il a dit ne pas se souvenir de ce qui s'était
passé ensuite, " tous ces moments étant très flous ", mais il s'est remémoré
cependant avoir déposé l'instrument du crime le lendemain, chez sa mère. Il a
conclu sa déclaration en formulant le souhait de parler " des autres choses plus
tard ", et en précisant " qu'il n'avait pas conscience de ce qu'il avait fait ",
et " qu'il avait fait 60 % des actes sans s'en rendre compte, et sans le voir ".
Lors d'un transport sur les lieux organisé le 23 septembre 1994, aux fins de
reconstitution, à laquelle il a refusé de participer, M. Dany X... est revenu
sur ses aveux, disant avoir eu peur pendant la garde à vue. Il s'en est tenu à
cette position lors des dix interrogatoires réalisés ensuite par le juge
d'instruction.
Sa mère, Mme Renée E... épouse X..., est revenue sur ses déclarations relatives
au dépôt de la feuille de boucher, chez elle, par son fils, soutenant que cet
outil n'avait jamais quitté sa demeure.
L'expertise effectuée plus tard sur cet instrument, susceptible de constituer
l'arme des crimes, n'a révélé aucune trace exploitable.
Mme Martine X... et sa fille Célia, entendues et confrontées à de nombreuses
reprises par le juge d'instruction, n'ont jamais varié sur leurs accusations
portées contre M. Dany X....
Les expertises génétiques pratiquées sur les scellés, et l'exploitation des
empreintes digitales relevées, n'ont pas donné de résultats susceptibles
d'orienter l'enquête ; aucune trace de sang des victimes n'a été découverte chez
M. Dany X..., et les vêtements qu'il portait le dimanche soir n'ont pas été
précisément identifiés ; l'exploitation de traces de semelle, relevées sur les
lieux, s'est révélée vaine.
M. Dany X... a maintenu être rentré chez lui vers 21 heures 20, et a soutenu que
les crimes avaient certainement été commis avant son arrivée ; arguant de son
comportement étrange, et des accusations qu'elle portait contre lui, il a mis en
cause son épouse Martine.
Mme Claudette H... épouse I..., plus proche voisine des domiciles des familles
X..., résidant à environ 200 mètres, qui avait, dans les premières heures de
l'enquête, déclaré n'avoir rien entendu, s'est remémoré, un mois plus tard, que
le dimanche 4 septembre, vers 21 heures 45 ou 22 heures, elle avait reconnu la
voix de Mme Martine X..., qui criait : " Arrête, arrête " ; elle avait cru qu'il
s'agissait du propos d'une personne en guidant une autre pour manoeuvrer une
voiture ; son mari, M. Roger I..., a confirmé que son épouse lui avait indiqué,
ce dimanche soir, qu'elle avait entendu Mme Martine X... crier.
Il a été établi que la coupure publicitaire du film " Le Choix du coeur ", que
Célia X... regardait sur la chaîne M6, et à laquelle elle se référait pour
situer les événements dont elle avait été témoin, se situait entre 21 heures 39
et 21 heures 45.
Le sort de l'enfant Solène, découverte dans sa chambre le lundi matin, indemne
et sans la moindre trace de sang, alors que des mares de sang inondaient le sol
de la maison, a retenu l'attention des enquêteurs. Agée à l'époque de deux ans,
l'enfant ne disposait que de quelques mots de vocabulaire, et ne paraissait pas
en mesure d'évoquer la scène à laquelle elle avait éventuellement assisté.
Cependant, Mme Nelly B..., sa nourrice, à laquelle elle avait été confiée
immédiatement après les faits, a exposé au juge d'instruction, au mois de mars
1995, puis ultérieurement, qu'elle avait été témoin de plusieurs scènes dont il
résultait que l'enfant avait vu son oncle Dany frapper sa mère.
Le juge d'instruction a procédé, le 18 avril 1996, alors que l'enfant avait
quatre ans, à l'audition de Solène : il en est résulté qu'elle avait vu M. Dany
X... agresser sa mère, et que Mme Martine X... l'avait prise en charge, lui
avait donné un bain, l'avait changée, puis l'avait emmenée quelque part en
voiture, avant de dormir à ses cotés.
Ce point a été rapproché d'une précision donnée tardivement par le témoin Mme
Claudette H... épouse I..., selon laquelle, quinze minutes environ après avoir
entendu Mme Martine X... crier " Arrête, arrête ", elle avait perçu le bruit du
moteur de la voiture de Dany et Martine X..., qui passait à vive allure près de
chez elle.
Une expertise a conclu à la crédibilité de Solène.
Entendue le 9 mai 1996 par le juge d'instruction, Mme Martine X... a reconnu "
qu'elle n'avait pas dit tout ce qu'elle savait ", et a livré les précisions
suivantes : c'était à la suite d'une dispute qu'elle avait eue avec Dany,
concernant un projet de reprise de la ferme familiale de " La Goualtière ", que
celui-ci était parti voir son frère ; ne le voyant pas rentrer, elle s'était
inquiétée, et c'est là qu'elle avait entendu des cris, et vu Dany frapper
Christian ; après avoir découvert Brigitte et ses deux filles baignant dans le
sang, elle avait trouvé Solène dans sa chambre, l'avait emmenée chez elle, où
elle l'avait lavée, puis elle l'avait conduite dans son véhicule Ford chez ses
beaux-parents ; mais sa belle-mère, à laquelle elle avait tout raconté, lui
avait dit " qu'il fallait sauver Dany ", et ramener l'enfant dans sa chambre, ce
qu'elle avait fait, en s'allongeant près d'elle pour qu'elle s'endorme, avant de
regagner son propre domicile, et de se coucher auprès de son mari, qui dormait.
Ce point a été rapproché du témoignage de M. Franck A..., l'ouvrier présent le
premier sur les lieux des crimes, qui, beaucoup plus tôt dans l'enquête, le 20
septembre 1994, avait indiqué aux gendarmes que le lundi matin, lors de la
découverte des corps, Mme Martine X... avait tenu des propos qui pouvaient faire
penser qu'elle savait que Solène était en vie.
Mme Renée E... épouse X... a formellement nié avoir eu la visite de sa
belle-fille Martine, accompagnée de Solène, le dimanche soir.
Les investigations de nature financière ont montré que M. Dany X... et sa femme
connaissaient une situation financière difficile, du fait du faible rendement de
l'exploitation agricole, et qu'il leur fallait trouver à court terme une somme
de 20 000 francs pour faire face notamment à leur dette à l'égard de la
Mutualité sociale agricole ; par contre, le couple constitué par Christian et
Brigitte X... connaissait une situation matérielle enviable, du fait de la
réussite commerciale de l'activité de carrosserie de Christian, qui disposait
d'une caisse noire, conservée à son domicile ; ce dernier avait accordé un prêt
à son frère en 1986, et la reconnaissance de dette a été trouvée en évidence sur
un bureau attenant au salon, au domicile des victimes.
L'ambiance familiale a donné lieu à des témoignages contradictoires, tant de la
part des membres de la famille X... que de la part des tiers. L'hypothèse d'une
jalousie éprouvée par M. Dany X... envers son frère est apparue comme
vraisemblable, de même que celle d'une dissension du couple formé par Christian
et Brigitte X... avec le reste de la famille, placée sous l'autorité de Mme
Renée E... épouse X..., qui faisait pression sur ses fils pour qu'ils reprennent
à bail les terres de sa ferme, " La Goualtière ".
Par arrêt rendu le 26 mars 1997, M. Dany X... a été renvoyé devant la cour
d'assises pour y répondre des crimes de meurtres aggravés sur les personnes de
Brigitte Z... épouse X..., Sandra X..., Audrey X... et Christian X....
L'arrêt énonce, en conclusion de l'exposé des faits :
" En résumé, il est démontré par les pièces de la procédure que Dany X..., dans
la soirée du 4 septembre 1994, pour le motif qu'il a exposé, ou dans
l'hypothèse, qui ne peut être exclue, de la découverte au cours de cette soirée,
par Christian et Brigitte X... d'une indélicatesse commise à leur préjudice,
mais en tout cas dans le contexte d'une querelle ayant l'argent pour cause :
- a mis à profit l'absence momentanée de son frère Christian X... de son
domicile pour surprendre, agresser et frapper mortellement Brigitte X..., sa
belle-soeur, Sandra et Audrey X..., ses nièces,- a, alors qu'il se trouvait
toujours dans les lieux, agressé Christian X... lors de son retour à son
domicile, il l'a poursuivi à l'extérieur de l'habitation avant de le frapper
mortellement ;
- a ensuite traîné Christian X... par les pieds jusque dans le couloir de
l'habitation, avant de le déposer en le soutenant par les bras ou sous les
aisselles, dans l'entrée de la salle à manger ;
- a traîné ensuite le corps d'Audrey de la salle de bains à la chambre de ses
parents,
- a récupéré à l'extérieur de la maison les chaussures de son frère Christian
pour les jeter près du corps,
- a mis à profit le temps qui s'est écoulé entre la commission des faits et leur
découverte pour faire disparaître ses vêtements et ses chaussures, et plus
généralement tout ce qui pouvait le confondre, et qu'il a parfait ce travail
dans la matinée du 5 septembre 1994 ".
Par arrêt du 16 décembre 1997, la cour d'assises de la Sarthe a condamné M. Dany
X... à la réclusion criminelle à perpétuité, assortie d'une mesure de sûreté de
22 années.
Son pourvoi en cassation a été rejeté par la chambre criminelle par arrêt du 17
mars 1999.
Par requête du 31 octobre 2005, les avocats de M. Dany X... ont demandé la
révision de sa condamnation, en invoquant des faits nouveaux.
Cette première demande a été suivie de nombreuses demandes complémentaires
adressées à la commission de révision les 15 mars, 16 mars, 20 mars, 18 avril,
12 juin 2006, 4 janvier, 16 février, 6 mars, 27 mars, 22 mai et 2 novembre 2007.
En cet état :
Attendu qu'il incombe à la Cour de révision d'examiner l'ensemble des éléments
proposés par les avocats de M. Dany X..., et ceux mis à jour par la commission
de révision ;
1°) Sur l'allégation d'une liaison de Mme Martine D... épouse X... avec le nommé
Claude F... :
Attendu que, selon le requérant, son épouse Martine aurait mené une double vie,
et aurait entretenu notamment une relation avec M. Claude F... ; qu'il était
demandé de comparer les traces d'ADN trouvées sur le lieu des crimes avec les
profils génétiques de Mme Martine X... et de M. Claude F... ;
Attendu que M. Claude F... a été entendu à plusieurs reprises lors de
l'instruction initiale ; qu'ami de longue date de la famille X..., il aidait M.
Dany X... dans les travaux des champs et de bricolage ; que lors d'une audition
du 2 mars 1995, il avait déjà démenti la rumeur selon laquelle il avait eu une
aventure avec Mme Martine X... ;
Attendu que Mme Y..., juge d'instruction chargée du dossier d'origine, a rappelé
que cette allégation avait déjà eu cours à l'époque (R 64) ;
Attendu qu'entendu de nouveau sur ce point le 10 mai 2007 (R 45), M. Claude F...
a maintenu ses précédentes déclarations, et a accepté de subir un prélèvement en
vue d'une expertise génétique ; que l'enquête de personnalité le concernant n'a
apporté aucun élément nouveau (R 38) ;
Attendu que l'expertise de comparaison de l'ADN de M. Claude F... avec les
empreintes génétiques relevées sur le lieu des crimes s'est révélée négative
(R55) ;
Attendu que M. J..., qui, d'après la requête, aurait surpris Mme Martine X... en
flagrant délit d'adultère, est décédé, et n'a pu être entendu ;
Attendu que cette allégation d'une liaison de Mme Martine D... avec M. Claude
F..., ne constitue pas un fait nouveau, ou un élément inconnu de la juridiction
au jour du procès, et qu'à supposer le fait exact, aucune conclusion ne saurait
en être tirée de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné ;
2°) Sur l'expertise ADN pratiquée sur un couteau saisi au domicile de Dany et
Martine X... :
Attendu que l'expertise ci-dessus évoquée a, par ailleurs, permis d'établir que
l'ADN de Mme Martine D... était compatible avec l'ADN trouvé sur un couteau à
manche jaune, saisi à son domicile, cet ADN étant également compatible avec
l'ADN d'Audrey X..., l'une des victimes.
Attendu qu'interrogé à ce sujet, l'expert a expliqué : " ces deux personnes
présentant un profil génétique identique sur ce système le système D1S80, nous
ne pouvons pas savoir si le résultat obtenu sur le scellé n° 04/ 112 correspond
à l'ADN de l'une, de l'autre, à un mélange des deux ou à l'ADN d'une tierce
personne (ce profil étant présent dans 6, 9 % de la population) " ;
Attendu qu'en l'état de ces incertitudes, cet élément, à le supposer nouveau, et
inconnu de la juridiction au jour du procès, n'est pas de nature à modifier
l'appréciation portée sur les charges retenues à l'encontre du condamné,
s'agissant au demeurant d'un instrument trouvé au domicile commun du couple X...
;
3°) Sur le témoignage de Mme K... :
Attendu que Mme K..., qui était à l'époque chirurgien-dentiste à Sargé-lès-Le
Mans, a produit, le 12 mars 2006, une attestation selon laquelle, le 25 décembre
1997, à 0 heure 50, soit neuf jours après la condamnation de M. Dany X... par la
cour d'assises, elle avait reçu un appel téléphonique d'une personne qui
demandait la gendarmerie, pour évoquer l'affaire X... ; que bien que son
interlocutrice l'eut informé de son erreur, l'homme lui avait parlé pendant 1
heure 20 minutes, en lui donnant des précisions sur son état civil, et en lui
racontant que, le jour des meurtres, il travaillait dans le grenier de la maison
de M. Christian X..., et qu'il avait tout vu et tout entendu ;
Que, selon cet homme, Mme Brigitte X... et ses deux filles avaient été tuées le
dimanche 4 septembre, vers 16 heures ; qu'il disait qu'il avait sauvé la plus
jeune des enfants en l'emmenant dans le grenier, puis qu'étaient arrivés " la
Martine " et deux hommes, dont le beau-frère de celle-ci ; que la mère avait
alors été " achevée ", qu'ils avaient attendu le père, et qu'ils étaient partis
vers 17 heures 30 ;
Que Mme K... précisait encore qu'elle avait noté scrupuleusement le contenu de
cette conversation, et qu'elle en avait fait part immédiatement au procureur de
la République.
Attendu que son compte rendu, du 25 décembre 1997, qui a été retrouvé au parquet
du Mans (R 89), indique que l'individu disait s'appeler Laurent L... (ou G...),
qu'il donnait des renseignements sur sa famille et son travail, et expliquait
que, ce dimanche 4 septembre, il montait des gaines électriques dans le grenier
des X... ; que c'est ainsi qu'il avait assisté, dans l'après-midi, à une dispute
entre deux femmes (dont Martine), et à la commission des crimes ; qu'il avait
caché " la puce " dans le grenier, près de lui, et était resté dissimulé toute
la nuit ; qu'en entendant les gendarmes, il était parti en passant par une
lucarne et les gouttières, sans être vu ;
Attendu qu'entendue dans le cadre de l'instruction de la requête en révision (R
18, R 48), Mme K... a confirmé son témoignage, et décrit ses diligences ;
Attendu que l'individu en cause, M. Laurent L..., a été identifié et retrouvé ;
Qu'entendu dans le cadre de la procédure de révision (R 86), il a déclaré
n'avoir gardé aucun souvenir de sa conversation téléphonique avec Mme K... ;
qu'il a indiqué qu'à cette époque, il souffrait d'un alcoolisme chronique, et
avait fait l'objet d'hospitalisations d'office ; qu'il a expliqué qu'il avait
été très marqué par tout ce qu'il avait lu et entendu dans la presse, qu'il en
avait parlé autour de lui, et " qu'il s'était fait un grand film avec tout ça ",
que " c'était sorti dans cette conversation avec la dame dentiste au cours d'un
délire alcoolique " ; qu'il n'avait, en réalité, pas été témoin des faits.
Que M. Laurent L... a précisé que son concours avait cependant été sollicité en
2005 par un membre du comité de soutien à M. Dany X..., et par un détective
privé, M. Q..., mandaté par ce comité ;
Attendu que les auditions des proches de M. Laurent L... ont permis de confirmer
la dégradation de son état de santé en 1997, que les dates de ses
hospitalisations en psychiatrie ont été vérifiées ;
Attendu que les recherches effectuées par la commission de révision sur des
détails troublants de ses déclarations initiales ont permis d'établir que M.
L... avait fait appel à des éléments de son histoire personnelle pour agrémenter
le récit qu'il avait livré à Mme. K... ;
Attendu qu'il est établi à présent que les invraisemblances du récit initial de
M. Laurent L... lui ôtent tout crédit ; que l'heure des faits qu'il avait
indiquée ne peut, notamment, correspondre à la réalité des événements, puisqu'il
est constant que M. Christian X... et sa famille étaient encore en vie le
dimanche soir à 20 heures 50 ;
Attendu que cet élément ne peut donc qu'être écarté ;
4°) Sur le témoignage de M. Roger M... :
Attendu que les conseils de M. Dany X... ont produit (R 10) deux attestations de
M. Roger M..., du 16 décembre 2006, selon lesquelles ce témoin disait avoir
reconnu la jeune Célia, fille aînée de M. Dany X..., comme étant la passagère
d'une voiture en stationnement, aperçue à Connerré, le soir des meurtres, vers
21 heures 15 ; que cette identification aurait été faite à partir d'une photo
qui lui aurait été présentée par un membre du comité de soutien au condamné ;
Attendu que M. Roger M... s'était déjà manifesté lors de l'instruction initiale,
en écrivant au magistrat instructeur pour signaler la présence de cette voiture,
suspecte à ses yeux ; qu'entendu le 25 janvier 1995, il avait décrit le couple
aperçu dans cette voiture, qui lui semblait vouloir se dissimuler aux regards,
et avait indiqué qu'il ne connaissait aucun membre de la famille X... ;
Attendu que M. M... est décédé le 25 avril 2007 et n'a pu être réentendu ;
Attendu que Célia X... a été entendue sur ce point par le rapporteur de la
commission de révision, et a formellement contesté sa présence dans cette
voiture, à Connerré, le soir des faits ;
Attendu que l'attestation de M. M..., produite douze ans après les faits,
n'apparaît pas déterminante ;
5°) Sur le témoignage d'André N... :
Attendu que M. André N... a adressé, le 4 janvier 2008, au Ministère de la
Justice, un courrier de M. Yves D..., oncle de Mme Martine D..., selon lequel
c'était celle-ci qui " avait fait le coup ", précisant " qu'elle faisait des
galipettes avec un gendarme ", et que son frère, M. Bernard D..., père de Mme
Martine X... " avait magouillé avec les gendarmes pour étouffer l'affaire " et "
avait payé gros pour cela " ;
Attendu que ce courrier, transmis à la commission de révision, procédait de
l'idée, évoquée par ailleurs, que Mme Martine X... entretenait des relations
privilégiées avec certains gendarmes, ce qui devait conduire à mettre en cause
la qualité des investigations, et leur orientation ;
Attendu que M. André N..., âgé de 76 ans, policier en retraite, a été entendu
par le rapporteur le 13 mars 2008 (R 61), et a confirmé la teneur de son
courrier à la Chancellerie ; que, selon lui, M. Yves D... était furieux contre
son frère Bernard pour une question d'héritage, et que c'est dans ces conditions
qu'il avait accusé sa nièce d'être l'auteur des meurtres, et son frère d'avoir
étouffé l'affaire ;
Attendu que M. Yves D..., 76 ans également, entendu le 31 mars 2008 (R 139),
s'est déclaré fâché de la démarche de M. N..., et de sa médiatisation ; qu'il a
indiqué que, selon lui, M. Dany X... était incapable de commettre de tels
crimes, mais qu'au contraire sa nièce Martine, habituée à tuer les animaux, et
qui entretenait une liaison avec un adjudant de gendarmerie de Thorigné, qui
venait la voir le soir chez ses parents, pouvait être soupçonnée ;
Attendu que M. Bernard D..., 78 ans, entendu à son tour (R140), a affirmé que sa
fille Martine n'avait pas, à sa connaissance, de relations avec un gendarme ;
qu'il a expliqué les déclarations de son frère par l'alcoolisme de celui-ci, et
par sa jalousie consécutive à une question d'héritage ; que ce témoin, interrogé
sur ses relations avec ses petites-filles, a précisé que Célia lui avait dit,
alors qu'il était allé la chercher à l'issue de son audition du vendredi 9
septembre 1994 à la gendarmerie : " Il faut que je vous dise quelque chose,
c'est dur pour moi, c'est mon père qui a fait ça " (R140, page 6) ;
Attendu que ces témoignages, s'ils ont contribué à éclairer le traumatisme subi
par les proches des victimes, et l'exacerbation de certaines dissensions
familiales, n'ont pas permis de progresser dans la recherche de la vérité ;
6°) Sur la découverte d'un couteau dans la carrière de Tuffé :
Attendu qu'un couteau, marqué " X... ", a été trouvé le 29 juin 1999 lors de
travaux de nivellement, dans une carrière située à Tuffé, dans la région du lieu
des faits ; que cette découverte, opérée par M. R..., conducteur d'un engin
tractopelle, a donné lieu à une procédure de renseignements judiciaires du 9
juillet 1999, le couteau étant déposé au greffe du tribunal du Mans, où il a été
retrouvé ;
Attendu que sur la lame est gravé le nom de " X... ", sans initiale ; qu'il est
établi que les traces de grattage, apparentes sur la gravure, ont été faites par
les auteurs de la découverte, qui souhaitaient s'assurer de la nature de
l'inscription ;
Attendu que les investigations entreprises n'ont pas permis d'identifier
l'origine, ou le propriétaire, de ce couteau (R 241, 264) ; que M. O...,
affûteur de couteaux à la SOCOPA, a indiqué qu'il s'agissait d'un couteau à
désosser, provenant de l'entreprise, et gravé par son collègue M. P... ;
qu'entendu ultérieurement (R 265), ce dernier a affirmé que le couteau ne venait
pas de la SOCOPA ;
Attendu que ni M. Dany X... ni Mme Martine D... n'ont reconnu ce couteau comme
leur ayant appartenu ; que M. Dany X... a précisé n'avoir jamais détenu de
couteau gravé à son nom ;
Attendu que l'expertise technique réalisée sur ce couteau n'a pas permis de
caractériser un quelconque profil génétique identifiable, ou des traces de sang
;
Attendu que si les constatations médico-légales sur le corps de M. Christian
X... ont fait apparaître que l'une des blessures au moins, relevée sur le bras
gauche, laissait supposer l'utilisation d'une arme autre qu'une feuille de
boucher, aucun élément probant n'a permis d'établir un lien quelconque entre
l'ustensile trouvé et les crimes commis ;
Attendu que si la découverte de ce couteau constitue un fait nouveau, ou un
élément inconnu de la juridiction au jour du procès, ce fait n'est pas de nature
à faire naître un doute sur la culpabilité du condamné ;
7°) Sur les éléments relatifs à la chronologie des événements :
Attendu que, selon la chronologie des faits établie lors de l'instruction
initiale, M. Christian X..., son épouse Brigitte et leurs trois enfants avaient
regagné leur domicile, le dimanche 4 septembre 1994, vers 20 heures 45, après
avoir dîné chez les parents de Brigitte, M. et Mme Z..., Mme Brigitte X...
appelant ses parents vers 20 heures 50 ;
Attendu que les premières constatations médico-légales avaient conduit à situer
l'heure des décès entre 20 heures et 23 heures, les rapports d'autopsies situant
ensuite ce moment entre 21 heures 30 et 23 heures ;
Attendu que M. Dany X..., dans ses premières auditions, avait expliqué qu'il
était rentré chez lui vers 21 heures ou 21 heures 20 ; qu'il disait avoir
regardé, dans sa chambre, la télévision, dont la chaîne TF1 diffusait un film
avec l'acteur Charles Bronson ; que devant se lever tôt, il avait éteint sa
lumière à 21 heures 54, heure affichée sur son radio-réveil ;
Qu'afin d'accréditer ses dires, il avait précisé qu'il se souvenait d'une scène
au cours de laquelle l'acteur Charles Bronson se tenait aux cotés d'un jeune
homme, dans une rue peu éclairée ;
Attendu que les investigations menées par la commission de révision, à la
demande des conseils de M. Dany X..., ont permis d'établir que le film évoqué
par celui-ci, intitulé " Le Flingueur ", comportait deux séquences susceptibles
de correspondre à la description donnée par M. Dany X... : la première diffusée
à 21 heures 26, la seconde diffusée entre 21 heures 31 et 21 heures 32 ;
Attendu que, dans des notes complémentaires des 6 avril et 18 juin 2010, faisant
suite à la notification de cette conclusion de l'expertise technique, les
conseils de M. Dany X... ont fait valoir qu'un troisième passage pouvait
correspondre à la scène décrite par le requérant ; qu'en effet, cette autre
scène, au cours de laquelle on peut voir Charles Bronson avec un jeune homme,
non pas dans une rue, mais dans un musée, aurait été diffusée, selon les
conseils du requérant, à 21 heures 44, ou à 21 heures 49, si l'on prend en
compte une coupure publicitaire intervenue entre 21 heures 44 et 21 heures 48 ;
Attendu que ces indications sont à rapprocher des autres éléments de
chronologie, fournis par les témoignages de Martine et Célia X... ;
Attendu que Mme Martine D... a donné des précisions horaires différentes, selon
ses auditions ; qu'après avoir confirmé, en premier lieu, l'emploi du temps
donné par son mari, elle s'en est tenue à une version selon laquelle Dany était
rentré à 21 heures 30, et avait dîné en 10 minutes ; que c'est vers 21 heures 45
qu'elle avait assisté à la scène de violences entre les deux frères ; qu'elle
avait ensuite regagné son domicile vers 22 heures, et s'était couchée vers 23
heures ;
Attendu qu'il avait été vérifié, lors de l'instruction initiale, que les
émissions qu'elle décrivait, diffusées sur la chaîne M6, à savoir le téléfilm "
Le Choix du coeur ", et le magazine " Culture pub ", avaient bien été
programmées ce dimanche soir : de 20 heures 53 à 22 heures 30 pour la première,
et de 22 heures 38 à 23 heures 05 pour la seconde ;
Attendu que Célia X..., de son coté, avait déclaré qu'elle était sortie de la
maison, et avait aperçu la scène opposant son père à son oncle, au moment de la
coupure publicitaire du film " Le Choix du coeur ", soit entre 21 heures 39 et
21 heures 45, selon les vérifications effectuées à l'époque ; que la jeune fille
avait précisé que sa mère était sortie avant elle, vers 21 heures 20 ou 21
heures 30, et qu'elle ignorait où elle était allée ;
Attendu qu'il convient de constater qu'il n'y a pas de contradiction entre
l'horaire résultant des déclarations de Célia X... avec celui résultant de
l'expertise technique, qui situe la scène décrite par M. Dany X... au plus tard
à 21 heures 32, mais seulement avec l'horaire allégué par les conseils du
requérant dans leur note complémentaire, qui soutiennent que cette scène peut
être celle diffusée à 21 heures 44, voire à 21 heures 49 ;
Attendu qu'en tout état de cause, l'incertitude mise en relief par les
investigations de la commission de révision quant au passage du film " Le
Flingueur " qu'aurait aperçu M. Dany X... rend illusoire toute tentative de
déterminer plus précisément la chronologie des événements, et de trancher entre
les versions en présence ;
Que s'il demeure une interrogation sérieuse sur le délai dans lequel les crimes
ont pu être commis, il importe de constater que cette interrogation a existé dès
le début des investigations, et était parfaitement connue de la juridiction au
jour du procès ;
Attendu que les investigations de la commission de révision n'ont donc pas
permis de découvrir, à cet égard, des faits nouveaux, ou des éléments inconnus
au jour du procès, de nature à faire naître un doute sur la culpabilité du
condamné ;
8°) Sur les résultats de l'expertise psychologique concernant Mme Martine D... :
Attendu que, entendue le 20 octobre 2008 par le rapporteur de la commission, Mme
Martine D... a expliqué que ses souvenirs s'estompaient de plus en plus, et
s'est dite incapable de se remémorer des éléments importants, comme la manière
dont elle avait découvert les corps dans la maison, ou la façon dont elle avait
porté secours à l'enfant Solène ; qu'une expertise médico-psychologique de
l'intéressée a été ordonnée, avec son accord, pour tenter de comprendre ses
trous de mémoire ;
Attendu que le rapport des experts note des éléments en faveur d'une simulation,
chez un sujet qui ne présente pas de tendance à l'affabulation, mais livre un
discours qui peut apparaître inauthentique et utilitaire ; que les experts
rapportent les termes de l'entretien, au cours duquel Mme Martine D... aurait
notamment déclaré : " Je me demande si j'ai pas fait quelque chose ; j'ai
peut-être tué quelqu'un, je l'ai dit à mon avocate, il faut que j'arrive à
retrouver, ça me gène... Je peux pas imaginer que j'aurais fait quelque chose à
ces gens-là et à leurs enfants... Je m'en veux car j'ai accusé Dany, j'ai du mal
à accepter d'avoir accusé mon mari... On peut croire que c'est une complicité...
" Ou bien encore : " je ne sais plus précisément ce que j'ai fait... Il faut que
j'arrive à savoir ce que j'ai fait ; je ne peux pas continuer comme ça... " ;
Attendu qu'entendue de nouveau par le rapporteur le 26 octobre 2009, au vu des
résultats de cette expertise, Mme Martine D... a confirmé les propos tenus
devant l'expert, mais a contesté toute simulation de sa part, ajoutant : " Je
vois encore Dany frapper son frère, et je n'ai pas oublié son regard " ;
Attendu qu'on ne saurait accorder une quelconque valeur probante à de simples "
fragments de récit ", selon l'expression même du rapport d'expertise, recueillis
dans le cadre d'une relation de confiance d'ordre médical, et en dehors des
garanties qui s'attachent aux auditions réalisées dans un cadre judiciaire ;
Qu'au demeurant, Mme Martine D... a maintenu ses accusations contre M. Dany X...
devant le rapporteur de la commission ;
Attendu que ce rapport d'expertise ne constitue donc pas un fait nouveau, ou un
élément inconnu de la juridiction au jour du procès, de nature à faire naître un
doute sur la culpabilité du condamné ;
9°) Sur l'allégation d'une relation de Mme Martine D... avec le major S... :
Attendu que les conseils de M. Dany X... ont fait état, dans le cours de
l'instruction de la requête, de l'existence d'une conversation téléphonique,
intervenue le 3 juillet 2009, entre M. Dany X..., alors détenu à la maison
centrale de Poissy, et Mme Claudine T..., parente de M. Bernard D... ; que dans
cet entretien, enregistré par l'administration pénitentiaire, Mme T...
expliquait que Mme Martine X... avait un ami gendarme, le major S..., ayant eu
un rôle important dans l'enquête, qui venait la voir régulièrement le soir ;
Attendu que l'écoute de l'enregistrement, communiqué à la commission, a montré
que l'interlocutrice de M. Dany X... évoquait effectivement la venue du major
S... au domicile des parents de Mme Martine D..., postérieurement aux faits ;
Attendu que ce gendarme, déjà plusieurs fois entendu, qui commandait à l'époque
la brigade des recherches du Mans, avait supervisé l'enquête, sans participer
lui-même aux auditions ; qu'il a expliqué qu'il s'était rendu à deux ou trois
reprises au domicile des parents D..., pour remettre des convocations, et
soutenir ces personnes éprouvées par le drame ;
Attendu qu'il a été établi que M. S... était, également, devenu proche de la
famille de Mme B..., nourrice des enfants de M. Christian X..., investie de la
garde de la petite Solène dans les mois suivant les crimes ;
Attendu que, questionné sur ses éventuelles relations avec Mme Martine D..., M.
S... a nié toute liaison avec celle-ci, en faisant observer que des insinuations
de même nature avaient été formulées à l'encontre de plusieurs autres gendarmes,
y compris devant la cour d'assises ;
Attendu qu'aucune liaison n'a finalement été démontrée entre Mme Martine D... et
ce sous-officier de gendarmerie, pas plus qu'aucune relation privilégiée de
celui-ci avec sa famille ; que s'il est établi que des liens amicaux ont été
tissés, postérieurement aux faits, par le major S... avec Mme Nelly B..., aucun
élément ne permet d'affirmer que ces liens ont été incompatibles avec la
procédure en cours ;
Attendu que ces éléments ne constituent, en aucune façon, des faits nouveaux, ou
des éléments inconnus de la juridiction au jour du procès, de nature à faire
naître un doute sur la culpabilité du condamné ;
10°) Sur la présence aux cotés des magistrats du Mans de M. Vincent BB...,
auditeur de justice :
Attendu que lors de son audition du 23 février 2010 par le rapporteur de la
commission (R 230), M. S... a évoqué le fait que Mme Martine D... avait, avant
son mariage, travaillé au service de la famille d'un médecin d'Arnage, dont l'un
des enfants était, à l'époque de l'enquête, auditeur de justice en stage au
tribunal du Mans ;
Attendu que les vérifications entreprises ont permis de confirmer ce fait ;
qu'il a été procédé à l'audition de ce magistrat, identifié en la personne de M.
Vincent BB... ; qu'il en ressort que M. BB... a effectué son stage au tribunal
du Mans à compter du dernier trimestre de 1993, et pendant toute l'année 1994 ;
qu'il commençait son stage auprès de Mme Y..., juge d'instruction, le 5
septembre 1994, le jour même de la découverte des crimes ; qu'il a suivi les
premiers moments de l'enquête en accompagnant les gendarmes sur les lieux ;
qu'en lisant les procès-verbaux, il a constaté que Mme Martine X..., qu'il
connaissait sous le nom de Martine D..., était la personne employée chez ses
parents quand il était enfant, et qui avait été sa nourrice pendant cinq ans ;
qu'il a alors prévenu le major S... de la situation, ainsi que le procureur
adjoint, et qu'il a été convenu qu'il ne participerait à aucun acte de la
procédure, et s'abstiendrait de paraître devant Dany et Martine X... ; qu'il a
ainsi entendu l'interrogatoire de première comparution de M. Dany X... en se
tenant dans un bureau mitoyen du cabinet du juge d'instruction ; que, par la
suite, M. Vincent BB... n'est aucunement intervenu dans l'enquête et
l'information ;
Que M. Vincent BB... a précisé que Mme Martine D... avait été sa nourrice
pendant cinq ans, de 1972 à 1977, alors qu'il était lui-même âgé de 6 à 11 ans,
et qu'il avait gardé de l'affection pour elle ;
Attendu que l'audition de Mme Bernadette BB... (R232), mère de M. Vincent BB...,
a confirmé l'attachement de Mme Martine D... à cette famille ; qu'ainsi,
celle-ci s'est rendue au mariage de M. Vincent BB..., le 19 septembre 1992, et
était également invitée au mariage d'un autre enfant, le samedi 3 septembre
1994, soit la veille des meurtres, mais qu'elle s'est décommandée en alléguant
un empêchement ; que Mme BB... a indiqué qu'elle avait eu encore quelques
contacts avec son ancienne employée après les faits, qu'elle lui avait conseillé
de prendre un avocat, Mme Martine D... lui déclarant alors qu'elle ne se
souvenait plus de rien ;
Attendu qu'il est constant qu'à aucun moment le dossier d'instruction d'origine
n'a fait état de cette relation de Mme Martine D... avec la famille BB..., et de
la présence de M. Vincent BB... auprès du juge d'instruction au début de
l'enquête ;
Attendu cependant que rien n'indique que la présence de cet auditeur de justice
au tribunal du Mans ait été volontairement dissimulée à quiconque ; que, dès
lors que ce magistrat stagiaire se tenait à l'écart de la procédure, comme le
commandait sa déontologie en une telle circonstance, il n'existait aucune raison
de faire apparaître sa présence dans cette juridiction ;
Attendu qu'en tout état de cause, l'hypothèse selon laquelle ce stagiaire aurait
pu, connaissant l'une des protagonistes de l'affaire, orienter l'action du juge
d'instruction, et celle des enquêteurs, pour détourner les soupçons pesant sur
Mme Martine X..., et accabler son mari, ne revêt aucun caractère de
vraisemblance ;
Attendu que, si la révélation de la présence de M. Vincent BB..., alors auditeur
de justice, au tribunal de grande instance du Mans, au moment des faits,
constitue un élément nouveau, cet élément n'est, en aucune manière, de nature à
faire naître un doute sur la culpabilité du condamné ;
11°) Sur les autres éléments examinés par la commission de révision :
- Sur l'allégation selon laquelle le mari de Mme Y..., juge d'instruction, avait
eu à connaître du cas de l'enfant Solène :
Attendu que dans une lettre de M. U..., en date du 31 janvier 2008 (R 63), il
était allégué que le mari de la juge d'instruction avait, en sa qualité de
psychiatre, connu du cas de l'enfant Solène ; qu'il s'agissait, d'après Mme
Christine V..., journaliste au journal Ouest-France (R70) d'une rumeur répandue
au moment des débats devant la cour d'assises ;
Attendu que M. Hervé Y..., chef de service au centre hospitalier de la Sarthe, à
Allonnes, a affirmé n'avoir jamais examiné l'enfant (R71/ 3) ; qu'il a été
établi que celle-ci avait été vue par un autre service de psychiatrie, en
juillet 1995, outre l'expertise dont elle a fait l'objet (R 71/ 5) ;
Que cette allégation est dépourvue de tout caractère sérieux ;
- Sur les conditions du déroulement de la garde à vue de M. Dany X... :
Attendu que, lors de l'instruction initiale, M. Dany X... avait écrit au juge
d'instruction pour se plaindre du déroulement de sa garde à vue (lettre du 4
août 1995 : D 409, R 198) ; qu'il faisait état de pressions et d'insultes, sans
alléguer cependant de violences physiques ou de mauvais traitements ;
Attendu qu'entendu sur ce point par le rapporteur de la commission de révision
(R 200), M. Dany X... a affirmé qu'on lui avait donné connaissance des
déclarations de sa femme le mettant en cause, et précisant l'arme du crime (une
feuille de boucher), et qu'on lui avait dit que les cris qu'il entendait étaient
ceux de sa fille Célia, alors que celle-ci était entendue en un autre lieu, à la
brigade de gendarmerie de Conlie ; qu'il a prétendu que c'était ce qui l'avait
amené à " céder ", et à " répéter les mots du gendarme W... " ;
Attendu que le rapporteur a entendu les gendarmes ayant procédé aux auditions
des gardés à vue : Mme Fabienne XX... (R 201), M. Gérard YY... (R 202), M. Louis
W... (R 203) ; qu'il en résulte notamment que M. Dany X... n'aurait pas eu
connaissance des déclarations des autres témoins, et de celles de sa femme en
particulier, et que toutes les protestations de M. Dany X... à cet égard ont été
déjà évoquées, lors de l'instruction, et devant la cour d'assises ;
Que les investigations complémentaires effectuées n'ont donc pas apporté
d'élément nouveau, de nature à porter un autre éclairage sur les aveux passés
par le requérant dans le temps de sa garde à vue ;
- Sur le témoignage de M. Claude ZZ... :
Attendu qu'à la demande des conseils de M. Dany X..., le rapporteur a procédé à
l'audition du nommé Claude ZZ..., auteur d'une attestation du 8 avril 2009,
évoquant une relation qui aurait existé entre Mme Martine X... et un autre
gendarme, M. AA..., ayant participé à l'enquête, ainsi que la situation
financière de M. Dany X.... (R195, 197) ;
Attendu que ce témoin a exprimé sa conviction de l'innocence de M. Dany X..., et
son idée que, du fait des relations proches de Mme Martine X... avec le gendarme
Guémas, celui-ci " n'avait pas fait son travail " ;
Attendu que ce témoignage, qui exprime une opinion subjective, ne saurait être
de nature à caractériser un fait nouveau, ou un élément inconnu de la
juridiction au jour du procès ;
Attendu qu'au terme de cette analyse de l'ensemble des arguments développés tant
dans la requête que dans les conclusions du ministère public et les observations
des avocats de M. Dany X..., et des investigations opérées par la commission de
révision, la chambre criminelle, statuant comme Cour de révision, constate qu'il
n'existe aucun fait nouveau ou élément inconnu de la juridiction au jour du
procès, de nature à faire naître un doute sur la culpabilité de Dany X... ;
D'où il suit que la requête en révision ne peut être admise
Par ces motifs :
REJETTE la requête ;
MET FIN à la suspension de l'exécution de la condamnation ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de révision et prononcé par le président le six
avril deux mille onze
Cour de Cassation chambre criminelle arrêt du 20 juillet 2011 pourvoi n°10-87326 ANNULATION D'UNE CONDAMNATION SANS RENVOI
Attendu que, le 25 mars 2004, vers
19 heures 45, Mme Y... a déposé une plainte auprès des services de police en
exposant que le même jour, vers 18 heures, elle avait été agressée au domicile
de sa mère à Laval ; que, selon la jeune femme, elle se trouvait dans
l'appartement, au deuxième étage de l'immeuble, quand un homme qu'elle avait vu
quelques instants auparavant emprunter les escaliers, avait sonné à la porte ;
qu'à sa demande, elle lui avait prêté son téléphone portable ; que l'individu
l'avait rejointe dans le salon et lui avait lié les mains derrière le dos ;
qu'il lui avait dérobé sa carte bancaire et exigé la communication du numéro de
code ; qu'il l'avait ensuite allongée sur le canapé et lui avait caressé la
poitrine et le sexe en passant la main sous ses vêtements ;
Attendu que le relevé des communications téléphoniques a permis d'établir que
l'agression avait été commise entre 18 heures 01 et 18 heures 09 ; que deux
retraits avaient été effectués postérieurement le même jour à l'aide de la carte
bancaire, le premier de 90 euros, le second de 160 euros ;
Attendu que la victime a décrit son agresseur en précisant qu'il portait des
lunettes de forme carrée avec des verres fumés à fort grossissement ; qu'un
portrait-robot a été dressé ;
Attendu que, le 13 mai 2006, Mme Y... a signalé aux services de police qu'elle
venait de reconnaître son agresseur dans une rue de Laval ; que les policiers,
en suivant ses indications, ont interpellé M. X... qui, placé en garde à vue, a
nié avoir commis les faits dont il était soupçonné ; que, convoqué devant le
tribunal correctionnel de Laval pour agression sexuelle, vol et escroquerie, le
prévenu a été relaxé par jugement du 2 novembre 2006 ; que, sur les appels du
ministère public et de la partie civile, la cour d'appel d'Angers l'a déclaré
coupable des faits poursuivis par arrêt du 29 mai 2007, les juges du second
degré ayant notamment retenu qu'il existait une ressemblance frappante avec le
portrait-robot, qu'il avait autrefois habité dans le quartier où les faits
avaient été commis et que la plaignante l'avait désigné, avec conviction, comme
son agresseur ;
Attendu que le pourvoi contre cet arrêt a été rejeté par la Cour de cassation le
6 mai 2008 ;
Attendu que le demandeur a fondé sa demande en révision sur les actes d'une
information suivie au tribunal de grande instance de Paris, à la suite d'un
réquisitoire introductif du 31 mai 2008, contre M. Bruno Z... des chefs de
viols, agressions sexuelles, vols aggravés ; que ce dernier, à la suite d'un
réquisitoire supplétif du 23 octobre 2008, a été mis en examen des chefs
d'agression sexuelle et vol au préjudice de Mme Y... ; qu'il a fourni des
explications détaillées sur les circonstances de l'agression correspondant au
récit de la victime ; que, lors de la confrontation avec la partie civile, cette
dernière l'a reconnu ;
Attendu que, par arrêt définitif, en date du 27 mai 2011, la cour d'assises de
Paris a déclaré M. Z... coupable notamment d'avoir à Laval, le 25 mars 2004,
commis sur la personne de Mme Y..., par violence, contrainte, menace ou
surprise, une atteinte sexuelle exempte d'acte de pénétration, en l'espèce en
procédant sur elle à des attouchements de nature sexuelle et d'avoir
frauduleusement soustrait une carte bancaire au préjudice de la même victime et
l'a condamné à douze ans de réclusion criminelle ;
Attendu que les faits dont M. Z... a été reconnu coupable sont ceux pour
lesquels M. X... a été condamné ;
Attendu qu'en cet état, les condamnations de M. X... et de M. Z... sont
inconciliables ;
Que dès lors, par application de l'article 622, 2°, du code de procédure pénale,
l'arrêt de la cour d'appel d'Angers, en date du 29 mai 2007, doit être annulé ;
que l'annulation aura lieu sans renvoi, les pièces de la procédure suivie contre
M. Z... établissant la preuve de l'innocence de M. X...
Abdelkader Azzimani et Abderrahim el-Jabri, 47 et 46 ans, en liberté conditionnelle depuis 2009 pour l'un, 2011 pour le second, ont été condamnés à vingt ans de réclusion pour le meurtre, en 1997 à Lunel (Hérault), d'Abdelaziz Jhilal, 22 ans, petit dealer de cannabis, tué de 108 coups de couteau.
Cette peine avait été confirmée en 2004 en appel, malgré une étrange requalification du chef d'accusation en "complicité" d'homicide, sans que l'auteur principal soit identifié. Une série de "miracles", selon leurs avocats, ont ensuite permis aux deux hommes, qui ont toujours clamé leur innocence, de faire entendre leur voix : le revirement du témoin à charge, qui a poussé la justice à rouvrir le dossier en 2009, puis le versement tardif de traces d'ADN figurant dans les scellés au fichier des empreintes génétiques qui a permis de confondre les nouveaux suspects.
L'affaire a rebondi en 2011 avec l'arrestation et la mise en examen pour assassinat d'un manutentionnaire et d'un directeur de centre de loisirs d'une trentaine d'années, qui ont disculpé les deux condamnés. Ils ont obtenu de la Cour de révision l'annulation de ce verdict prononcé en 2003, en raison des aveux de deux autres suspects. Les deux hommes seront rejugés par une cour d'assises dont ils attentent un acquittement.
Cour de Cassation chambre criminelle arrêt du 15 mai 2013 pourvoi n°12-84818 ANNULATION D'UNE CONDAMNATION AVEC RENVOI Révision ordonnée
Attendu que le dossier est en état et qu’il n’y a pas lieu d’ordonner une instruction complémentaire
Attendu que le 22 décembre 1997, vers 8 h 40, était découvert, dans un fossé bordant le chemin des Etoffes, sur la commune de Lunel Hérault, le corps d’Abdelaziz Z..., présentant de nombreuses plaies par arme blanche ; que les traces de sang et la présence d’une chaussure située à deux cents mètres de la victime démontraient que le corps avait été déplacé le long du chemin puis jeté dans le fossé ; que le médecin, présent sur place, situait le décès dans une plage comprise entre douze à vingt-quatre heures
Attendu que, vers midi, le véhicule Renault 25 d’Abdelaziz Z... était retrouvé sur un parking de Lunel, l’habitacle présentant de nombreuses projections de sang qui étaient également relevées sur la poignée extérieure de la porte passager avant, tandis que le bas de caisse, les roues et le bloc moteur étaient maculés de boue ; que l’empreinte des pneumatiques correspondait aux traces retrouvées à l’endroit de la découverte du corps
Attendu que l’autopsie révélait plus d’une centaine de coups de couteau, assénés de plusieurs directions sur l’ensemble du corps au moyen de deux armes différentes, l’une possédant une lame tranchante d’un seul côté, l’autre des deux côtés ; que les blessures les plus graves avaient atteint le thorax en région antérieure et postérieure, les mains présentant des lésions défensives ; que ces conclusions sur l’action de deux agresseurs ont été confirmées par des expertises ultérieures
Attendu que Mme Anissa A... expliquait que son époux, Abdelaziz Z..., et elle-même avaient dîné le 21 décembre chez les parents de celui-ci, qu’il était parti entre 20 heures et 20 heures 15 au prétexte d’un rendez-vous avec un ami et n’avait plus réapparu
Attendu que les policiers apprenaient qu’Abdelaziz Z..., surnommé B..., était bien connu en tant qu’important revendeur de cannabis qu’il se procurait en grandes quantités ; que M. Abdelkader A... désignait le fournisseur de son beau-frère en la personne de M. Abdelkader X... ; qu’il ajoutait qu’il avait vu ce dernier le 17 décembre, en compagnie d’un homme surnommé “l’étrangleur”, parler à Abdelaziz Z... qui lui avait ensuite confié qu’il avait mis en contact un revendeur de cannabis avec M. X... qui n’avait pas été payé
Attendu qu’il s’avérait que MM. Abdelkader X... et Abderrahim Y... étaient à la tête d’un important réseau local de revente de cannabis qu’ils se procuraient en grandes quantités auprès de ressortissants marocains et espagnols résidant en Espagne, notamment par l’intermédiaire d’un certain M. Miguel C... ; qu’Abdelaziz Z... était l’un de leurs revendeurs habituels
Attendu que, dans une poche du pantalon que portait la victime, les policiers avaient découvert un papier comportant des numéros de téléphone, l’un d’entre eux s’avérant correspondre à une “ mobicarte” utilisée par MM. X... et Y... surnommé “ l’étrangleur” ; qu’un appel avait été passé vers ce numéro le 21 décembre, vers 17 h 15, depuis le domicile des parents de la victime ; que ce même numéro avait été en relation une heure plus tard avec un hôtel situé à Saint-Aunés (Hérault), dans lequel M. C... s’était rendu le jour même pour y rencontrer un couple d’Espagnols venus récupérer de l’argent que leur devaient MM. X... et Y..., qui contestaient le montant de la dette
Attendu qu’une information distincte était ouverte pour trafic de stupéfiants ; qu’elle confirmait que le réseau local dirigé par MM. X... et Y... s’appuyait bien sur M. C... qui servait d’intermédiaire avec des individus résidant en Espagne
Attendu que, le 26 décembre 1997, les policiers recueillaient le témoignage de M. D... ; que celui-ci exposait que, résidant dans une maison située non loin du lieu du crime dont il avait eu connaissance par la presse, il avait décidé de se présenter à la gendarmerie pour rapporter ce qu’il avait vu ; qu’il expliquait qu’à 16 h 30, alors qu’il faisait encore jour, en circulant en voiture sur le chemin des Etoffes, il avait remarqué trois véhicules stationnés sur ledit chemin ; qu’un individu de type maghrébin, appuyé sur le coffre du premier véhicule, lui avait fait signe ; que, poursuivant sa route, il avait vu quatre individus du même type sortir du deuxième véhicule, deux d’entre eux saisissant un troisième, qui portait des taches de sang sur le torse, le traînant en le soutenant, tandis qu’un quatrième s’agitait ; que M. D... déclarait avoir poursuivi sa route puis fait demi-tour ; que les individus avaient rejoint leur voiture ; que l’homme, qui avait été soutenu, était alors seul debout ; qu’il l’avait vu, dans son rétroviseur, s’affaisser à quatre pattes puis basculer sur le côté ; qu’il ajoutait que, voyant les autres se diriger vers lui, il avait pensé qu’ils venaient lui porter secours
Attendu qu’à nouveau entendu le 19 janvier 1998, ce témoin confirmait ses déclarations, tout en se disant incertain sur l’heure des faits décrits, peut-être situés en soirée ; qu’il identifiait, sur planche photographique, formellement M. X... et, de manière moins certaine, M. Y... comme les deux hommes, qu’il connaissait déjà de vue, qui avaient soutenu la victime
Attendu qu’une amie de M. D..., qui avait passé la journée du 21décembre 1997 chez lui, indiquait qu’il n’était pas sorti avant 19 heures, qu’elle était encore là quand il était rentré et qu’elle l’avait quitté vers 20 h 45
Attendu que, le 20 avril 1998, M. X... était interpellé à son domicile où était découverte une somme de 138 000 francs cachée sous un couffin
Attendu que, lors de sa garde à vue, après avoir, dans un premier temps, affirmé n’avoir rencontré Abdelaziz Z..., qu’il disait considérer comme son frère, que trois semaines avant sa mort et avoir nié toute implication dans un trafic de stupéfiants ainsi que la détention du téléphone précité, M. X... finissait par reconnaître avoir eu rendez-vous le soir du 21 décembre avec la victime qui l’avait contacté la veille puis dans l’après-midi même pour lui demander la fourniture de cinq kilogrammes de cannabis ; qu’alors qu’il se rendait dans son véhicule Renault Clio chercher M. Y... pour récupérer le cannabis dans la campagne, il était passé devant B... debout près de sa Renault 25 ; qu’en possession des stupéfiants, ils étaient repartis vers le lieu du rendez-vous, avaient attendu B... une dizaine de minutes puis, à son arrivée, vers 20 h 15, lui avaient remis les cinq kilogrammes de cannabis d’une valeur de 45 000 francs ; qu’B... n’avait pas payé le produit, indiquant qu’il partait le livrer immédiatement à plusieurs personnes qui étaient en train de compter l’argent et qu’il serait de retour dans cinq minutes ; qu’au bout d’un vingtaine de minutes, MM. X... et Y..., ne le voyant pas revenir, étaient partis en voiture à sa recherche en se dirigeant vers la rue des Etoffes, estimée comme un lieu possible de livraison ; qu’ils avaient emprunté cette voie sur deux ou trois cents mètres ; que leur recherche s’avérant vaine, ils étaient repartis vers Lunel puis vers Nîmes, avant de rentrer à Lunel vers minuit ; qu’il avaient repris leurs recherches le lendemain ; que M. Y... lui avait appris dans l’après-midi le décès d’Abdelaziz Z... ; que M. X... précisait qu’il n’avait jamais pénétré dans le véhicule de la victime
Attendu que, lors de son interrogatoire de première comparution, à l’issue duquel il était mis en examen pour meurtre avec préméditation, il se refusait à toute déclaration ; qu’il adressait ensuite un courrier au magistrat instructeur pour demander que sa signature fût retirée du procès-verbal au motif qu’il n’avait pas compris le mot “ préméditation” et ajoutant “car je n’ai rien prémédité dans le meurtre d’B...”
Attendu que, pendant toute l’instruction, il réitérait l’essentiel des déclarations faites lors de sa garde à vue
Attendu que M. Y... était également interpellé à son domicile le 20 avril 1998, alors qu’il tentait de s’échapper, jetant un pistolet 6,35mm et des munitions par la fenêtre ; qu’une somme de 70 000 francs était découverte chez lui
Attendu que, lors de sa garde à vue, il reconnaissait son implication dans un trafic de stupéfiants et donnait des explications sur le déroulement de la soirée du 21 décembre 1997, très proches de celles de M. X... ; qu’il confirmait cette version devant le juge d’instruction qui le mettait également en examen pour meurtre avec préméditation
Attendu que, lors de leur confrontation, si les deux intéressés demeuraient évasifs sur leur emploi du temps de la journée du 21 décembre, leurs versions sur le déroulement de la soirée étaient globalement concordantes
Attendu que, sur parade d’identification, le 21 avril 1998, au cours de laquelle neuf personnes lui étaient présentées, le témoin M. D... identifiait formellement M. Y... comme ayant soutenu la victime en alternance avec un autre individu tandis que, selon lui, M. X... pouvait être le deuxième homme qui encadrait la victime ; que, sur nouvelle parade d’identification organisée le 22 octobre 1998 par le juge d’instruction, le témoin reconnaissait à nouveau les deux hommes ; que, le 28 janvier 1999, il identifiait, sur présentation d’un album photographique, M. Mustapha E... comme ayant soutenu la victime, en alternance avec M. X... ; qu’il maintenait sa reconnaissance de M. Y... ; qu’il ajoutait qu’après être rentré chez lui, il était ressorti quelque temps plus tard et avait vu qu’il ne restait qu’un seul véhicule de couleur claire qui était “sûrement” une Renault 25 ; qu’il était allé dans un bar de Lunel et avait téléphoné à une amie ; que, sur le chemin du retour, après 21 h 30, il n’avait vu personne ; qu’interrogé sur une révélation aussi tardive, il déclarait avoir tu jusqu’à présent cet élément pour ne pas qu’apparaisse le nom de cette amie ; que, le 26 janvier 2001, lors de la confrontation avec les deux personnes mises en examen, M. D... confirmait qu’il s’agissait là des deux individus encadrant la victime sans la frapper, les coups étant imputés à un troisième homme ; que trois ou quatre voitures étaient stationnées au bord du chemin ; qu’il ne pouvait préciser l’heure des faits ; qu’il évaluait à environ cinq minutes l’espace de temps entre ses deux passages ; que, selon lui, dans cet intervalle, les individus avaient changé de rôle et de place ; que, lorsqu’il était repassé, il leur avait dit de prendre soin de l’homme qu’il avait vu, dans son rétroviseur, tomber dans le fossé ; qu’il disait ne pas avoir pris conscience de la gravité de l’agression ; qu’entendu à nouveau à plusieurs reprises par les gendarmes, il identifiait à nouveau formellement MM. X..., Y... et E...
Attendu que les deux personnes mises en examen, qui avaient été remises en liberté le 22 octobre 2000, étaient renvoyées devant la cour d’assises de l’Hérault sous l’accusation de meurtre, cette décision étant confirmée par la chambre de l’instruction de la cour d‘appel de Montpellier le 5 février 2002
Attendu que, par arrêt de la cour d’assises de l’Hérault, en date du 23 mai 2003, MM. X... et Y... étaient déclarés coupables de meurtre et condamnés à vingt ans de réclusion criminelle ; que, sur leurs appels, la cour d’assises des Pyrénées-Orientales, désignée par la Cour de cassation, les condamnait, par arrêt du 25 juin 2004, à vingt ans de réclusion criminelle, cette fois pour complicité de meurtre et prononçait sur les intérêts civils le lendemain ; que leurs condamnations sont devenues définitives par rejet de leurs pourvois en cassation le 22 juin 2005
Attendu que, peu après, plusieurs enquêtes étaient successivement diligentées à propos de diverses rumeurs, relayées par la presse, sur la véritable identité des auteurs et l’innocence possible des deux condamnés ; qu’elles demeuraient vaines
Attendu qu’une première requête en révision déposée en septembre 2007 par les avocats de MM. X... et Y..., fondée notamment sur le revirement allégué, recueilli par des journalistes, de M. D... et susceptible d’innocenter leurs clients, était rejetée par la Commission de révision le 23 mars 2009, après nouvelles investigations, dont l’audition de ce témoin
Attendu qu’une nouvelle enquête, décidée en janvier 2009 par le procureur de la République de Montpellier, débouchait sur l’ouverture d’une nouvelle information le 16 juillet 2009, confiée à un autre juge d’instruction
Attendu qu’une nouvelle expertise génétique effectuée en septembre 2010 sur la totalité des prélèvements opérés en 1997, mettait en évidence trois profils inconnus ainsi que des mélanges d’ADN sur le bouton-manivelle de la portière avant gauche du véhicule de la victime ; que l’enregistrement de ces profils au fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) permettait de réaliser un rapprochement avec l’ADN de M. Michel F..., inscrit en avril 2009 ; qu’il était confirmé par les expertises confiées les 25 janvier et 16 mars 2011 au laboratoire d’hématologie médico-légale de Bordeaux, lesquelles identifiaient l’ADN de M. F... sur le scellé précité ainsi que sur le rétroviseur intérieur du véhicule et sur une chaussette d’Abdelaziz Z...
Attendu que M. F... était placé en garde à vue le 15 mars 2011 ; qu’après avoir nié toute implication dans le meurtre d’Abdelaziz Z..., il reconnaissait l’avoir rencontré le 21 décembre 1997 entre 20 et 21 heures pour lui acheter cinquante grammes de cannabis, après avoir pris rendez-vous dans l’après-midi ; qu’à l’heure convenue, alors qu’il l’attendait sur un banc, Abdelaziz Z... était arrivé au volant de sa Renault 25 avec un passager à l’avant qu’il ne connaissait que de vue et qui s’avérera être M. Bouziane G... ; qu’il montait à l’arrière, derrière Abdelaziz Z... ; qu’ils se dirigeaient vers la rue des Etoffes ; qu’Abdelaziz Z..., qui avait sorti une plaquette d’environ cent grammes de cannabis, avait demandé à M. G... de lui donner son couteau pour couper le produit qui se trouvait au sol, entre ses pieds, lorsque, soudainement, le ton était monté entre eux, le conflit paraissant porter sur le prix demandé par Abdelaziz Z..., estimé insuffisant par M.G... ; que celui-ci, qui avait sorti un couteau, tranchait la gorge d’Abdelaziz Z... à deux reprises, alors que celui-ci se tournait à gauche pour saisir un objet dans son vide-poche ; que M. G... lui donnait plusieurs coups de couteau dans la poitrine et dans le dos, Abdelaziz Z... tentant de parer les coups ; que M. F..., qui tentait de les séparer, était coupé au doigt ; que M. G... rattrapait la victime, qui, sortie de la voiture, tentait de s’échapper en courant, et lui assénait de nouveaux coups de couteau dans le dos ; qu’une lutte s’ensuivait entre les deux hommes ; que M. F..., qui les avait rejoints sur la route à une intersection, constatait qu’Abdelaziz Z... était allongé sur le dos au sol ; qu’il lui touchait le pied ; qu’après avoir vainement tenté d’éloigner M. G..., il était remonté dans le véhicule qu’il avait conduit près du stade puis abandonné
Attendu que M. F... affirmait que MM. X... et Y... n’avaient à aucun moment été présents sur les lieux
Attendu que M. G..., directeur du centre de loisirs de Lunel, était interpellé le 16 mars 2011 sur son lieu de travail
Attendu qu’après avoir également nié toute implication dans les faits, il finissait par donner une version présentant des ressemblances avec celle de M. F... mais contestait toute responsabilité dans le déclenchement de l’agression d’Abdelaziz Z..., attribuée au seul M. F...
Attendu que M. G... expliquait qu’il revendait habituellement du cannabis pour le compte d’Abdelaziz Z... qui lui réclamait avec insistance le remboursement d’une dette de 15 000 francs sur ses ventes ; que, début décembre 1997, M. F..., qu’il connaissait depuis environ un an, lui faisait part de son intention d’acquérir cinq kilogrammes de haschisch pour des clients ; que cette demande avait été répercutée à Abdelaziz Z... qui avait accepté cette fourniture, le rendez-vous avec des clients potentiels de M. F... étant fixé au 21 décembre en soirée ; qu’à l’arrivée de l’automobile d’Abdelaziz Z... au point de rencontre, M. G... s’était assis à l’avant tandis que M. F... avait pris place derrière le conducteur ; que M. G... remarquait à ses pieds un sac contenant probablement les cinq kilogrammes de résine de cannabis ; que, sur les indications de M. F..., Abdelaziz Z... les conduisait vers un endroit isolé et stoppait le véhicule, la marchandise à livrer étant ensuite vérifiée ; qu’en cours de conversation, M. F... sortait soudain un couteau, poignardait par l’arrière Abdelaziz Z... à deux reprises au cou ou au torse ; que la victime, qui était parvenue à s’enfuir en courant, était rattrapée par M. F... ; que M. G..., qui voulait les suivre, constatant que sa portière était bloquée, avait dû manoeuvrer la poignée par l’extérieur pour pouvoir sortir ; que, lorsqu’il avait enfin rejoint les deux hommes, Abdelaziz Z... était allongé sur le dos, tandis que M. F... lui donnait des coups de couteau ; que celui-ci, qui savait que M. G... détenait un “opinel” pour couper la drogue, l’exhortait à en frapper Abdelaziz Z... ; que M. G... s’était exécuté en portant des coups principalement aux jambes, tandis que M. F... continuait à poignarder Abdelaziz Z... sur l’ensemble du corps ; qu’ils avaient ensuite porté la victime jusqu’à un fossé, M. F... la tenant par les pieds et lui par les épaules ; qu’ils avaient ensuite regagné le véhicule d’Abdelaziz Z... ; que M. F... les conduisait jusqu’à l’arrière du stade de Lunel ; qu’il prenait le sac contenant le cannabis, en remettait deux kilogrammes à M. G..., gardant le reste pour lui ; que M. G... ajoutait que, selon lui, le comportement de M. F..., le soir des faits, démontrait que, dès le début, il avait décidé de s’emparer du cannabis ; qu’il prétendait ne pas avoir été mis au courant de ce projet
Attendu que, comme M. F..., M.G... déclarait ne pas connaître MM. X... et Y... et n’avoir jamais été en contact avec eux ni avant ni après les faits
Attendu que, pendant l’instruction, MM. F... et G..., mis en examen pour assassinat, maintenaient globalement leurs versions respectives ; que leurs déclarations étaient cependant convergentes sur un certain nombre de points, s’agissant des lieux, heure et motif du rendez-vous, à savoir une livraison de stupéfiants par Abdelaziz Z..., des places occupées respectivement dans le véhicule de celui-ci, du lieu de la transaction, du déclenchement sans motif des coups de couteau dans le véhicule, de leur poursuite à l’extérieur sur le chemin des Etoffes, de l’abandon du corps ; qu’elles ont été tout aussi concordantes sur l’absence d’implication d’autres personnes dans le décès d’Abdelaziz Z..., bien que la question leur fût posée à plusieurs reprises tout au long de l’instruction
Attendu que ces déclarations circonstanciées sont globalement compatibles avec les constatations des policiers et du médecin légiste, en particulier la reconnaissance par M.G... des coups portés par M. F... et lui-même au moyen de deux couteaux différents pour frapper la victime, laquelle a d’abord été atteinte dans le véhicule puis achevée à terre près du lieu de découverte du corps, enfin jetée dans un fossé ; qu’elles ont corroboré l’identification de l’ADN de M. F... dans du sang constaté dans le véhicule et sur une chaussette portée par Abdelaziz Z... ; qu’en revanche aucune trace de la présence de MM. X... et Y... n’a pu être relevée à l’occasion des constatations des enquêteurs ou au cours des différentes expertises
Attendu qu’en dépit de divergences sur leur degré de participation, les récits par M. F... et surtout M. G... du déroulement des faits ayant conduit à la mort d’Abdelazziz Z..., liée à une vente par ce dernier de stupéfiants, les vérifications effectuées par le juge d’instruction, qui a décidé de les renvoyer devant la cour d’assises de l’Hérault sous l’accusation d’assassinat, sont compatibles avec la version constante de MM. X... et Y..., selon laquelle ils auraient livré cinq kilogrammes de cannabis à Abdelaziz Z... qui les aurait quittés pour rejoindre des clients, inconnus d’eux, situés à proximité, auxquels il devait revendre ces produits, moyennant un paiement immédiat, grâce auquel il devait s’acquitter aussitôt de sa dette envers eux et, qu’à cet effet, ils avaient attendu son retour sur place, avant de partir vainement à sa recherche dans les parages
Attendu que sont ainsi établis des faits nouveaux ou inconnus de la juridiction de nature à faire naître un doute sur la culpabilité de MM. Abdelkader X... et Abderrahim Y..., au sens de l’article 622, 4°, du code de procédure pénale ; qu’il y a lieu, en conséquence, de faire droit à leur requête en révision, d’annuler la décision de condamnation et, dès lors qu’il peut être procédé à de nouveaux débats contradictoires, de les renvoyer devant une cour d’assises autre que celle dont émane la décision contestée, ainsi que le prescrit l’article 625, alinéa 2, du code précité
Par ces motifs :
ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt de la cour d’assises des Pyrénées-Orientales, statuant en appel, en date du 25 juin 2004
ANNULE, par voie de conséquence, l’arrêt du 26 juin 2004 par lequel la cour d’assises a prononcé sur les intérêts civils
Et, pour qu’il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d’assises du Gard, statuant en appel, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil
ORDONNE l’impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d’assises des Pyrénées-Orientales et sa mention en marge ou à la suite des arrêts annulés
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