DROITS ÉCONOMIQUES SOCIAUX ET CULTURELS
COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES SOCIAUX ET CULTURELS
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"Le Comité des Droits Économiques Sociaux et Culturels reçoit les communications individuelles des
particuliers
sur leurs griefs tirés du Pacte international relatif droits économiques,sociaux et culturels."
Frédéric Fabre docteur en droit.
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- Le Pacte International relatif aux droits économiques sociaux et culturels
- Le règlement intérieur du Comité des Droits Économiques Sociaux et Culturels
- Les actualités sur le Pacte relatif aux Droits économiques Sociaux et Culturels.
ACCEPTATION DES COMMUNICATIONS INDIVIDUELLES PAR LES ÉTATS EUROPÉENS FRANCOPHONES
L'Assemblée Générale de l'ONU a adopté à l'unanimité le 10 décembre 2008 le Protocole Facultatif du Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels La cérémonie de signature du Protocole fut organisée en 2009.
LA BELGIQUE accepte les communications individuelles depuis la ratification et l'acceptation du 20 mai 2014
LE LUXEMBOURG accepte les communications individuelles depuis la ratification et l'acceptation du 3 février 2015
LA FRANCE accepte les communications à partir du 18 mars 2015 :
la LOI n° 2014-1352 du 13 novembre 2014 autorise la ratification du protocole facultatif se rapportant au pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.
Le Décret n° 2015-738 du 25 juin 2015 porte publication du protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, signé à New York le 11 décembre 2012.
Nous pouvons analyser GRATUITEMENT et SANS AUCUN ENGAGEMENT vos griefs pour savoir s'ils sont susceptibles d'être recevables devant le parlement européen, la CEDH, le Haut Commissariat aux droits de l'homme, ou un autre organisme de règlement international de l'ONU. Contactez nous à fabre@fbls.net.
Si vos griefs semblent recevables, pour augmenter réellement et concrètement vos chances, vous pouvez nous demander de vous assister pour rédiger votre requête, votre pétition ou votre communication individuelle.
PACTE INTERNATIONAL RELATIF AUX
DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS
Adopté et ouvert à la signature, à la ratification et à l'adhésion par l'Assemblée générale dans sa résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966
Entrée en vigueur: le 3 janvier 1976, conformément aux dispositions de l'article 27
Préambule
Les États parties au présent Pacte,
Considérant que, conformément aux principes énoncés dans la Charte des Nations Unies, la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde,
Reconnaissant que ces droits découlent de la dignité inhérente à la personne humaine,
Reconnaissant que, conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme, l'idéal de l'être humain libre, libéré de la crainte et de la misère, ne peut être réalisé que si des conditions permettant à chacun de jouir de ses droits économiques, sociaux et culturels, aussi bien que de ses droits civils et politiques, sont créées,
Considérant que la Charte des Nations Unies impose aux Etats l'obligation de promouvoir le respect universel et effectif des droits et des libertés de l'homme,
Prenant en considération le fait que l'individu a des devoirs envers autrui et envers la collectivité à laquelle il appartient et est tenu de s'efforcer de promouvoir et de respecter les droits reconnus dans le présent Pacte,
Sont convenus des articles suivants:
1. Tous les peuples ont le droit de disposer d'eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.
2. Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l'intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance.
3. Les États parties au présent Pacte, y compris ceux qui ont la responsabilité d'administrer des territoires non autonomes et des territoires sous tutelle, sont tenus de faciliter la réalisation du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, et de respecter ce droit, conformément aux dispositions de la Charte des Nations Unies.
1. Chacun des États parties au présent Pacte s'engage à agir, tant par son effort propre que par l'assistance et la coopération internationales, notamment sur les plans économique et technique, au maximum de ses ressources disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le présent Pacte par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l'adoption de mesures législatives.
2. Les États parties au présent Pacte s'engagent à garantir que les droits qui y sont énoncés seront exercés sans discrimination aucune fondée sur la race, la couleur, le sexe, la langue, la religion, l'opinion politique ou toute autre opinion, l'origine nationale ou sociale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.
3. Les pays en voie de développement, compte dûment tenu des droits de l'homme et de leur économie nationale, peuvent déterminer dans quelle mesure ils garantiront les droits économiques reconnus dans le présent Pacte à des non ressortissants.
Les États parties au présent Pacte s'engagent à assurer le droit égal qu'ont l'homme et la femme au bénéfice de tous les droits économiques, sociaux et culturels qui sont énumérés dans le présent Pacte.
Les États parties au présent Pacte reconnaissent que, dans la jouissance des droits assurés par l'État conformément au présent Pacte, l'Etat ne peut soumettre ces droits qu'aux limitations établies par la loi, dans la seule mesure compatible avec la nature de ces droits et exclusivement en vue de favoriser le bien-être général dans une société démocratique.
1. Aucune disposition du présent Pacte ne peut être interprétée comme impliquant pour un État, un groupement ou un individu un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans le présent Pacte ou à des limitations plus amples que celles prévues dans ledit Pacte.
2. Il ne peut être admis aucune restriction ou dérogation aux droits fondamentaux de l'homme reconnus ou en vigueur dans tout pays en vertu de lois, de conventions, de règlements ou de coutumes, sous prétexte que le présent Pacte ne les reconnaît pas ou les reconnaît à un moindre degré.
1. Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit au travail, qui comprend le droit qu'a toute personne d'obtenir la possibilité de gagner sa vie par un travail librement choisi ou accepté, et prendront des mesures appropriées pour sauvegarder ce droit.
2. Les mesures que chacun des États parties au présent Pacte prendra en vue d'assurer le plein exercice de ce droit doivent inclure l'orientation et la formation techniques et professionnelles, l'élaboration de programmes, de politiques et de techniques propres à assurer un développement économique, social et culturel constant et un plein emploi productif dans des conditions qui sauvegardent aux individus la jouissance des libertés politiques et économiques fondamentales.
Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir de conditions de travail justes et favorables, qui assurent notamment:
a) La rémunération qui procure, au minimum, à tous les travailleurs:
i) Un salaire équitable et une rémunération égale pour un travail de valeur égale sans distinction aucune; en particulier, les femmes doivent avoir la garantie que les conditions de travail qui leur sont accordées ne sont pas inférieures à celles dont bénéficient les hommes et recevoir la même rémunération qu'eux pour un même travail;
ii) Une existence décente pour eux et leur famille conformément aux dispositions du présent Pacte;
b) La sécurité et l'hygiène du travail;
c) La même possibilité pour tous d'être promus, dans leur travail, à la catégorie supérieure appropriée, sans autre considération que la durée des services accomplis et les aptitudes;
d) Le repos, les loisirs, la limitation raisonnable de la durée du travail et les congés payés périodiques, ainsi que la rémunération des jours fériés.
1. Les États parties au présent Pacte s'engagent à assurer:
a) Le droit qu'a toute personne de former avec d'autres des syndicats et de s'affilier au syndicat de son choix, sous la seule réserve des règles fixées par l'organisation intéressée, en vue de favoriser et de protéger ses intérêts économiques et sociaux. L'exercice de ce droit ne peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale ou de l'ordre public, ou pour protéger les droits et les libertés d'autrui.
b) Le droit qu'ont les syndicats de former des fédérations ou des confédérations nationales et le droit qu'ont celles-ci de former des organisations syndicales internationales ou de s'y affilier.
c) Le droit qu'ont les syndicats d'exercer librement leur activité, sans limitations autres que celles qui sont prévues par la loi et qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale ou de l'ordre public, ou pour protéger les droits et les libertés d'autrui.
d) Le droit de grève, exercé conformément aux lois de chaque pays.
2. Le présent article n'empêche pas de soumettre à des restrictions légales l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de la fonction publique.
3. Aucune disposition du présent article ne permet aux États parties à la Convention de 1948 de l'Organisation internationale du Travail concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical de prendre des mesures législatives portant atteinte -- ou d'appliquer la loi de façon à porter atteinte -- aux garanties prévues dans ladite convention.
Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à la sécurité sociale, y compris les assurances sociales.
Les États parties au présent Pacte reconnaissent que:
1. Une protection et une assistance aussi larges que possible doivent être accordées à la famille, qui est l'élément naturel et fondamental de la société, en particulier pour sa formation et aussi longtemps qu'elle a la responsabilité de l'entretien et de l'éducation d'enfants à charge. Le mariage doit être librement consenti par les futurs époux.
2. Une protection spéciale doit être accordée aux mères pendant une période de temps raisonnable avant et après la naissance des enfants. Les mères salariées doivent bénéficier, pendant cette même période, d'un congé payé ou d'un congé accompagné de prestations de sécurité sociale adéquates.
3. Des mesures spéciales de protection et d'assistance doivent être prises en faveur de tous les enfants et adolescents, sans discrimination aucune pour des raisons de filiation ou autres. Les enfants et adolescents doivent être protégés contre l'exploitation économique et sociale. Le fait de les employer à des travaux de nature à compromettre leur moralité ou leur santé, à mettre leur vie en danger ou à nuire à leur développement normal doit être sanctionné par la loi. Les États doivent aussi fixer des limites d'âge au-dessous desquelles l'emploi salarié de la main-d'oeuvre enfantine sera interdit et sanctionné par la loi.
1. Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à un niveau de vie suffisant pour elle-même et sa famille, y compris une nourriture, un vêtement et un logement suffisants, ainsi qu'à une amélioration constante de ses conditions d'existence. Les États parties prendront des mesures appropriées pour assurer la réalisation de ce droit et ils reconnaissent à cet effet l'importance essentielle d'une coopération internationale librement consentie.
2. Les États parties au présent Pacte, reconnaissant le droit fondamental qu'a toute personne d'être à l'abri de la faim, adopteront, individuellement et au moyen de la coopération internationale, les mesures nécessaires, y compris des programmes concrets:
a) Pour améliorer les méthodes de production, de conservation et de distribution des denrées alimentaires par la pleine utilisation des connaissances techniques et scientifiques, par la diffusion de principes d'éducation nutritionnelle et par le développement ou la réforme des régimes agraires, de manière à assurer au mieux la mise en valeur et l'utilisation des ressources naturelles;
b) Pour assurer une répartition équitable des ressources alimentaires mondiales par rapport aux besoins, compte tenu des problèmes qui se posent tant aux pays importateurs qu'aux pays exportateurs de denrées alimentaires.
1. Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit qu'a toute personne de jouir du meilleur état de santé physique et mentale qu'elle soit capable d'atteindre.
2. Les mesures que les États parties au présent Pacte prendront en vue d'assurer le plein exercice de ce droit devront comprendre les mesures nécessaires pour assurer:
a) La diminution de la mortinatalité et de la mortalité infantile, ainsi que le développement sain de l'enfant;
b) L'amélioration de tous les aspects de l'hygiène du milieu et de l'hygiène industrielle;
c) La prophylaxie et le traitement des maladies épidémiques, endémiques, professionnelles et autres, ainsi que la lutte contre ces maladies;
d) La création de conditions propres à assurer à tous des services médicaux et une aide médicale en cas de maladie.
1. Les États parties au présent Pacte reconnaissent le droit de toute personne à l'éducation. Ils conviennent que l'éducation doit viser au plein épanouissement de la personnalité humaine et du sens de sa dignité et renforcer le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ils conviennent en outre que l'éducation doit mettre toute personne en mesure de jouer un rôle utile dans une société libre, favoriser la compréhension, la tolérance et l'amitié entre toutes les nations et tous les groupes raciaux, ethniques ou religieux et encourager le développement des activités des Nations Unies pour le maintien de la paix.
2. Les États parties au présent Pacte reconnaissent qu'en vue d'assurer le plein exercice de ce droit:
a) L'enseignement primaire doit être obligatoire et accessible gratuitement à tous;
b) L'enseignement secondaire, sous ses différentes formes, y compris l'enseignement secondaire technique et professionnel, doit être généralisé et rendu accessible à tous par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration progressive de la gratuité;
c) L'enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l'instauration progressive de la gratuité;
d) L'éducation de base doit être encouragée ou intensifiée, dans toute la mesure possible, pour les personnes qui n'ont pas reçu d'instruction primaire ou qui ne l'ont pas reçue jusqu'à son terme;
e) Il faut poursuivre activement le développement d'un réseau scolaire à tous les échelons, établir un système adéquat de bourses et améliorer de façon continue les conditions matérielles du personnel enseignant.
3. Les États parties au présent Pacte s'engagent à respecter la liberté des parents et, le cas échéant, des tuteurs légaux, de choisir pour leurs enfants des établissements autres que ceux des pouvoirs publics, mais conformes aux normes minimales qui peuvent être prescrites ou approuvées par l'État en matière d'éducation, et de faire assurer l'éducation religieuse et morale de leurs enfants, conformément à leurs propres convictions.
4. Aucune disposition du présent article ne doit être interprétée comme portant atteinte à la liberté des individus et des personnes morales de créer et de diriger des établissements d'enseignement, sous réserve que les principes énoncés au paragraphe 1 du présent article soient observés et que l'éducation donnée dans ces établissements soit conforme aux normes minimales qui peuvent être prescrites par l'État.
Tout État partie au présent Pacte qui, au moment où il devient partie, n'a pas encore pu assurer dans sa métropole ou dans les territoires placés sous sa juridiction le caractère obligatoire et la gratuité de l'enseignement primaire s'engage à établir et à adopter, dans un délai de deux ans, un plan détaillé des mesures nécessaires pour réaliser progressivement, dans un nombre raisonnable d'années fixé par ce plan, la pleine application du principe de l'enseignement primaire obligatoire et gratuit pour tous.
1. Les États parties au présent Pacte reconnaissent à chacun le droit:
a) De participer à la vie culturelle;
b) De bénéficier du progrès scientifique et de ses applications;
c) De bénéficier de la protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou artistique dont il est l'auteur.
2. Les mesures que les États parties au présent Pacte prendront en vue d'assurer le plein exercice de ce droit devront comprendre celles qui sont nécessaires pour assurer le maintien, le développement et la diffusion de la science et de la culture.
3. Les États parties au présent Pacte s'engagent à respecter la liberté indispensable à la recherche scientifique et aux activités créatrices.
4. Les États parties au présent Pacte reconnaissent les bienfaits qui doivent résulter de l'encouragement et du développement de la coopération et des contacts internationaux dans le domaine de la science et de la culture.
1. Les États parties au présent Pacte s'engagent à présenter, conformément aux dispositions de la présente partie du Pacte, des rapports sur les mesures qu'ils auront adoptées et sur les progrès accomplis en vue d'assurer le respect des droits reconnus dans le Pacte.
2.
a) Tous les rapports sont adressés au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, qui en transmet copie au Conseil économique et social, pour examen, conformément aux dispositions du présent Pacte;
b) le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies transmet également aux institutions spécialisées copie des rapports, ou de toutes parties pertinentes des rapports, envoyés par les États Parties au présent Pacte qui sont également membres desdites institutions spécialisées, pour autant que ces rapports, ou parties de rapports, ont trait à des questions relevant de la compétence desdites institutions aux termes de leurs actes constitutifs respectifs.
1. Les États parties au présent Pacte présentent leurs rapports par étapes, selon un programme qu'établira le Conseil économique et social dans un délai d'un an à compter de la date d'entrée en vigueur du présent Pacte, après avoir consulté les États Parties et les institutions spécialisées intéressées.
2. Les rapports peuvent faire connaître les facteurs et les difficultés empêchant ces États de s'acquitter pleinement des obligations prévues au présent Pacte.
3. Dans le cas où des renseignements à ce sujet ont déjà été adressés à l'Organisation des Nations Unies ou à une institution spécialisée par un État partie au Pacte, il ne sera pas nécessaire de reproduire lesdits renseignements et une référence précise à ces renseignements suffira.
En vertu des responsabilités qui lui sont conférées par la Charte des Nations Unies dans le domaine des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le Conseil économique et social pourra conclure des arrangements avec les institutions spécialisées, en vue de la présentation par celles-ci de rapports relatifs aux progrès accomplis quant à l'observation des dispositions du présent Pacte qui entrent dans le cadre de leurs activités. Ces rapports pourront comprendre des données sur les décisions et recommandations adoptées par les organes compétents des institutions spécialisées au sujet de cette mise en oeuvre.
Le Conseil économique et social peut renvoyer à la Commission des droits de l'homme aux fins d'étude et de recommandations d'ordre général ou pour information, s'il y a lieu, les rapports concernant les droits de l'homme que communiquent les États conformément aux articles 16 et 17 et les rapports concernant les droits de l'homme que communiquent les institutions spécialisées conformément à l'article 18.
Les États parties au présent Pacte et les institutions spécialisées intéressées peuvent présenter au Conseil économique et social des observations sur toute recommandation d'ordre général faite en vertu de l'article 19 ou sur toute mention d'une recommandation d'ordre général figurant dans un rapport de la Commission des droits de l'homme ou dans tout document mentionné dans ledit rapport.
Le Conseil économique et social peut présenter de temps en temps à l'Assemblée générale des rapports contenant des recommandations de caractère général et un résumé des renseignements reçus des États parties au présent Pacte et des institutions spécialisées sur les mesures prises et les progrès accomplis en vue d'assurer le respect général des droits reconnus dans le présent Pacte.
Le Conseil économique et social peut porter à l'attention des autres organes de l'Organisation des Nations Unies, de leurs organes subsidiaires et des institutions spécialisées intéressées qui s'occupent de fournir une assistance technique toute question que soulèvent les rapports mentionnés dans la présente partie du présent Pacte et qui peut aider ces organismes à se prononcer, chacun dans sa propre sphère de compétence, sur l'opportunité de mesures internationales propres à contribuer à la mise en oeuvre effective et progressive du présent Pacte.
Les États parties au présent Pacte conviennent que les mesures d'ordre international destinées à assurer la réalisation des droits reconnus dans ledit Pacte comprennent notamment la conclusion de conventions, l'adoption de recommandations, la fourniture d'une assistance technique et l'organisation, en liaison avec les gouvernements intéressés, de réunions régionales et de réunions techniques aux fins de consultations et d'études.
Aucune disposition du présent Pacte ne doit être interprétée comme portant atteinte aux dispositions de la Charte des Nations Unies et des constitutions des institutions spécialisées qui définissent les responsabilités respectives des divers organes de l'Organisation des Nations Unies et des institutions spécialisées en ce qui concerne les questions traitées dans le présent Pacte.
Aucune disposition du présent Pacte ne sera interprétée comme portant atteinte au droit inhérent de tous les peuples à profiter et à user pleinement et librement de leurs richesses et ressources naturelles.
1. Le présent Pacte est ouvert à la signature de tout État Membre de l'Organisation des Nations Unies ou membre de l'une quelconque de ses institutions spécialisées, de tout État partie au Statut de la Cour internationale de Justice, ainsi que tout autre État invité par l'Assemblée générale des Nations Unies à devenir partie au présent Pacte.
2. Le présent Pacte est sujet à ratification et les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
3. Le présent Pacte sera ouvert à l'adhésion de tout État visé au paragraphe 1 du présent article.
4. L'adhésion se fera par le dépôt d'un instrument d'adhésion auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
5. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies informe tous les États qui ont signé le présent Pacte ou qui y ont adhéré du dépôt de chaque instrument de ratification ou d'adhésion.
1. Le présent Pacte entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies du trente-cinquième instrument de ratification ou d'adhésion.
2. Pour chacun des États qui ratifieront le présent Pacte ou y adhéreront après le dépôt du trente-cinquième instrument de ratification ou d'adhésion, ledit Pacte entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt par cet État de son instrument de ratification ou d'adhésion.
Les dispositions du présent Pacte s'appliquent, sans limitation ni exception aucune, à toutes les unités constitutives des États fédératifs.
1. Tout État partie au présent Pacte peut proposer un amendement et en déposer le texte auprès du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Le Secrétaire général transmet alors tous projets d'amendements aux États Parties au présent Pacte en leur demandant de lui indiquer s'ils désirent voir convoquer une conférence d'États parties pour examiner ces projets et les mettre aux voix. Si un tiers au moins des États se déclarent en faveur de cette convocation, le Secrétaire général convoque la conférence sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies. Tout amendement adopté par la majorité des États présents et votants à la conférence est soumis pour approbation à l'Assemblée générale des Nations Unies.
2. Ces amendements entrent en vigueur lorsqu'ils ont été approuvés par l'Assemblée générale des Nations Unies et acceptés, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives, par une majorité des deux tiers des États parties au présent Pacte.
3. Lorsque ces amendements entrent en vigueur, ils sont obligatoires pour les États parties qui les ont acceptés, les autres États parties restant liés par les dispositions du présent Pacte et par tout amendement antérieur qu'ils ont accepté.
Indépendamment des notifications prévues au paragraphe 5 de l'article 26, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies informera tous les États visés au paragraphe 1 dudit article:
a) Des signatures apposées au présent Pacte et des instruments de ratification et d'adhésion déposés conformément à l'article 26;
b) De la date à laquelle le présent Pacte entrera en vigueur conformément à l'article 27 et de la date à laquelle entreront en vigueur les amendements prévus à l'article 29.
1. Le présent Pacte, dont les textes anglais, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposé aux archives de l'Organisation des Nations Unies.
2. Le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies transmettra une copie certifiée conforme du présent Pacte à tous les États visés à l'article 26.
Protocole facultatif se rapportant au Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels
L’Assemblée générale,
Prenant acte de l’adoption, par le Conseil des droits de l’homme, dans sa résolution 8/2 du 18 juin 2008, du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,
1. Adopte le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont le texte est annexé à la présente résolution;
2. Recommande que le Protocole facultatif soit ouvert à la signature lors d’une cérémonie à organiser en 2009, et prie le Secrétaire général et la Haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme d’apporter l’aide nécessaire.
Les États Parties au présent Protocole,
Considérant que, conformément aux principes proclamés dans la Charte des Nations Unies, la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde,
Notant que la Déclaration universelle des droits de l’homme1 proclame que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits et que chacun peut se prévaloir de tous les droits et de toutes les libertés proclamés dans la Déclaration, sans distinction aucune, notamment de race, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation,
Rappelant que la Déclaration universelle des droits de l’homme et les Pactes internationaux relatifs aux droits de l’homme2 reconnaissent que l’idéal de l’être humain libre, libéré de la crainte et de la misère, ne peut être réalisé que si sont créées les conditions permettant à chacun de jouir de ses droits civils, culturels, économiques, politiques et sociaux,
Réaffirmant que tous les droits de l’homme et libertés fondamentales sont universels, indissociables, interdépendants et intimement liés,
Rappelant que chacun des États Parties au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels2 (ci-après dénommé le Pacte) s’engage à agir, tant par son effort propre que par l’assistance et la coopération internationales, notamment sur les plans économique et technique, au maximum de ses ressources disponibles, en vue d’assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le Pacte par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l’adoption de mesures législatives,
Considérant que, pour mieux assurer l’accomplissement des fins du Pacte et l’application de ses dispositions, il conviendrait d’habiliter le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (ci-après dénommé le Comité) à s’acquitter des fonctions prévues dans le présent Protocole,
Sont convenus de ce qui suit :
Article 1 Compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications
1. Tout État Partie au Pacte qui devient Partie au présent Protocole reconnaît que le Comité a compétence pour recevoir et examiner les communications prévues par les dispositions du présent Protocole.
2. Le Comité ne reçoit aucune communication intéressant un État Partie au Pacte qui n’est pas Partie au présent Protocole.
Article 2 Communications
Des communications peuvent être présentées par des particuliers ou groupes de particuliers ou au nom de particuliers ou groupes de particuliers relevant de la juridiction d’un État Partie, qui affirment être victimes d’une violation par cet État Partie d’un des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte. Une communication ne peut être présentée au nom de particuliers ou groupes de particuliers qu’avec leur consentement à moins que l’auteur ne puisse justifier qu’il agit en leur nom sans un tel consentement.
Article 3 Recevabilité
1. Le Comité n’examine aucune communication sans avoir vérifié que tous les recours internes ont été épuisés. Cette règle ne s’applique pas dans les cas où la procédure de recours excède des délais raisonnables.
2. Le Comité déclare irrecevable toute communication qui :
a) N’est pas présentée dans les douze mois suivant l’épuisement des recours internes, sauf dans les cas où l’auteur peut démontrer qu’il n’a pas été possible de présenter la communication dans ce délai;
b) Porte sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du présent Protocole à l’égard de l’État Partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date;
c) A trait à une question qu’il a déjà examinée ou qui a déjà fait l’objet ou qui fait l’objet d’un examen dans le cadre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement au niveau international;
d) Est incompatible avec les dispositions du Pacte;
e) Est manifestement mal fondée, insuffisamment étayée ou repose exclusivement sur des informations diffusées par les médias;
f) Constitue un abus du droit de présenter une communication;
g) Est anonyme ou n’est pas présentée par écrit.
Article 4 Communications dont il ne ressort pas un désavantage notable
Le Comité peut, si nécessaire, refuser d’examiner une communication dont il ne ressort pas que l’auteur a subi un désavantage notable, à moins que le Comité ne considère que la communication soulève une grave question d’importance générale.
Article 5 Mesures provisoires
1. Après réception d’une communication et avant de prendre une décision sur le fond, le Comité peut à tout moment soumettre à l’urgente attention de l’État Partie intéressé une demande tendant à ce que l’État Partie prenne les mesures provisoires qui peuvent être nécessaires dans des circonstances exceptionnelles pour éviter qu’un éventuel préjudice irréparable ne soit causé à la victime ou aux victimes de la violation présumée.
2. Le Comité ne préjuge pas de sa décision sur la recevabilité ou le fond de la communication du simple fait qu’il exerce la faculté que lui donne le paragraphe 1 du présent article.
Article 6 Transmission de la communication
1. Sauf s’il la juge d’office irrecevable sans en référer à l’État Partie intéressé, le Comité porte confidentiellement à l’attention de cet État Partie toute communication qui lui est adressée en vertu du présent Protocole.
2. Dans un délai de six mois, l’État Partie intéressé présente par écrit au Comité des explications ou déclarations apportant des précisions sur l’affaire qui fait l’objet de la communication en indiquant, le cas échéant, les mesures correctives qu’il a prises.
Article 7 Règlement amiable
1. Le Comité met ses bons offices à la disposition des États Parties intéressés en vue de parvenir à un règlement amiable de la question fondé sur le respect des obligations énoncées dans le Pacte.
2. Tout accord de règlement amiable met un terme à l’examen de la communication présentée en vertu du présent Protocole.
Article 8 Examen des communications
1. Le Comité examine les communications qui lui sont adressées en vertu de l’article 2 du présent Protocole en tenant compte de toute la documentation qui lui a été soumise, étant entendu que cette documentation doit être communiquée aux parties intéressées.
2. Le Comité examine à huis clos les communications qui lui sont adressées en vertu du présent Protocole.
3. Lorsqu’il examine une communication présentée en vertu du présent Protocole, le Comité peut consulter, selon qu’il conviendra, la documentation pertinente émanant d’autres organes ou institutions spécialisées, fonds, programmes et mécanismes des Nations Unies et d’autres organisations internationales, y compris des systèmes régionaux des droits de l’homme, et toute observation ou commentaire de l’État Partie concerné.
4. Lorsqu’il examine les communications qu’il reçoit en vertu du présent Protocole, le Comité détermine le caractère approprié des mesures prises par l’État Partie, conformément aux dispositions de la deuxième partie du Pacte. Ce faisant, il garde à l’esprit le fait que l’État Partie peut adopter un éventail de mesures pour mettre en oeuvre les droits énoncés dans le Pacte.
Article 9 Suivi des constatations du Comité
1. Après avoir examiné une communication, le Comité transmet ses constatations sur la communication, accompagnées, le cas échéant, de ses recommandations aux parties intéressées.
2. L’État Partie examine dûment les constatations et les éventuelles recommandations du Comité et soumet dans les six mois au Comité une réponse écrite contenant des informations sur toute action menée à la lumière des constatations et recommandations du Comité.
3. Le Comité peut inviter l’État Partie à lui soumettre un complément d’information sur les mesures prises en réponse à ses constatations ou à ses éventuelles recommandations, y compris, si le Comité le juge approprié, dans les rapports ultérieurs de l’État Partie présentés au titre des articles 16 et 17 du Pacte.
Article 10 Communications interétatiques
1. Tout État Partie au présent Protocole peut déclarer à tout moment, en vertu du présent article, qu’il reconnaît la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications dans lesquelles un État Partie affirme qu’un autre État Partie ne s’acquitte pas de ses obligations au titre du Pacte. Les communications présentées en vertu du présent article ne peuvent être reçues et examinées que si elles émanent d’un État Partie qui a fait une déclaration reconnaissant, en ce qui le concerne, la compétence du Comité. Le Comité ne reçoit aucune communication visant un État Partie qui n’a pas fait une telle déclaration. La procédure ci-après s’applique à l’égard des communications reçues conformément au présent article :
a) Si un État Partie au présent Protocole estime qu’un autre État Partie ne s’acquitte pas de ses obligations au titre du Pacte, il peut appeler, par communication écrite, l’attention de cet État sur la question. L’État Partie peut aussi informer le Comité de la question. Dans un délai de trois mois à compter de la réception de la communication, l’État destinataire fera tenir à l’État qui a adressé la communication des explications ou toutes autres déclarations écrites élucidant la question, qui devront comprendre, dans toute la mesure possible et utile, des indications sur ses règles de procédure et sur les moyens de recours exercés, pendants ou encore ouverts;
b) Si la question n’est pas réglée à la satisfaction des deux États Parties intéressés dans un délai de six mois à compter de la date de réception de la communication originale par l’État destinataire, l’un et l’autre auront le droit de la soumettre au Comité, en adressant une notification au Comité ainsi qu’à l’autre État intéressé;
c) Le Comité ne peut connaître d’une affaire qui lui est soumise qu’après s’être assuré que tous les recours internes disponibles ont été exercés et épuisés. Cette règle ne s’applique pas dans les cas où, de l’avis du Comité, la procédure de recours excède des délais raisonnables;
d) Sous réserve des dispositions de l’alinéa c) du présent paragraphe, le Comité met ses bons offices à la disposition des États Parties intéressés en vue de parvenir à un règlement amiable de la question fondé sur le respect des obligations énoncées dans le Pacte;
e) Le Comité tient ses séances à huis clos lorsqu’il examine les communications prévues dans le présent article;
f) Dans toute affaire qui lui est soumise conformément à l’alinéa b) du présent paragraphe, le Comité peut demander aux États Parties intéressés visés à l’alinéa b) de lui fournir tout renseignement pertinent;
g) Les États Parties intéressés visés à l’alinéa b) du présent paragraphe ont le droit de se faire représenter lors de l’examen de l’affaire par le Comité et de présenter des observations oralement ou par écrit, ou sous l’une et l’autre forme;
h) Le Comité doit, avec la célérité voulue à compter du jour où il a reçu la notification visée à l’alinéa b) du présent paragraphe, présenter un rapport comme suit :
i) Si une solution a pu être trouvée conformément aux dispositions de l’alinéa d) du présent paragraphe, le Comité se borne, dans son rapport, à
un bref exposé des faits et de la solution intervenue;
ii) Si une solution n’a pu être trouvée conformément aux dispositions de l’alinéa d) du présent paragraphe, le Comité expose, dans son rapport, les faits pertinents concernant l’objet du différend entre les États Parties intéressés. Le texte des observations écrites et le procès-verbal des observations orales présentées par les États Parties intéressés sont joints au rapport. Le Comité peut également communiquer aux seuls États Parties intéressés toutes vues qu’il peut considérer pertinentes en la matière.
Pour chaque affaire, le rapport est communiqué aux États Parties intéressés.
2. Les États Parties déposent la déclaration qu’ils auront faite conformément au paragraphe 1 du présent article auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies, qui en communique copie aux autres États Parties. Une déclaration peut être retirée à tout moment au moyen d’une notification adressée au Secrétaire général. Ce retrait est sans préjudice de l’examen de toute question qui fait l’objet d’une communication déjà transmise en vertu du présent article; aucune autre communication d’un État Partie ne sera reçue en vertu du présent article après que le Secrétaire général aura reçu notification du retrait de la déclaration, à moins que l’État Partie intéressé n’ait fait une nouvelle déclaration.
Article 11 Procédure d’enquête
1. Un État Partie au présent Protocole peut déclarer à tout moment qu’il reconnaît la compétence du Comité aux fins du présent article.
2. Si le Comité reçoit des renseignements crédibles indiquant qu’un État Partie porte gravement ou systématiquement atteinte à l’un des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte, il invite cet État Partie à coopérer avec lui aux fins de l’examen des informations ainsi portées à son attention et à présenter ses observations à leur sujet.
3. Se fondant sur les observations éventuellement formulées par l’État Partie intéressé, ainsi que sur tout autre renseignement crédible dont il dispose, le Comité peut charger un ou plusieurs de ses membres d’effectuer une enquête et de lui rendre compte d’urgence de ses résultats. Cette enquête peut, lorsque cela se justifie et avec l’accord de l’État Partie, comporter une visite sur le territoire de cet État.
4. L’enquête se déroule dans la confidentialité et la coopération de l’État Partie est sollicitée à tous les stades de la procédure.
5. Après avoir étudié les résultats de l’enquête, le Comité les communique à l’État Partie intéressé, accompagnés, le cas échéant, d’observations et de recommandations.
6. Après avoir été informé des résultats de l’enquête et des observations et recommandations du Comité, l’État Partie présente ses observations à celui-ci dans un délai de six mois.
7. Une fois achevée la procédure d’enquête entreprise en vertu du paragraphe 2 du présent article, le Comité peut, après consultations avec l’État Partie intéressé, décider de faire figurer un compte rendu succinct des résultats de la procédure dans son rapport annuel prévu à l’article 15 du présent Protocole.
8. Tout État Partie ayant fait la déclaration prévue au paragraphe 1 du présent article peut, à tout moment, retirer cette déclaration par voie de notification adressée au Secrétaire général.
Article 12 Suivi de la procédure d’enquête
1. Le Comité peut inviter l’État Partie intéressé à inclure dans le rapport qu’il doit présenter conformément aux articles 16 et 17 du Pacte, des indications détaillées sur les mesures qu’il a prises à la suite d’une enquête effectuée en vertu de l’article 11 du présent Protocole.
2. Au terme du délai de six mois visé au paragraphe 6 de l’article 11, le Comité peut, au besoin, inviter l’État Partie intéressé à l’informer des mesures prises à la suite d’une telle enquête.
Article 13 Mesures de protection
L’État Partie prend toutes les mesures nécessaires pour veiller à ce que les personnes relevant de sa juridiction ne fassent l’objet d’aucune forme de mauvais traitements ou d’intimidation du fait qu’elles adressent au Comité des communications au titre du présent Protocole.
Article 14 Assistance et coopération internationales
1. Le Comité transmet, s’il le juge nécessaire, et avec le consentement de l’État Partie intéressé, aux institutions spécialisées, fonds et programmes des Nations Unies et aux autres organismes compétents, ses observations ou recommandations concernant des communications et demandes indiquant un besoin de conseils ou d’assistance techniques, accompagnés, le cas échéant, des commentaires et suggestions de l’État Partie sur ces observations ou recommandations.
2. Le Comité peut aussi porter à l’attention de ces entités, avec le consentement de l’État Partie intéressé, toute question que soulèvent les communications examinées en vertu du présent Protocole qui peut les aider à se prononcer, chacun dans sa propre sphère de compétence, sur l’opportunité de mesures internationales propres à aider l’État Partie à progresser sur la voie de la mise en oeuvre des droits reconnus dans le Pacte.
3. Il sera établi, conformément aux procédures pertinentes de l’Assemblée générale, un fonds d’affectation spéciale, qui sera administré conformément au Règlement financier et aux règles de gestion financière de l’Organisation des Nations Unies, destiné à fournir aux États Parties une assistance spécialisée et technique, avec le consentement de l’État Partie intéressé, en vue d’une meilleure application des droits reconnus dans le Pacte, de manière à contribuer au renforcement des capacités nationales dans le domaine des droits économiques, sociaux et culturels dans le contexte du présent Protocole.
4. Les dispositions du présent article ne préjugent pas de l’obligation de chaque État Partie de s’acquitter des engagements contractés en vertu du Pacte.
Article 15 Rapport annuel
Dans son rapport annuel, le Comité inclut un récapitulatif de ses activités au titre du présent Protocole.
Article 16 Diffusion et information
Tout État Partie s’engage à faire largement connaître et à diffuser le Pacte et le présent Protocole, ainsi qu’à faciliter l’accès aux informations sur les constatations et recommandations du Comité, en particulier pour les affaires concernant cet État Partie, et de le faire selon des modalités accessibles aux personnes handicapées.
Article 17 Signature, ratification et adhésion
1. Le présent Protocole est ouvert à la signature de tous les États qui ont signé ou ratifié le Pacte, ou qui y ont adhéré.
2. Le présent Protocole est soumis à la ratification de tout État qui a ratifié le Pacte ou qui y a adhéré. Les instruments de ratification seront déposés auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.
3. Le présent Protocole sera ouvert à l’adhésion de tout État qui a ratifié le Pacte ou qui y a adhéré.
4. L’adhésion se fera par le dépôt d’un instrument d’adhésion auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies.
Article 18 Entrée en vigueur
1. Le présent Protocole entrera en vigueur trois mois après la date de dépôt auprès du Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies du dixième instrument de ratification ou d’adhésion.
2. Pour chaque État qui ratifiera le présent Protocole, après le dépôt du dixième instrument de ratification ou d’adhésion, le Protocole entrera en vigueur trois mois après la date du dépôt par cet État de son instrument de ratification ou d’adhésion.
Article 19 Amendements
1. Tout État Partie peut proposer un amendement au présent Protocole et le soumettre au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. Le Secrétaire général communique les propositions d’amendement aux États Parties, en leur demandant de lui faire savoir s’ils sont favorables à la convocation d’une réunion des États Parties en vue d’examiner ces propositions et de se prononcer sur elles. Si, dans les quatre mois qui suivent la date de cette communication, un tiers au moins des États Parties se prononcent en faveur de la convocation d’une telle réunion, le Secrétaire général convoque la réunion sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies. Tout amendement adopté par une majorité des deux tiers des États Parties présents et votants est soumis pour approbation à l’Assemblée générale de l’Organisation des Nations Unies, puis pour acceptation à tous les États Parties.
2. Tout amendement adopté et approuvé conformément au paragraphe 1 du présent article entre en vigueur le trentième jour suivant la date à laquelle le nombre d’instruments d’acceptation atteint les deux tiers du nombre des États Parties à la date de son adoption. Par la suite, l’amendement entre en vigueur pour chaque État Partie le trentième jour suivant le dépôt par cet État de son instrument d’acceptation. L’amendement ne lie que les États Parties qui l’ont accepté.
Article 20 Dénonciation
1. Tout État Partie peut dénoncer le présent Protocole à tout moment en
adressant une notification écrite au Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies. La
dénonciation prend effet six mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire général.
2. Les dispositions du présent Protocole continuent de s’appliquer à toute communication présentée conformément aux articles 2 et 10 ou à toute procédure engagée conformément à l’article 11 avant la date où la dénonciation prend effet.
Article 21 Notification par le Secrétaire général
Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies notifiera à tous les États visés au paragraphe 1 de l’article 26 du Pacte :
a) Les signatures, ratifications et adhésions;
b) La date d’entrée en vigueur du présent Protocole et de tout amendement adopté au titre de l’article 19;
c) Toute dénonciation au titre de l’article 20.
Article 22 Langues officielles
1. Le présent Protocole, dont les textes anglais, arabe, chinois, espagnol, français et russe font également foi, sera déposé aux archives de l’Organisation des Nations Unies.
2. Le Secrétaire général de l’Organisation des Nations Unies transmettra une copie certifiée conforme du présent Protocole à tous les États visés à l’article 26 du Pacte.
RECEVABILITÉ
Jaime Efraín Arellano Medina C. Equateur
requête du 24 avril 2015 irrecevabilité du 26 mars 2018
Refus de versement d’indemnités prévu par contrat ou convention collective de travail ; indemnité spéciale réduite
LES DÉLAIS ENTRE LA RATIFICATION ET LA SIGNATURE
8.1 Avant d’examiner tout grief formulé dans une communication, le Comité doit déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.
8.2 Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel le Comité n’est pas compétent ratione temporis pour examiner la présente communication, étant donné que les faits à l’origine des violations alléguées se sont produits en octobre 2007, avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Équateur, à savoir le 5 mai 2013 ; et les décisions judiciaires rendues après cette date ne peuvent être prises en compte pour déterminer la compétence ratione temporis du Comité.
8.3 Le Comité rappelle qu’en vertu du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité déclare irrecevable toute communication si elle porte sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’État partie concerné, « à moins que ces faits ne persistent après cette date », et sa jurisprudence, selon laquelle, les décisions judiciaires ou administratives des autorités nationales sont également considérées comme faisant partie des « faits » au sens du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, lorsqu’elles résultent de procédures directement liées aux faits initiaux, actes ou omissions, qui ont donné lieu à la violation ; et pour autant qu’elles permettent de remédier à la violation alléguée, conformément au droit applicable à ce moment-là. Lorsque ces procédures surviennent après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’État partie concerné, le critère prévu au paragraphe 2 b) de l’article 3 n’est pas un obstacle pour déclarer une communication recevable. Le Comité doit donc déterminer si l’arrêt de la Cour constitutionnelle daté du 9 avril 2014, qui a rejeté l’action extraordinaire en protection de l’auteur, satisfait à ces critères.
8.4 L’État partie soutient que la décision pertinente pour déterminer la compétence du Comité est l’arrêt rendu par la Cour nationale de justice le 30 mai 2011, qui a mis fin à la procédure judiciaire liée au droit du travail ; que l’arrêt de la Cour constitutionnelle daté du 9 avril 2014 ne devrait pas être pris en compte parce que l’action extraordinaire en protection n’est pas une instance supplémentaire ou de révision du système de justice ordinaire du travail ; et que l’action de l’auteur n’avait pas pour objet de dénoncer une violation de son droit au travail, de son droit de percevoir une prime ou des indemnités d’emploi, ou de son droit à la santé du fait de mauvaises conditions de travail.
8.5 Nonobstant le fait que l’action extraordinaire en protection de l’auteur n’a porté que sur des allégations de violation du droit à une procédure régulière et du droit à une protection juridictionnelle effective, le Comité note qu’elle visait à faire reconnaître le caractère infondé du jugement de cassation de la Cour nationale de justice en ce qui concerne les critères à partir desquels celle-ci avait conclu que l’auteur n’avait pas droit à la prime prévue dans la convention collective, et que, de plus, la Cour nationale de justice était le seul organe judiciaire à avoir débouté l’auteur de sa plainte. Ainsi, dans les circonstances particulières de l’espèce, cette procédure a donné à la Cour constitutionnelle l’occasion de remédier aux violations alléguées des droits fondamentaux de l’auteur dénoncées dans la présente communication. Le Comité considère donc que la communication est conforme au critère de recevabilité énoncé au paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif.
LE DÉLAI DE UN AN
8.6 Le Comité prend note des observations de l’État partie selon lesquelles la communication, présentée au Comité le 24 avril 2015, est irrecevable au regard du paragraphe 2 a) de l’article 3 du Protocole facultatif, car elle n’a pas été présentée dans un délai d’un an après l’épuisement des recours internes. L’État partie fait valoir que le jugement pertinent pour déterminer la recevabilité de la communication est celui que la Cour nationale de justice a rendu le 30 mai 2011 en déboutant l’auteur de sa plainte initiale.
8.7 Le Comité considère que, aux fins de l’application paragraphe 2 a) de l’article 3 du Protocole facultatif, les « recours internes » sont tous les recours internes, ordinaires et extraordinaires, qui ont été présentés par la présumée victime ou ses représentants en rapport direct avec les faits à l’origine de la violation alléguée et qui peuvent être raisonnablement considérés, à première vue, comme utiles pour remédier efficacement aux violations alléguées du Pacte. En l’espèce, compte tenu des considérations exposées ci‑dessus (voir le paragraphe 8.5), le Comité considère que les recours internes ont été épuisés avec l’arrêt de la Cour constitutionnelle daté du 9 avril 2014, qui a été notifié à l’auteur le 24 avril 2014. Il estime donc que la présente communication a été présentée dans le délai fixé au paragraphe 2 a) de l’article 3 du Protocole facultatif.
GRIEF NON ÉVOQUÉ DEVANT LES JURIDICTIONS INTERNES
8.8 En ce qui concerne le critère de recevabilité énoncé au paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité note que selon l’État partie, l’auteur n’a exercé aucun recours interne à sa disposition concernant les faits qui seraient à l’origine de ses problèmes de santé, à savoir les conditions dans lesquelles il aurait travaillé à PETROECUADOR ; l’auteur, conformément au règlement relatif à l’assurance générale contre les risques du travail, devait faire connaître sa maladie professionnelle à la sécurité sociale ; et, en outre, l’auteur pouvait engager des poursuites administratives ou judiciaires à l’encontre de son ancien employeur ou de la sécurité sociale, par exemple en déposant des plaintes auprès de l’Inspection du travail ou en déposant des demandes d’indemnisation pour maladie professionnelle. Le Comité prend aussi note des allégations de l’auteur, selon lesquelles, compte tenu du caractère interdépendant des droits de l’homme, il faut considérer qu’il a épuisé les recours internes pour ce qui est également de ses griefs de violation du droit à la santé, étant donné notamment que la garantie de conditions d’hygiène et de sécurité satisfaisantes pour les travailleurs est une composante du droit du travail. Le Comité constate toutefois que l’auteur n’a pas réfuté de manière convaincante le fait que les recours internes mentionnés par l’État partie n’auraient pas été efficaces pour remédier aux violations alléguées. Il considère donc que l’auteur n’a pas épuisé tous les recours internes disponibles et que cette partie de la communication est irrecevable au regard du paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif.
ARBITRAIRE OU DÉNI DE JUSTICE NON DÉMONTRÉ
8.9 Le Comité prend note des griefs de l’auteur selon lesquels la décision de PETROECUADOR de ne pas lui octroyer la prime prévue à l’article 14 de la convention collective pour les travailleurs qui quittent volontairement l’entreprise, ainsi que les décisions des tribunaux qui ont rejeté ses recours judiciaires, constituent une violation des droits qu’il tire des articles 6 et 7 du Pacte. Le Comité prend également note des observations de l’État partie selon lesquelles ces griefs sont manifestement dénués de fondement, ne font apparaître aucune violation des droits énoncés dans le Pacte et sont censés faire du Comité une quatrième instance.
8.10 En l’espèce, le Comité constate que les allégations de l’auteur remettent fondamentalement en cause les critères établis par la Cour nationale de justice dans son arrêt du 30 mai 2011, selon lesquels l’auteur n’avait pas droit au versement d’une prime en vertu de la convention collective, en raison particulièrement des différences qui existent dans l’ordre juridique de l’État partie entre le desahucio et le départ volontaire, et leurs incidences sur les primes auxquelles les travailleurs ont droit, critère qui, selon l’État partie, constitue un précédent jurisprudentiel obligatoire (voir les paragraphes 2.9 et 6.6). Le Comité considère que, dans les circonstances particulières de l’espèce, ces allégations, telles qu’elles ont été présentées par l’auteur, soulèvent des questions concernant l’interprétation de la législation nationale par les autorités judiciaires. Il rappelle sa jurisprudence selon laquelle sa tâche, lorsqu’il examine une communication, se limite à analyser si les faits décrits, y compris l’application du droit interne, dénotent une violation par l’État partie des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte ; il appartient en premier lieu aux juridictions des États parties d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans chaque affaire, et d’interpréter la législation pertinente. Le rôle du Comité consiste seulement à dire si l’appréciation des éléments probants ou l’application du droit interne ont été manifestement arbitraires, ou ont constitué un déni de justice qui a porté atteinte à un droit reconnu dans le Pacte. Dans cette perspective, il appartient en premier lieu à l’auteur de la communication de fournir au Comité suffisamment d’informations et de documents pour démontrer que l’un des éléments susmentionnés s’applique bien à son cas. Le Comité a examiné les documents présentés par l’auteur, notamment les décisions de la Cour nationale de justice et de la Cour constitutionnelle en date du 30 mai 2011 et du 9 avril 2014, respectivement, et considère que ces documents ne montrent pas que l’affaire est entachée d’irrégularités. Le Comité estime donc qu’il ne lui appartient pas d’interpréter l’ordre juridique interne de l’État partie et de déterminer si l’auteur avait droit aux indemnités prévues au titre de la résiliation du contrat de travail (desahucio laboral) et du départ volontaire. Par conséquent, il considère que l’auteur n’a pas suffisamment étayé les griefs qu’il tire des articles 6 et 7 du Pacte et que ceux-ci sont irrecevables au regard du paragraphe 2 e) de l’article 3 du Protocole facultatif.
CONCLUSION
9. Compte tenu de tous les renseignements fournis, le Comité, agissant en vertu du Protocole facultatif, considère que la communication est irrecevable.
Ana Esther Alarcón Flores et 116 autres auteurs, agissant comme un groupe de particuliers
c. Équateur requête du 5 mars 2015 irrecevabilité du 4 octobre 2017
Droit à la sécurité sociale : Suppression de la Caisse de prévoyance complémentaire fermée du personnel de la Banque centrale de l’Équateur
LES RECOURS AU FOND DOIVENT CONTINUER APRÈS L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU PACTE
9.5. Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel le Comité n’a pas compétence ratione temporispour examiner la présente communication étant donné que les faits qui sont à l’origine des violations alléguées se sont produits avant le 5 mai 2013, date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Équateur, et n’ont pas continué après cette date. Le Comité prend note également des allégations des auteurs selon lesquelles même si la violation de leurs droits trouve son origine dans l’adoption, par le directoire de la BCE, des résolutions DBCE-226-FPJ et DBCE-227-FPJ du 4 mars 2009, les faits matériels qui donnent lieu à la violation du Pacte ont un caractère continu puisque les auteurs ne perçoivent toujours pas leur retraite de la Caisse complémentaire à ce jour ; la procédure devant la Cour constitutionnelle, dans le cadre de l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par l’Union contre la troisième disposition générale de la loi de réforme de 2009, est toujours pendante ; et l’entrée en vigueur du Code monétaire, le 12 septembre 2014, et les procédures de recouvrement forcé à l’égard des auteurs qui ont souscrit des prêts hypothécaires auprès de la Caisse complémentaire, ouvertes depuis le 5 mai 2013, ont confirmé les mesures antérieures qui sont présumées avoir porté atteinte aux droits que leur reconnaît le Pacte.
9.6. Le Comité rappelle que le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 5 mai 2013 et que, conformément au paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité doit déclarer irrecevable toute communication portant sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’État partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date. D’autres instruments relatifs aux droits de l’homme prévoient des dispositions ratione temporis analogues, qui ont donné lieu à des interprétations diverses, ce qui amène le Comité à apporter des éclaircissements sur ce critère de recevabilité.
9.7. Le Comité note que, aux fins de déterminer si une communication satisfait au critère de recevabilité prévu au paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, une distinction doit être opérée entre les « faits » que l’on présume constituer une violation du Pacte et leurs « conséquences » ou « effets ». Comme le Comité l’a indiqué, un fait pouvant constituer une violation du Pacte n’a pas un caractère continu du seul fait que ses effets ou ses conséquences s’étendent dans le temps. En conséquence, lorsque les faits qui auraient constitué la violation du Pacte se sont produits avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État partie concerné, le seul fait que leurs conséquences ou leurs effets s’étendent dans le temps, après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif, n’est pas un motif suffisant pour déclarer une communication recevable ratione temporis. Si l’on ne faisait pas cette distinction entre les faits qui sont à l’origine de la violation alléguée et leurs conséquences ou leurs effets persistants, le critère de recevabilité ratione temporis prévu dans le Protocole facultatif, s’agissant de la compétence du Comité pour examiner les communications émanant de particuliers, serait pour ainsi dire inopérant.
9.8. Au sens du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, on entend par « faits » la séquence des événements, actes ou omissions imputables à l’État partie qui peuvent être à l’origine des violations alléguées du Pacte. Comme le Comité l’a indiqué dans des constatations précédentes, les décisions judiciaires ou administratives des autorités nationales sont aussi considérées comme faisant partie des faits lorsqu’elles sont le résultat de processus qui se rapportent directement aux faits initiaux, actes ou omissions qui sont à l’origine des violations, et pour autant qu’elles permettent de réparer les violations alléguées, conformément à la loi en vigueur à la date considérée. Lorsque ces processus surviennent après que le Protocole facultatif soit entré en vigueur pour l’État partie concerné, le critère prévu au paragraphe 2 b) de l’article 3 n’est pas un obstacle pour déclarer une communication recevable. En effet, lorsque les victimes utilisent ces moyens de recours, les autorités nationales ont la possibilité de mettre fin aux violations en cause et de les réparer.
9.9. Le Comité constate en l’espèce que les faits qui auraient donné lieu aux violations alléguées du droit à la sécurité sociale des auteurs se sont produits le 4 mars 2009, date à laquelle le directoire de la BCE a adopté la résolution DBCE-227-FP, par laquelle a été ordonnée la cessation du versement des pensions de retraite de la Caisse complémentaire à 124 personnes, dont les auteurs, qui ont pris leur retraite avant d’avoir atteint 45 ans. Cette résolution a produit des effets directs et immédiats. Dans le cas d’espèce, le Comité considère que la violation du droit à la sécurité sociale alléguée par les auteurs − la cessation du versement de la pension de la Caisse complémentaire − s’est produite le 4 mars 2009. Bien que les auteurs continuent de supporter les conséquences de la mesure en question, cette circonstance n’en modifie pas le caractère d’acte instantané. Dès lors, les faits qui sont à l’origine de la violation alléguée par les auteurs n’ont pas un caractère continu, et se sont produits avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Équateur.
9.10. Le Comité fait observer que les auteurs allèguent aussi que, pour déterminer la compétence ratione temporis du Comité, il faut prendre en considération le fait que la procédure devant la Cour constitutionnelle dans le cadre de l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par l’Union contre la troisième disposition générale de la loi de réforme de 2009, est toujours pendante, parce qu’elle s’est prolongée de manière injustifiée, et qu’en l’espèce, cette action constitue un recours adéquat et approprié pour protéger les droits que leur reconnaît le Pacte. Le Comité fait observer que par ce recours, les auteurs cherchent à obtenir l’examen de la constitutionnalité de cette disposition in abstracto, de sorte que les normes qui relèveraient de la disposition générale, dont celle par laquelle a été ordonnée la cessation du versement des pensions de retraite, puissent être déclarées contraires à la Constitution et supprimées de l’ordre juridique de l’État partie. Le Comité note cependant à ce propos que d’après l’État partie, les décisions sur la constitutionnalité d’une loi ne sont pas un recours adéquat pour réparer les violations alléguées par les auteurs dans la mesure où elles examinent in abstracto la compatibilité d’une norme avec la Constitution, et où, en général, leurs effets ne sont pas rétroactifs. Les auteurs n’ont pas réfuté l’objection de l’État partie en démontrant suffisamment que l’exception d’inconstitutionnalité constitue en tant que telle un recours efficace par lequel assurer aux auteurs la réparation de la violation alléguée des droits que leur reconnaît le Pacte. Compte tenu de ce qui précède, le Comité considère que les renseignements mis à disposition par les parties ne lui permettent pas de conclure que l’examen de l’exception d’inconstitutionnalité devant la Cour constitutionnelle peut constituer un recours effectif dans le cas des auteurs. Il s’ensuit que la procédure relative à l’exception d’inconstitutionnalité soulevée par l’Union devant la Cour constitutionnelle ne fait pas partie des « faits », s’agissant de déterminer la compétence ratione temporis du Comité, conformément au paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif.
9.11. Enfin, le Comité fait observer que les auteurs n’ont pas étayé leur argument selon lequel le Code monétaire, qui est entré en vigueur le 12 septembre 2014, s’applique directement à leur cas et viole les droits reconnus par le Pacte.
9.12. Compte tenu des éléments exposés aux paragraphes précédents, le Comité relève que les faits sur lesquels porte la communication, notamment toutes les décisions des juridictions nationales en la matière, se sont produits avant le 5 mai 2013 ; que l’information contenue dans la communication ne permet pas d’établir l’existence de faits qui auraient persisté après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif et qui seraient susceptibles de constituer, en soi, une violation de l’article 9 du Pacte. Partant, le Comité considère qu’il n’est pas compétent, ratione temporis, pour examiner les allégations des auteurs qui concernent l’article 9 du Pacte et que celles‑ci sont irrecevables au regard du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif. Le Comité fait observer que les autres plaintes présentées dans la communication sont accessoires et indissociables des griefs relatifs à la violation de l’article 9 du Pacte. En conséquence, le Comité considère que ces allégations sont elles aussi irrecevables en vertu du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif.
10.Compte tenu de toutes les informations fournies, le Comité, agissant en vertu du Protocole facultatif, considère que la communication est irrecevable.
Joaquim Pinheiro Martins Coelho c. Portugal
communication du 22 juin 2015 irrecevabilité du 6 juin 2017
INCOMPÉTENCE MATERIAE TEMPORIS : il faut que les procédures se terminent, après l'entrée en vigueur du pacte
LA REQUÊTE DOIT ÊTRE SUFFISAMMENT ÉTAYÉE
4.1. Avant d’examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 9 de son règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, déterminer si la communication est recevable au regard du Protocole facultatif.
4.2. Aux termes du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité déclare irrecevable toute communication qui porte sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date. En l’espèce, le Comité observe que les faits à l’origine des violations dont l’auteur dit être victime sont antérieurs au 5 mai 2013, date de l’entrée en vigueur du Protocole pour l’État partie. Toutefois, les décisions par lesquelles le Tribunal administratif suprême et le Tribunal constitutionnel ont rejeté les requêtes de l’auteur ont été prononcées le 18 février 2014 et le 27 juin 2014, respectivement. Ces requêtes offraient au Tribunal administratif suprême et au Tribunal constitutionnel la possibilité de procéder à un examen au fond des allégations de violation des droits garantis par le Pacte formulées par l’auteur. En conséquence, le Comité considère qu’il est compétent ratione temporis pour examiner la présente communication.
4.3. Le Comité prend note des allégations de l’auteur selon lesquelles en ne lui fournissant pas à temps son rapport d’évaluation de 2004 − avec une note positive −, la direction de l’Institut l’a empêché de demander une promotion, violant ainsi les droits qu’il tient de l’article 7 c) du Pacte. Le Comité a examiné consciencieusement les allégations de l’auteur et les renseignements contenus dans la communication, y compris les documents joints pour étayer ses demandes. Il observe que ces allégations reposent sur l’argument selon lequel le fait que l’Institut n’a pas fourni à l’auteur son rapport d’évaluation de 2004 constitue en soi une violation du Pacte. Il constate toutefois que l’auteur n’a pas mentionné expressément les procédures de recrutement auxquelles il n’avait pas pu participer ou dans le cadre desquelles sa candidature n’avait pas été retenue en raison de la non-obtention de son rapport d’évaluation de 2004, tant dans la communication présentée au Comité que dans les requêtes qu’il avait adressées aux autorités nationales. En outre, après avoir suspendu sa demande de départ à la retraite, l’auteur a participé à trois procédures de recrutement à des postes de rang supérieur, lesquelles n’avaient pas été achevées à la date de son départ obligatoire à la retraite. Par conséquent, le Comité considère que la communication est irrecevable du fait que les allégations formulées ne sont pas suffisamment étayées. Au mieux, les faits invoqués dans la communication devraient permettre au Comité d’apprécier s’ils révèlent ou non une violation du Pacte.
5. Par conséquent, le Comité décide :
a)Que la communication est irrecevable au titre du paragraphe 2e)de l’article 3 du Protocole facultatif ;
F.M.B. et consorts c. Espagne requête du 23 septembre 2016 irrecevabilité du 22 février 2017
confirmé par A. C. G. et consorts c. Espagne requête du 23 septembre 2016 irrecevabilité du 22 février 2017
4.3 Le Comité rappelle que le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 5 mai 2013 et que, conformément à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité doit déclarer irrecevable toute communication portant sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date. En l’espèce, le Comité constate que les faits sur lesquels porte la communication, y compris l’ensemble des décisions judiciaires des autorités nationales concernant l’affaire, se sont produits avant le 5 mai 2013. Il ne ressort pas des informations fournies par les auteurs que des faits susceptibles de constituer en tant que tels une violation du Pacte aient persisté après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif. Par conséquent, le Comité se considère empêché ratione temporis d’examiner la présente communication et estime que celle-ci est irrecevable conformément à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif.
CEDH ET COMITÉ
Constatations adoptées par le Comité au titre du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels concernant la communication n° 4/2014Communication présentée par : | Imelda Merino Sierra et Juan Luis Merino Sierra (représentés par l’avocate Antonia Barba García) |
Au nom de : | Les auteurs et leur mère Dominica Sierra Pablo (décédée) |
État partie : | Espagne |
Date de la communication : | 13 mai 2014 (date d’expédition dans l’État partie, le cachet de la poste faisant foi) |
Date de l ’ adoption de la décision : | 29 septembre 2016 |
Objet : | Traitement médical non consenti ; soins médicaux ni opportuns, ni appropriés, fournis par des tiers |
Questions de procédure : | Présentation de la communication dans un délai d’un an après épuisement des recours internes |
Questions de fond : | Droit au meilleur état de santé physique et mentale susceptible d’être atteint; accès à l’assistance médicale et aux services médicaux appropriés |
Article(s) du Pacte: | Paragraphe 1 et alinéa d) du paragraphe 2 de l’article 12 |
Article(s) du Protocole facultatif: | Alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 |
6.1 Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 9 de son règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif, déterminer si la communication est recevable en vertu de ce dernier. Le Comité n’examinera que les communications satisfaisant aux critères de recevabilité établis dans le Protocole facultatif.
6.2 Le Comité prend note de l’argument de l’État partie pour qui la communication est irrecevable en vertu de l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif étant donné que la même question a déjà été soumise à la Cour européenne des droits de l’homme et au Comité des droits de l’homme. Il note également que, selon les auteurs, la Cour européenne et le Comité des droits de l’homme n’ont pas examiné au fond la question sur laquelle porte la présente communication.
6.3 Le Comité observe que, le 14 novembre 2013, la Cour européenne des droits de l’homme, siégeant en formation de juge unique, a déclaré la requête des auteurs irrecevable au motif qu’elle ne satisfaisait pas aux critères de recevabilité énoncés aux articles 34 et 35 de la Convention européenne des droits de l’homme. Il relève aussi que le Comité des droits de l’homme n’a pas examiné la communication que les auteurs lui avaient présentée car, le 3 mars 2014, le secrétariat du Comité des droits de l’homme a informé les auteurs qu’elle ne contenait pas suffisamment d’éléments d’information pour pouvoir être traitée.
6.4 En vertu de l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité doit déclarer irrecevable toute communication ayant trait à une question qui a déjà fait ou qui fait l’objet d’un examen dans le cadre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement au niveau international. Le Comité considère que l’examen par la Cour européenne des droits de l’homme constitue un examen dans le cadre d’une procédure de ce type. En conséquence, il doit déterminer si la décision de la Cour européenne du 14 novembre 2013 constituait un examen de la question, au sens de l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif. À cet égard, le Comité considère qu’une communication a fait l’objet d’un examen dans le cadre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement au niveau international si l’examen dans le cadre de ladite procédure : a) portait sur la même question, c’est-à-dire qu’il concernait les mêmes parties, les mêmes faits et les mêmes droits ; et b) s’il ne se bornait pas à un examen des critères de recevabilité portant purement sur la forme, une attention suffisante ayant été accordée aux éléments de fond.
6.5Le Comité relève que la décision de la Cour européenne des droits de l’homme du 14 novembre 2013 est formulée en termes généraux et ne précise pas les raisons concrètes qui motivent la conclusion d’irrecevabilité. Dans ces conditions, le Comité estime que la décision d’irrecevabilité de la Cour européenne ne constituait pas un « examen » au sens de l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif. Il considère en conséquence que la communication satisfait au critère de recevabilité énoncé à l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif.
COMPÉTENCE MATERIAE TEMPORIS
Constatations adoptées par le Comité au titre du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels concernant la communication no 4/2014Communication présentée par : | Imelda Merino Sierra et Juan Luis Merino Sierra (représentés par l’avocate Antonia Barba García) |
Au nom de : | Les auteurs et leur mère Dominica Sierra Pablo (décédée) |
État partie : | Espagne |
Date de la communication : | 13 mai 2014 (date d’expédition dans l’État partie, le cachet de la poste faisant foi) |
Date de l ’ adoption de la décision : | 29 septembre 2016 |
Objet : | Traitement médical non consenti ; soins médicaux ni opportuns, ni appropriés, fournis par des tiers |
Questions de procédure : | Présentation de la communication dans un délai d’un an après épuisement des recours internes |
Questions de fond : | Droit au meilleur état de santé physique et mentale susceptible d’être atteint; accès à l’assistance médicale et aux services médicaux appropriés |
Article(s) du Pacte: | Paragraphe 1 et alinéa d) du paragraphe 2 de l’article 12 |
Article(s) du Protocole facultatif: | Alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 |
6.7 Le Comité rappelle que le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie le 5 mai 2013 et que, conformément à l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité doit déclarer irrecevable toute communication portant sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date. Comme le souligne la Commission du droit international:
«Un fait n’a pas un caractère continu simplement parce que ses effets ou ses conséquences s’étendent dans le temps. Il faut que le fait illicite proprement dit continue. Dans de nombreux cas, les conséquences de faits internationalement illicites peuvent se prolonger. La douleur et la souffrance causées par des actes antérieurs de torture, ou les incidences économiques d’une expropriation continuent, même si la torture a cessé ou le titre de propriété a été cédé. Ces conséquences font l’objet des obligations secondaires de réparation, notamment la restitution, […]. La prolongation de ces effets sera pertinente, par exemple, pour déterminer le montant de l’indemnité à verser. Cela ne signifie pas pour autant que la violation proprement dite a un caractère continu.».
De même, le Comité considère qu’un fait pouvant constituer une violation du Pacte n’a pas un caractère continu simplement parce que ses effets ou ses conséquences s’étendent dans le temps. Le Comité constate en l’espèce que les faits qui auraient donné lieu aux violations alléguées − négligence médicale au détriment de la mère des auteurs liée à un défaut de consentement éclairé aux examens médicaux pratiqués et à un défaut de traitement médical approprié et opportun − se sont produits en 2007 et 2008 et que toutes les décisions rendues par les juridictions nationales dans cette affaire l’ont été entre 2010 et 2013, la dernière étant la décision d’irrecevabilité du recours en amparo rendue par le Tribunal constitutionnel le 6 mars 2013, soit avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État partie. Il ne ressort pas des informations figurant dans la communication que des faits susceptibles de constituer en tant que tels une violation du Pacte aient persisté après l’entrée en vigueur du Protocole facultatif. En conséquence, le Comité se considère empêché, ratione temporis, d’examiner la présente communication et estime que celle-ci est irrecevable en vertu de l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif.
ARTICLE 11
DROIT AU LOGEMENT
Mohamed Ben Djazia et Naouel Bellil c. Espagne
communication du 20 février 2015 adoptions de vue du 20 juin 2017
EXPULSER LES LOCATAIRES SANS LES RELOGER EST INCOMPATIBLE AVEC L'ARTICLE 11 DU PACTE
11.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 9 de son règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif, déterminer si la communication est recevable
11.2Sur la base des informations fournies par les parties, le Comité constate que le 30 septembre 2013, M. Ben Djazia a soumis une demande de mesures provisoires à la Cour européenne des droits de l’homme, demande qui a été rejetée ; qu’il n’a plus saisi la Cour par la suite ; et que l’État partie n’a pas soulevé d’objections au titredu paragraphe 2 c) de l’article 3 du Protocole facultatif. En tout état de cause, le rejet d’une demande de mesures provisoires par la Cour européenne des droits de l’homme ne participe pas d’un examen de la question au sens du Protocole facultatif.
11.3Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel les griefs des auteurs sont manifestement dénués de fondement au regard du paragraphe 2 e) de l’article 3 du Protocole facultatif étant donné que les auteurs n’ont pas fait l’objet d’une expulsion forcée, mais d’une expulsion pour expiration d’un bail conclu entre particuliers, et n’ont jamais été ignorés par les autorités. Il fait toutefois observer que ce sont les faits exposés dans la communication qui lui permettent d’apprécier s’il y a eu ou non violation du Pacte, et que les auteurs ont suffisamment étayé leurs griefs aux fins de la recevabilité.
11.4Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel la communication devrait être déclarée irrecevable parce qu’elle constitue un abus du droit de soumettre une communication étant donné qu’elle contient des informations incomplètes et dénaturées visant à induire le Comité en erreur sur la situation des auteurs. Il estime toutefois que les divergences de vues entre l’État partie et les auteurs de la communication au sujet des faits, et notamment au sujet des mesures prises par les services sociaux et des démarches entreprises par M. Ben Djazia pour trouver un emploi et un logement de rechange, ne constituent pas en soi un abus du droit de présenter une communication au sens du paragraphe 2 f) de l’article 3 du Protocole facultatif.
11.5Le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel la communication est également irrecevable car il n’en ressort pas un désavantage notable pour les auteurs. Conformément à l’article 4 du Protocole facultatif, le Comité peut, si nécessaire, refuser d’examiner une communication qui ne fait pas apparaître que l’auteur a subi un désavantage notable, à moins qu’il ne considère que la communication soulève une grave question d’importance générale. Interprétée littéralement, cette disposition n’établit pas un critère de recevabilité, mais donne simplement au Comité toute discrétion pour refuser d’examiner une communication portant sur des faits ne dépassant pas un certain seuil de gravité s’il l’estime nécessaire pour tirer le meilleur parti de ses ressources aux fins de la bonne exécution de son mandat. Cette interprétation est celle qui a été retenue lors des travaux préparatoires au Protocole facultatif. Dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, le Comité prend notamment en considération sa jurisprudence relative aux différents droits garantis par le Pacte, et s’intéresse à la question de savoir si la victime présumée a subi un désavantage notable compte tenu des circonstances de l’affaire et, en particulier, de la nature des droits qui auraient été enfreints, de la gravité des violations alléguées et des conséquences éventuelles de celles-ci sur la situation personnelle de la victime présumée. À la lumière de ces considérations et des faits exposés, le Comité estime que l’article 4 du Protocole facultatif ne l’empêche pas d’examiner la communication.
11.6Le Comité constate que la communication satisfait aux autres critères de recevabilité énoncés aux articles 2 et 3 du Protocole facultatif et, par conséquent, la déclare recevable et procède à son examen au fond.
12.1Conformément à l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.
12.2Les auteurs affirment que l’État partie a violé leur droit à un logement convenable car ils ont été expulsés du logement qu’ils louaient sur décision du tribunal no 37 sans qu’il soit tenu compte du fait qu’ils n’avaient pas d’autre logement ni des conséquences de l’arrêté d’expulsion, en particulier pour leurs enfants mineurs. Ils soutiennent qu’en ce qui les concerne, les garanties judiciaires n’ont pas été respectées, et que les autorités n’ont pas attribué de logement public à la famille. De surcroît, dans un contexte de grave crise économique, la communauté de Madrid a vendu une partie de son parc de logements publics à des fonds d’investissement privés.
12.3L’État partie soutient que les auteurs ont été expulsés à l’initiative d’un particulier (la propriétaire) ; que le pouvoir judiciaire n’est intervenu qu’en qualité de médiateur ; et que la procédure engagée devant le tribunal no 37 a été menée dans le respect de toutes les garanties judiciaires. En outre, il signale que les services sociaux de la communauté et de la municipalité de Madrid ont prêté assistance aux auteurs de différentes façons (voir le paragraphe 4.5 supra) et en agissant au maximum des ressources disponibles, notamment en leur accordant des subventions et d’autres aides et en les faisant bénéficier d’un hébergement temporaire durant les dix jours qui ont suivi l’expulsion ; et que c’est l’attitude de M. Ben Djazia qui a, dans une large mesure, empêché la situation économique de la famille de s’améliorer.
12.4Les parties ne contestent pas le fait que les auteurs et leurs enfants vivaient à Madrid dans un logement de location qui était leur lieu de résidence habituel ; que la procédure judiciaire engagée par la propriétaire contre M. Ben Djazia devant le tribunal no 37 a abouti à l’expulsion des auteurs et de leurs enfants le 3 octobre 2013 ; que si M. Ben Djazia a perçu des allocations chômage et le revenu minimum d’insertion à différentes périodes (voir les notes 2 et 8 supra), au moment de l’expulsion, les auteurs n’avaient pas d’autre logement ni de revenus suffisants pour en trouver un ; qu’entre 1999 et 2011, M. Ben Djazia a demandé à de nombreuses reprises à l’IVIMA de lui octroyer un logement public, en vain (voir les notes 1 et 9 supra) ; et qu’en 2012-2013, l’IVIMA, comme d’autres institutions de la communauté de Madrid, a vendu 2 935 logements à des sociétés ou fonds d’investissement privés (voir la note 12 supra).
12.5En ce qui concerne la situation des auteurs après leur séjour dans le centre d’hébergement temporaire du Samur, le Comité prend note de l’argument de l’État partie selon lequel le Samur a informé les auteurs que, si nécessaire, il pourrait loger Mme Bellili et ses enfants dans un centre pour femmes et M. Ben Djazia dans un centre pour personnes sans abri. De leur côté, les auteurs affirment qu’après avoir été invités à quitter le centre d’hébergement temporaire, ils n’ont bénéficié d’aucune autre offre de logement décent. À cet égard, le Comité constate que les documents présentés par les deux parties (voir les notes 4 et 7 supra) montrent uniquement qu’en août 2013, les services sociaux de Tetuán ont informé M. Ben Djazia qu’au cas où sa famille serait expulsée et se retrouverait sans logement, ils adopteraient des mesures de protection en faveur des enfants. Le Comité constate en outre que l’État partie ne conteste pas l’allégation selon laquelle, après avoir passé dix jours dans le centre d’hébergement temporaire, les auteurs et leurs enfants ont dû dormir dans leur voiture pendant quatre jours, après quoi une connaissance les a hébergés pendant plusieurs semaines.
12.6Le Comité relève que les auteurs ne contestent pas les informations figurant dans le rapport du centre d’aide sociale de Madrid daté du 24 avril 2015, selon lequel, à la suite de l’intervention de ces services, M. Ben Djazia a perçu en 2012 et 2013 des aides économiques ponctuelles lui permettant de subvenir à ses besoins fondamentaux (voir le paragraphe 4.5 supra).
12.7À la lumière des faits et des arguments présentés par les parties, le Comité estime que la principale question soulevée par la communication est celle de savoir si l’expulsion des auteurs du logement qu’ils louaient, ordonnée par le tribunal no 37 au motif que le bail avait expiré et sans que les autorités n’aient attribué un autre logement aux intéressés, a constitué ou non une violation du droit à un logement convenable énoncée au paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte, compte tenu du fait que les auteurs se sont retrouvés sans abri. Pour trancher cette question, le Comité se penchera d’abord sur l’argument de l’État partie selon lequel la communication porte sur un problème entre particuliers qui ne relève pas du Pacte. Le Comité commencera par rappeler certains éléments du droit au logement particulièrement pertinents en ce qui concerne les personnes vivant dans un logement de location et la protection juridique offerte par ce droit.
13.1Le droit à un logement convenable est un droit fondamental qui est d’une importance capitale pour la jouissance de tous les droits économiques, sociaux et culturels et qui est intimement lié à d’autres droits de l’homme, notamment ceux consacrés par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ce droit doit être garanti à tous, sans distinction de revenus ou de toutes autres ressources économiques, et les États doivent prendre les mesures nécessaires à sa pleine réalisation en agissant au maximum de leurs ressources disponibles.
13.2Chaque personne a droit à un certain degré de sécurité d’occupation, et notamment à la garantie d’une protection légale contre l’expulsion, le harcèlement ou autres menaces. Cette garantie s’applique aussi aux personnes vivant dans un logement loué, que celui-ci soit public ou privé, ces personnes devant pouvoir exercer leur droit au logement, y compris en cas d’expiration du bail.
13.3Les expulsions forcées sont à première vue contraires aux dispositions du Pacte, et ne peuvent être justifiées que dans les situations les plus exceptionnelles et lorsqu’elles sont conformes aux principes applicables du droit international. Le Comité se réfère à la définition de l’expulsion forcée figurant dans son observation générale no7 (par. 3), dont il souligne qu’elle n’est pas limitée aux expulsions collectives ou à grande échelle ou aux expulsions qui sont directement le fait des autorités d’un État partie. La protection contre l’expulsion forcée s’applique également aux locataires.
13.4Lorsque l’expulsion est justifiée (voir les paragraphes 15.1 et 15.3 infra), les autorités compétentes doivent veiller à ce qu’elle soit conforme à une législation compatible avec le Pacte, notamment avec le principe de la dignité humaine énoncé dans le préambule, et aux principes généraux qui veulent que toutes mesures prises soient raisonnables et proportionnées. Les procédures d’expulsion forcée et les procédures pouvant altérer la sécurité d’occupation et éventuellement aboutir à une expulsion doivent être menées dans le respect des garanties applicables, qui prévoient notamment que les personnes intéressées doivent être véritablement consultées. Le Comité rappelle qu’il n’existe aucun droit qui ne puisse donner lieu à l’exercice d’un recours effectif et que, partant, en application du paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, les États parties ont l’obligation de garantir un recours effectif et adéquat aux personnes dont le droit à un logement convenable pourrait être bafoué, par exemple par une expulsion forcée ou une saisie hypothécaire.
14.1 Comme le soutient l’État partie, l’expulsion résultant de l’expiration d’un contrat de bail relève du litige entre particuliers et n’est pas directement le fait des autorités. Cela étant, le règlement de ce type de litige est soumis à l’ordre juridique de l’État partie, lequel est en tout état de cause responsable en dernier ressort du respect des droits consacrés par le Pacte, notamment le droit au logement des locataires. Partant, même si le litige né de l’extinction d’un contrat de bail concerne deux particuliers, l’État partie est tenu, notamment, de veiller à ce que l’expulsion du locataire ne soit pas contraire aux dispositions du paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte (voir les paragraphes 15.1 et 15.2 infra).
14.2Les États parties sont tenus non seulement de respecter les droits consacrés par le Pacte, et donc de ne pas y porter atteinte, mais aussi de protéger ces droits en prenant des mesures pour que les particuliers ne puissent pas, directement ou indirectement, entraver leur exercice. Si l’État partie ne prend pas les mesures nécessaires pour protéger un droit garanti par le Pacte, il engage sa responsabilité, y compris en cas de violation causée par l’action d’un particulier ou d’une entité privée. Partant, s’il établit essentiellement des droits et obligations liant l’État et les particuliers, le Pacte protège également les relations entre particuliers. Une expulsion liée à un contrat de bail entre particuliers peut donc porter atteinte aux droits consacrés par le Pacte. En conséquence, l’argument de l’État partie selon lequel la communication ne relève pas du Pacte car elle concerne un conflit entre seuls particuliers n’est pas valable.
15.1Dans certaines circonstances, l’expulsion d’un locataire peut être compatible avec le Pacte, à condition qu’elle soit prévue par la loi, qu’elle soit une mesure de dernier recours et que l’intéressé touché ait préalablement eu accès à un recours utile dans le cadre duquel il a pu être déterminé que l’expulsion était dûment justifiée, par exemple parce que le loyer n’était pas payé ou le logement a été endommagé sans motif raisonnable. De surcroît, il faut qu’il n’existe pas d’autres solutions ou de mesures moins graves, qu’il y ait une véritable consultation préalable entre les autorités et la personne touchée, et que celle-ci ne se retrouve pas dans une situation qui constitue une violation d’autres droits garantis par le Pacte ou d’autres droits de l’homme ou l’expose à pareille violation.
15.2En particulier, il ne faut pas que l’expulsion aboutisse à ce que l’intéressé se retrouve sans abri. Partant, si la personne expulsée ne dispose pas de ressources suffisantes pour trouver un autre logement, l’État partie doit adopter toutes les mesures nécessaires et possibles pour la reloger, la réinstaller ou lui donner accès à des terres productives, selon le cas. L’État partie doit accorder une attention particulière aux situations dans lesquelles l’expulsion touche des femmes, des enfants, des personnes âgées, des personnes handicapées, ou d’autres personnes ou groupes vulnérables ou victimes d’une discrimination systématique. Il est également tenu de prendre des mesures raisonnables en vue de reloger les personnes qui se retrouvent sans abri par suite d’une expulsion, et ce, que cette mesure ait été prise à l’initiative des autorités publiques ou d’un particulier, par exemple le propriétaire.
15.3L’obligation de fournir un logement aux personnes expulsées ayant besoin d’être relogées suppose que l’État partie prenne toutes les mesures qui s’imposent, au maximum de ses ressources disponibles, pour garantir l’exercice du droit au logement, comme prévu au paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte. Pour parvenir à cet objectif, l’État partie peut adopter tout un éventail de politiques, et notamment créer des allocations de logement en faveur de ceux qui n’ont pas les moyens de se loger. Quelle que soit la mesure prise, elle doit être délibérée, concrète et orientée le plus clairement possible vers la réalisation rapide et effective du droit au logement. Les politiques de relogement des personnes expulsées doivent être proportionnées aux besoins des intéressés et à l’urgence de leur situation, et respecter la dignité de la personne. De surcroît, l’État partie est tenu de prendre des mesures cohérentes et coordonnées en vue de régler les problèmes institutionnels et structurels qui causent le manque de logements.
15.4Les droits de l’homme sont indivisibles et interdépendants. En conséquence, les obligations mises à la charge de l’État partie en ce qui concerne le droit au logement doivent être interprétées à la lumière de toutes les autres obligations relatives aux droits de l’homme et, dans le contexte des expulsions, à la lumière en particulier de l’obligation d’accorder à la famille la plus large protection possible (par. 1 de l’article 10 du Pacte). L’obligation faite à l’État partie d’agir au maximum de ses ressources disponibles pour reloger les personnes expulsées qui ont besoin de l’être suppose que l’on protège l’unité familiale, en particulier lorsque les personnes concernées ont des enfants à charge à l’éducation et aux besoins desquels elles doivent pourvoir.
15.5Lorsqu’une personne est expulsée sans que les autorités ne lui octroient ou ne lui garantissent un autre logement, l’État partie doit démontrer qu’il a examiné les circonstances de l’affaire et que, bien qu’il ait pris toutes les mesures raisonnables et agi au maximum des ressources disponibles, il n’a pas pu garantir l’exercice du droit au logement de l’intéressé. Les informations fournies par l’État partie doivent permettre au Comité de déterminer si les mesures adoptées sont raisonnables, comme prévu au paragraphe 4 de l’article 8 du Protocole facultatif.
16.1Le Comité examinera si l’expulsion des auteurs du logement qu’ils louaient a constitué une violation de leur droit à un logement convenable. Le Comité constate que, les 15 mars et 12 juillet 2012, la propriétaire a informé M. Ben Djazia qu’elle ne reconduirait pas le bail, conformément aux articles 9 et 10 de la loi sur les baux d’habitation en zone urbaine et à l’article no1569 (par. 1) du Code civil ; que le bail a expiré le 31 août 2012 ; et que, malgré cela, les auteurs ont refusé de quitter le logement. Saisi par la propriétaire, le 30 mai 2013, le tribunal no 37 a ordonné l’expulsion des auteurs pour expiration du bail, en application des articles 440 (par. 4) et 549 (par. 3) de la loi sur la procédure civile. En conséquence, l’expulsion des auteurs était conforme à la loi.
16.2Le Comité constate que les auteurs ont refusé de quitter le logement qu’ils louaient alors que la propriétaire les avait informés suffisamment à l’avance qu’elle ne renouvellerait pas le bail, venu à expiration le 31 août 2012. En outre, à partir de juin 2012, les auteurs n’ont plus pu payer leur loyer mensuel. En l’absence d’informations indiquant que la demande de la propriétaire n’était pas raisonnable ni nécessaire, le Comité estime qu’il existait une raison légitime pouvant justifier l’expulsion des auteurs.
16.3Le Comité prend note de l’allégation des auteurs selon laquelle la procédure engagée devant le tribunal no 37 n’a pas été menée dans le respect des garanties judiciaires et les autorités compétentes ont rejeté leur demande de commission d’office d’un avocat. Il prend également note des arguments de l’État partie selon lesquels le tribunal no 37 a respecté toutes les garanties de procédure prévues dans le Pacte (voir le paragraphe 6.3 supra). Le Comité constate que M. Ben Djazia a pu bénéficier d’une assistance juridique à titre gracieux et être représenté tout au long de la procédure et que son avocat a présenté différents recours ; qu’il a été informé suffisamment à l’avance de l’expiration du bail et de l’expulsion ; et que celle-ci a eu lieu à une heure décente et en la présence d’agents des services de police et de justice, d’agents de police et des représentants des parties.
16.4Le Comité prend note des allégations des auteurs selon lesquelles le tribunal no 37 a ordonné leur expulsion sans évaluer les conséquences qu’elle pourrait avoir sur eux, en particulier sur leurs enfants mineurs, et la loi ne permet pas aux personnes visées par une procédure judiciaire d’expulsion de faire opposition ou d’introduire un recours pour dénoncer les conséquences de leur expulsion, les autorisant seulement à faire valoir le paiement total ou partiel du loyer. À cet égard, le Comité constate que par des décisions datées du 30 mai et des 2 et 22 juillet 2013, le tribunal no37 a ordonné puis confirmé l’expulsion des auteurs sur la base des articles 440 (par. 4) (modifié par la loi no 37/2011), 549 (par. 3) et 556 (par. 1) de la loi sur la procédure civile. Conformément à ces dispositions et à l’article 444 (par. 1) de la loi sur la procédure civile, le défendeur peut uniquement tirer argument du paiement du loyer ou d’autres circonstances susceptibles de mettre un terme à la procédure d’expulsion. Par ailleurs, le Comité note que si aucune loi ne permet expressément au juge saisi d’une procédure orale d’expulsion d’évaluer la compatibilité de l’expulsion avec le Pacte (voir les paragraphes 15.1 et 15.2 supra), le 30 mai 2013, le tribunal no 37 a néanmoins chargé la commission des affaires sociales et le secrétariat chargé de la famille et des services sociaux de la municipalité de Madrid d’adopter les mesures relevant de leur compétence pour éviter que M. Ben Djazia ne se retrouve dans une situation de détresse et, en particulier, d’informer celui-ci dans un délai de vingt jours des mesures concrètes qu’ils auraient prises afin de garantir le droit de ses enfants mineurs à un logement décent et convenable. Le tribunal a renouvelé sa demande le 2 juillet 2013. En outre, il a reporté l’expulsion à plusieurs reprises comme suite aux demandes de M. Ben Djazia.
16.5Le Comité prend note des mesures adoptées par le tribunal no37 en vue d’éviter que les auteurs, et en particulier leurs enfants mineurs, ne se retrouvent sans abri ou ne soient exposés à des violations d’autres droits de l’homme, et estime que, dans la pratique, le tribunal a évalué les effets potentiels de l’expulsion bien que la loi ne l’y ait pas obligé. Cela étant, dans l’État partie, le droit au logement n’est pas un droit fondamental pouvant être directement protégé par l’introduction d’un recours en amparo. De surcroît, dans les procédures orales d’expulsion, les juges ne sont pas tenus d’ordonner qu’il soit sursis à l’expulsion jusqu’à ce que la personne concernée puisse être relogée. La loi ne leur donne d’ailleurs pas expressément le pouvoir de ce faire, ni d’ordonner aux autorités, par exemple aux services sociaux, de prendre des mesures coordonnées pour éviter que la personne expulsée ne se retrouve sans abri. Le tribunal no 37 a fait procéder à l’expulsion des auteurs et de leurs enfants le 3 octobre 2013 alors que ceux-ci n’avaient pas d’autre logement ni de revenus suffisants pour en trouver un autre et qu’il ne savait pas si les services sociaux de Madrid accueilleraient sa demande.
16.6En conséquence, après un séjour dans un centre d’hébergement temporaire du Samur, les auteurs et leurs enfants ont dormi dans leur voiture pendant quatre jours. LeComité estime donc qu’avoir expulsé les auteurs sans s’être préalablement assuré qu’ils pourraient être relogésconstitue une violation du droit des intéressés à un logement convenable, sauf si l’État partie démontre de manière convaincante que malgré avoir pris toutes les mesures raisonnables qu’il pouvait prendre et agi au maximum des ressources disponibles en tenant compte de la situation des auteurs, il n’a pas pu garantir l’exercice par ceux-ci du droit au logement. En l’espèce, l’État est d’autant plus tenu de justifier ses actes que l’expulsion a touché les enfants mineurs des auteurs, âgés d’environ 1 et 3 ans. Le Comité se penchera donc sur la question de savoir si les explications fournies par l’État partie sont raisonnables.
17.1Le Comité constate que l’État partie ne conteste pas que la famille des auteurs avait besoin d’un logement public, mais se borne à affirmer que les services sociaux de Madrid ont entrepris diverses démarches en faveur de celle-ci, y compris pour lui procurer un logement en agissant au maximum de leurs ressources disponibles, et que c’est l’attitude de M. Ben Djazia qui a, dans une large mesure, empêché que la situation économique de la famille ne s’améliore.
17.2Le Comité estime que, pour rationaliser l’utilisation des ressources mises à la disposition des services sociaux, les États parties peuvent subordonner l’octroi de prestations sociales au respect de certaines exigences ou conditions. Celles-ci doivent toutefois être raisonnables et définies avec la plus grande précaution, non seulement pour éviter la stigmatisation, mais aussi parce que lorsqu’une personne demande à être relogée, son comportement ne saurait en soi justifier que l’État partie ne lui octroie pas un logement social. Elles doivent aussi être portées à la connaissance du demandeur en temps voulu et de manière transparente et exhaustive. Il convient de surcroît de tenir compte du fait que bien souvent, le manque de logement est lié à des problèmes structurels, tels un taux de chômage élevé ou des facteurs systémiques d’exclusion sociale, que l’État partie doit résoudre en prenant des mesures adéquates, opportunes et coordonnées auxquelles il consacre le maximum de ses ressources disponibles.
17.3Dans la présente affaire, l’État partie ne soutient pas que M. Ben Djazia n’a pas satisfait aux conditions d’octroi d’un logement public, se contentant de mettre en cause ce que l’intéressé a fait pour trouver un emploi et un logement de rechange et satisfaire aux conditions auxquelles est subordonné l’octroi d’autres prestations sociales dont il a bénéficié. L’État partie n’a donc pas démontré que les auteurs n’avaient pas rempli certaines conditions qu’ils savaient devoir remplir pour pouvoir bénéficier d’un logement social. Au contraire, le Comité constate que M. Ben Djazia a demandé un logement social auprès de l’IVIMA à trois ou quatre reprises au moins à compter de la naissance de ses enfants et que, le 4 juin 2013, il a de nouveau sollicité cet organisme en joignant à sa demande une copie de la décision rendue par le tribunal no37 le 30 mai 2013. Face à l’imminence de l’expulsion, M. Ben Djazia a demandé à ce tribunal d’intervenir auprès des services sociaux de la communauté et de la municipalité de Madrid et d’enjoindre à l’IVIMA et à l’EMVS de le reloger.
17.4L’État partie argue également que chaque année, en moyenne, l’IVIMA reçoit 8 000 demandes de logement public et en accueille 260. Il semble ainsi laisser entendre que bien que les auteurs aient satisfait aux conditions, ils ne se sont pas vu octroyer de logement public en 2012-2013, au moment où leur expulsion était imminente, parce que les ressources disponibles étaient limitées.
17.5Tout en prenant note des mesures prises en faveur des auteurs (voir le paragraphe 4.5 supra), le Comité estime que les arguments de l’État partie ne suffisent pas à démontrer que celui-ci a déployé tous les efforts possibles et utilisé toutes les ressources à sa disposition pour garantir à titre prioritaire l’exercice du droit au logement par les personnes qui, comme les auteurs, sont particulièrement dans le besoin. Ainsi, l’État partie n’a pas démontré que le refus d’octroyer aux auteurs un logement social était nécessaire et justifié par le fait que ses ressources étaient consacrées à l’exécution, par les pouvoirs publics, d’une politique générale ou d’un plan d’urgence destinés à la réalisation progressive du droit au logement, en particulier par les personnes en situation de grave vulnérabilité. En outre, l’État partie n’a pas expliqué pourquoi les autorités régionales de Madrid, notamment l’IVIMA, avaient vendu une partie du parc de logements publics à des sociétés d’investissement, réduisant ainsi le nombre de logements disponibles à Madrid alors qu’il était déjà chaque année considérablement inférieur à la demande, ni en quoi cette vente était justifiée et constituait le meilleur moyen de garantir la pleine réalisation des droits reconnus dans le Pacte. En 2013, par exemple, l’IVIMA a vendu 2 935 biens immobiliers à une entité privée pour 201 millions d’euros, invoquant des raisons d’équilibre budgétaire.
17.6Le Comité est d’avis que les États parties ont une certaine latitude pour ce qui est de décider de la manière la plus appropriée de disposer des ressources budgétaires aux fins de la pleine réalisation des droits reconnus dans le Pacte, et que, dans certaines circonstances, ils peuvent prendre des mesures délibérément régressives. Toutefois, en pareil cas, ils doivent s’assurer que leur décision est fondée sur un examen exhaustif et est justifiée au regard de l’ensemble des droits prévus par le Pacte et de la nécessité d’agir au maximum des ressources disponibles. En période de grave crise économique et financière, tous changements ou ajustements apportés aux politiques doivent être temporaires, nécessaires, proportionnés et non discriminatoires. En l’espèce, l’État partie n’a pas présenté d’arguments convaincants justifiant l’adoption de la mesure régressive décrite au paragraphe précédent, à savoir la diminution du nombre de logements sociaux, précisément au moment où le besoin de pareils logements était particulièrement grand en raison de la crise économique.
17.7Pour finir, le Comité examinera l’argument de l’État partie selon lequel le Samur a fait savoir aux auteurs que s’ils n’avaient pas trouvé de logement au moment où ils devraient quitter le centre d’hébergement temporaire du Samur social de Madrid, MmeBellili et les enfants pourraient être hébergés dans un centre pour femmes, et M. Ben Djazia dans un centre pour sans-abri, et les services sociaux de la municipalité de Madrid leur ont fait une proposition semblable. Pareille solution aurait brisé l’unité familiale, ce qui aurait été contraire au devoir mis à la charge de l’État partie par le paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte d’accorder la plus large protection possibleà la famille, qui est l’élément fondamental de la société. À cet égard, l’État partie n’a pas expliqué au Comité pourquoi aucune autre solution ne pouvait être proposée aux auteurs.
17.8Pour les raisons qui précèdent, le Comité conclut que l’État partie n’a pas présenté d’arguments raisonnables permettant de démontrer que bien qu’il ait pris toutes les mesures nécessaires et agi au maximum des ressources disponibles, il lui a été impossible de reloger les auteurs.
18.À la lumière de toutes les informations qui lui ont été communiquées et des circonstances de l’espèce, le Comité estime que, faute d’arguments raisonnables présentés par l’État partie pour justifier qu’il n’a pas pris toutes les mesures possibles et agi au maximum des ressources disponibles, le fait d’avoir expulsé les auteurs sans que les autorités de l’État partie, y compris les autorités régionales de Madrid, leur aient garanti un autre logement a constitué une violation du droit des intéressés à un logement convenable.
19.Le Comité, agissant en vertu du paragraphe 1 de l’article 9 du Protocole facultatif, constate que l’État partie a violé les droits que les auteurs tiennent du paragraphe 1 de l’article 11, lu seul et conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2 et le paragraphe 1 de l’article 10 du Pacte. À la lumière des présentes constatations, le Comité adresse les recommandations ci-après à l’État partie.
20.L’État partie est tenu d’offrir aux auteurs une réparation effective, et notamment : a) s’ils ne disposent pas d’un logement convenable, d’évaluer leur situation actuelle et, le cas échéant, de leur octroyer un logement public ou de les faire bénéficier d’une autre mesure leur permettant de vivre dans un logement convenable, après les avoir véritablement consultés et compte étant tenu des critères établis dans les présentes constatations ; b) de les indemniser pour les violations subies ; c) de les rembourser des honoraires d’avocat associés au traitement de la communication, dans la mesure du raisonnable.
22.Le Comité estime que les réparations recommandées dans le contexte de communications individuelles peuvent prendre la forme de garanties de non-répétition et rappelle que l’État partie est tenu d’empêcher que des violations analogues ne se produisent à l’avenir. Il estime également que l’État partie doit veiller à ce que sa législation et les mesures prises pour l’appliquer soient conformes aux obligations énoncées dans le Pacte. L’État partie est notamment tenu :
a)D’adopter les mesures législatives ou administratives qui s’imposent pour que, dans le cadre des procédures judiciaires d’expulsion de locataires, les défendeurs puissent faire opposition ou interjeter appel afin que le juge examine les conséquences de leur expulsion éventuelle et sa compatibilité avec le Pacte ;
b)De prendre les mesures nécessaires pour remédier au manque de cohérence entre les décisions rendues par les tribunaux et les mesures prises par les services sociaux, qui peut conduire à ce qu’une personne expulsée se retrouve sans logement convenable ;
c)De prendre les mesures nécessaires pour que les arrêtés d’expulsion frappant des personnes n’ayant pas les moyens de se reloger ne soient mis à exécution qu’après avoir véritablement consulté les intéressés et fait tout ce qui s’imposait en agissant au maximum des ressources disponibles pour que ceux-ci soient relogés, en particulier lorsque l’expulsion concerne des familles, des personnes âgées, des enfants ou d’autres personnes vulnérables ;
d)De formuler et de mettre à exécution, en coordination avec les communautés autonomes et en agissant au maximum des mesures disponibles, un plan global et intégré visant à garantir l’exercice du droit à un logement convenable par les personnes à faible revenu, conformément à l’observation générale no4. Dans ce plan devront être indiquées les ressources et les mesures qui seront mises en œuvre pour garantir le droit au logement de ces personnes, ainsi que les délais correspondants et les critères qui seront utilisés pour déterminer si l’objectif a raisonnablement été atteint.
23.Conformément au paragraphe 2 de l’article 9 du Protocole facultatif et au paragraphe 1 de l’article 18 du règlement intérieur provisoire y relatif, l’État partie doit adresser au Comité, dans un délai de six mois, des renseignements écrits sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations et recommandations. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques et à les diffuser largement, sur des supports accessibles, afin que tous les groupes de population en prennent connaissance.
I. D. G. c. Espagne Communication no 2/2014, constatations du 7 juin 2015
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (ci-après le Comité), institué en vertu de la résolution no 1985/17 du Conseil économique et social,
Réuni le 17 juin 2015,
Ayant achevé l’examen de la communication no 2/2014 présentée en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (ci-après le Protocole),
Adopte ce qui suit :
1.1 L’auteure de la communication est Mme I. D. G., de nationalité espagnole, née le 28 juin 1965. Elle se déclare victime d’une violation par l’État partie des droits que lui confèrent l’article 11 et le paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. L’auteure est représentée par un conseil.
1.2Dans les présentes constatations, le Comité résume d’abord les renseignements fournis et les arguments avancés par les parties. Il examine ensuite les questions de recevabilité et de fond qui se posent dans la communication puis formule des conclusions et des recommandations.
2.1L’auteure vit à Madrid. Le 15 juin 2007, elle a acheté un logement avec une grande partie de ses économies et au moyen d’un prêt bancaire assorti d’une garantie hypothécaire. D’après elle, la valeur de ce logement a été estimée, aux fins de sa mise aux enchères, à 742 890,68 euros.
2.2Du fait de la grave crise économique dans l’État partie et pour raisons personnelles, l’auteure n’a pas honoré plusieurs échéances de remboursement de l’emprunt hypothécaire qui représentent un total d’environ 11 000 euros. Elle fait valoir que la banque (l’entité créancière) n’a pas accepté de négocier.
2.3L’entité créancière a engagé la liquidation de la totalité de l’emprunt et lancé une procédure spéciale de saisie de biens hypothéqués auprès de la chambre no 31 du tribunal de première instance de Madrid (ci-après le tribunal) en vue de mettre son logement aux enchères. Le 21 juin 2012, le tribunal a engagé la procédure de saisie hypothécaire pour un remboursement de principal de 381 153,66 euros, d’intérêts ordinaires de 5 725,80 euros et d’intérêts moratoires de 856,77 euros.
2.4Sur ordre du tribunal, les 6, 27 et 28 septembre 2012, le Service commun des notifications et des saisies de Madrid a tenté de notifier à l’auteure la demande et l’avis de saisie hypothécaire à l’adresse du bien hypothéqué, indiquée par l’auteure dans les documents du prêt. L’agent notificateur n’y a pas trouvé l’auteure. À la troisième tentative, il a indiqué par écrit que « personne ne répondait ni n’ouvrait bien qu’il ait sonné à plusieurs reprises au domicile indiqué de l’intéressée » et a ajouté la note suivante : « Après avoir vérifié que le nom de la débitrice figurait sur la boîte aux lettres, je suis entré dans l’immeuble, j’ai sonné à la porte de l’appartement mais n’ai pas obtenu de réponse. Le concierge affirme qu’il travaille depuis peu dans cet immeuble, que l’intéressée figure sur la liste des personnes qui y habitent mais qu’il ne la connaît pas car il arrête son service à 18 heures ». Enfin, le 4 octobre 2012, à 21 h 24, un agent s’est de nouveau présenté chez l’auteure, sans succès. L’auteure fait valoir qu’elle ne se trouvait pas chez elle chaque fois qu’un agent est venu lui remettre l’avis de saisie.
2.5Le 30 octobre 2012, le tribunal a décidé qu’un avis serait apposé sur le panneau d’affichage des annonces légales du tribunal afin de notifier l’avis et la procédure de saisie. L’auteure fait valoir que la publication de cet avis n’a fait l’objet d’aucune publicité à l’extérieur du tribunal, ni dans un organe de presse officiel ni au Journal officiel. Elle indique que le tribunal ne la trouvant pas à son domicile habituel aurait dû remettre l’avis au concierge, qui était présent dans son immeuble les 6 et 28 septembre 2012, ou à un voisin. Par conséquent, le tribunal ne lui a pas notifié l’ouverture de la procédure d’une manière qui lui permettait de se défendre.
2.6Le 11 février 2013, le tribunal a ordonné la mise aux enchères du logement hypothéqué. Les 1er et 21 mars 2013, le Service commun des notifications et des saisies de Madrid a tenté, sans succès, de notifier à l’auteure cette mise aux enchères, à l’adresse du bien hypothéqué. À la seconde tentative, l’agent notificateur a consigné qu’il avait « laissé un avis de retrait à la poste avant le 5 avril 2013 ». Le 4 avril 2013, l’auteure, par le biais d’un mandataire, a fini par retirer l’avis. L’auteure affirme que ce n’est qu’à ce moment-là qu’elle a pris connaissance de la procédure de saisie hypothécaire et de la mise aux enchères de son logement.
2.7Le 10 ou le 11 avril 2013, l’auteure a formé un recours en rétractation auprès du tribunal concernant son ordonnance du 11 février 2013, dont elle a demandé la nullité, ainsi que celle de l’ensemble de la procédure de saisie hypothécaire jusqu’au moment de la citation, puisque la demande de saisie hypothécaire ne lui avait pas été notifiée aux différentes adresses dont l’entité créancière avait connaissance, notamment le domicile d’un proche ou son lieu de travail, contrevenant notamment ainsi à l’exercice des droits de la défense et au droit à un recours juridictionnel effectif. L’auteure a fait valoir que, d’après les articles 156 et 164 du Code procédure civile et la jurisprudence du Tribunal constitutionnel et du Tribunal suprême, la notification par voie d’affichage ne peut être employée qu’une fois que tous les moyens de notification à personne et de localisation du défendeur à d’autres adresses ont été épuisés.
2.8Le 23 avril 2013, le tribunal a rejeté le recours de l’auteure. Dans sa décision, il a indiqué que le commandement de payer devait être délivré au domicile fixé par les parties, qu’il s’agisse du domicile initialement établi ou d’un autre établi par la suite, conformément à l’article 683 du Code de procédure civile. D’après le tribunal, « depuis la révision de l’article 686 3) du Code de procédure civile, dans le cadre des procédures simplifiées de saisie hypothécaire, les tribunaux passent directement à la notification par voie d’affichage » sans qu’il soit nécessaire de notifier le commandement de payer sur le lieu de travail ou à toute autre adresse du défendeur. Dans le cas de l’auteure, le tribunal a indiqué que le Service commun des notifications et des saisies de Madrid avait dûment tenté de lui remettre l’avis à trois reprises, dont deux fois l’après-midi, puisque le concierge de l’immeuble avait laissé entendre qu’elle se trouvait chez elle plutôt à ce moment-là. Par ailleurs, le tribunal a indiqué qu’il n’était pas compétent pour examiner la nullité de la décision du 11 février 2013, en vertu des articles 5 et 562, paragraphe 2, du Code de procédure civile et de l’article 455 de la loi organique du pouvoir judiciaire.
2.9Le 23 mai 2013, l’auteure a formé un recours en amparo auprès du Tribunal constitutionnel et affirmé que la décision du tribunal, qui avait rejeté son recours en rétractation, contrevenait à l’exercice des droits de la défense et au droit à un recours juridictionnel effectif que prévoient les articles 24 et 25 de la Constitution de l’État partie, et que le tribunal ne suivait pas la jurisprudence du Tribunal constitutionnel. L’auteure a fait valoir que le tribunal ne lui avait pas notifié la demande de saisie hypothécaire, ni l’ouverture de la procédure ni tout autre acte antérieur à l’ordonnance de mise aux enchères, et qu’il n’avait pas épuisé tous les moyens existants pour lui remettre la notification, comme le prévoient les articles 155, 156 et 683 du Code de procédure civile.
2.10Le 16 octobre 2013, le Tribunal constitutionnel a débouté l’auteure de son recours du fait de « l’absence manifeste de violation d’un droit fondamental protégé par l’amparo », conformément aux articles 44, paragraphe 1, et 50, paragraphe 1 a), de la loi organique du Tribunal constitutionnel.
3.1L’auteure affirme que l’État partie a enfreint son droit à un logement suffisant consacré par le paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte.
3.2L’auteure souligne que son cas se produit dans un contexte de grave crise sociale dans l’État partie où plus de 400 000 expulsions et saisies hypothécaires ont eu lieu entre 2007 et la date de la présentation de la communication au Comité.
3.3L’auteure fait valoir que, à la lumière des droits garantis par le Pacte, les autorités judiciaires doivent veiller à la notification des décisions et actes judiciaires. Toutefois, dans son cas, le tribunal, n’ayant pu lui notifier en personne la décision à son domicile, a directement procédé à la notification par voie d’affichage, sans recourir aux autres formes ou moyens de notification prévus par le Code de procédure civile. Du fait du défaut de diligence du tribunal, ni la demande de saisie hypothécaire déposée par l’entité créancière, ni l’ouverture de la procédure, ni tout autre acte antérieur à la mise aux enchères ne lui ont été notifiés. L’auteure affirme que, dans la pratique, l’absence de notification l’a empêchée de donner juridiquement suite à la demande de saisie hypothécaire et de faire valoir son droit au logement devant les tribunaux puisqu’elle n’a pris connaissance de l’existence de la procédure qu’une fois que le tribunal eut ordonné la mise aux enchères de son logement. N’ayant pas pu déposer de recours juridictionnel effectif en temps utile, l’auteure prétend être privée de moyens de défense et plongée dans l’incertitude et l’angoisse, ce qui a de graves répercussions sur sa santé.
3.4D’après l’auteure, l’absence d’accès effectif aux tribunaux de l’État partie l’a empêchée de contester auprès d’eux le caractère abusif des clauses contractuelles et de s’opposer par exemple à la façon dont l’entité créancière avait calculé les intérêts qu’elle devait payer.
3.5L’auteure affirme que la législation qui régit les procédures de saisie hypothécaire ne protège pas suffisamment le droit des personnes de défendre véritablement leur logement devant les tribunaux. En pareil cas, les personnes concernées apprennent souvent que les créanciers ont déposé une demande de saisie hypothécaire au moment de leur éviction ou expulsion. En outre, les règles de procédure de l’État partie interdisent au juge saisi de prendre des mesures conservatoires garantissant la pleine efficacité de sa décision finale, par exemple en cas de clauses contractuelles abusives. À cet égard, se référant au paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, l’auteure fait valoir que l’État partie n’a pas adopté les mesures législatives nécessaires pour assurer le plein exercice du droit au logement, consacré au paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte.
3.6Comme mesures de réparation, l’auteure prie le Comité de demander à l’État partie de revenir au stade précédant les actes de procédure concernant la saisie hypothécaire de son logement, à savoir au moment de la première notification de la demande de saisie hypothécaire afin de garantir véritablement son droit au logement et de lui permettre de défendre son droit devant les juridictions ordinaires ou alors, de lui verser 250 000 euros au titre du préjudice moral subi. Par ailleurs, elle demande que l’État partie adopte les mesures législatives nécessaires pour garantir les droits consacrés par le Pacte.
4.1Le 13 octobre 2014, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et sur le fond de la communication. S’agissant des faits qui y sont exposés, l’État partie dit que, bien que l’auteure affirme au Comité que le logement en question constitue son domicile, dans le recours en rétractation qu’elle a formé le 10 avril 2013, elle a fait valoir que le tribunal aurait dû lui remettre la notification non seulement à l’adresse du logement hypothéqué, qu’elle avait elle-même indiquée dans les documents du prêt, mais aussi à un autre domicile familial ou, à défaut, sur son lieu de travail, dont l’entité créancière connaissait, d’après elle, les adresses.
4.2L’État partie indique que, dans l’avis de saisie hypothécaire du 21 juin 2012, le tribunal a indiqué à la débitrice qu’elle pouvait s’opposer à cette saisie en faisant valoir les motifs mentionnés à l’article 695 du Code de procédure civile. Cette procédure n’empêche pas le débiteur concerné de saisir les tribunaux ordinaires non administratifs sur des questions relatives à la défense de ses droits et intérêts. L’État partie ajoute que le Tribunal constitutionnel a conclu que la procédure de saisie hypothécaire et plus précisément les articles 695 et 698 du Code de procédure civile n’affectent pas le droit à un recours juridictionnel effectif en ce qui concerne l’égalité des parties au cours de la procédure et le droit à un logement digne et suffisant pour autant que la décision prise dans le cadre de cette procédure n’a pas force de chose jugée et que la voie de la procédure ordinaire reste ouverte.
4.3L’État partie indique que la décision du tribunal a été notifiée au domicile que l’auteure a indiqué dans les documents du prêt. Conformément aux articles 682, 683 et 686 du Code de procédure civile, le commandement de payer, acte qui enclenche la procédure de saisie hypothécaire, et les notifications sont remis au domicile volontairement indiqué par le débiteur. Ils ne sont donc pas délivrés à une adresse fixée de manière arbitraire par le créancier ou l’autorité judiciaire. Cela est indispensable au bon fonctionnement de la procédure car il serait impossible d’imposer au créancier la charge de vérifier l’adresse de domicile du débiteur.
4.4Selon l’État partie, ce n’est qu’après plusieurs tentatives infructueuses de notification à l’auteure que le tribunal a décidé de notifier la saisie hypothécaire par voie d’affichage, conformément au paragraphe 3 de l’article 686 du Code de procédure civile. Cette forme de notification est conforme aux exigences du droit à un recours juridictionnel effectif. Une fois affichée la notification de la procédure de saisie hypothécaire, conformément à l’article 691 du Code de procédure civile, il a été procédé à la mise aux enchères du bien hypothéqué par l’ordonnance du 11 février 2013, dont le mandataire de l’auteure a recueilli l’avis le 4 avril 2013, après deux tentatives infructueuses de notification à l’adresse que l’auteure avait indiquée.
4.5L’État partie indique que l’auteure a uniquement formé un recours en rétractation contre la décision du 11 février 2013 dans laquelle le tribunal ordonnait la mise aux enchères du logement hypothéqué et que cette forme de recours permet d’examiner la légalité de la décision contestée mais pas de l’annuler au motif de violation de droits fondamentaux. Il ajoute que l’auteure n’a pas introduit de demande incidente d’annulation des actes de procédure, voie à suivre pour obtenir l’annulation des actes qui risquent de porter atteinte à des droits fondamentaux. C’est pour cela que le Tribunal constitutionnel n’a pas pu, par la suite, examiner si la notification par voie d’affichage avait violé un droit fondamental et statuer sur la nullité de cet acte.
4.6L’État partie indique que, l’auteure ayant épuisé les recours internes, l’objet de la communication est la notification soi-disant indue de la procédure de saisie hypothécaire, et qu’il ne saurait porter sur d’autres questions ou circonstances relatives à cette procédure ou à la saisie hypothécaire.
4.7L’État partie indique que, au moment où il présente ses observations, aucune expulsion n’a eu lieu, que le logement hypothéqué où vit l’auteure n’a pas été saisi ni mis aux enchères, et que l’auteure a présenté au tribunal une demande de suspension de la procédure d’enchères au motif de la nullité de certaines clauses du contrat de prêt hypothécaire. Le 4 octobre 2013, le tribunal a en partie fait droit à cette demande incidente en déclarant la nullité de la sixième clause du contrat (« intérêts moratoires »).
4.8Afin de garantir la réalisation du droit consacré au paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte, l’État partie a promulgué la loi no 1/2013 du 14 mai relative aux mesures visant à renforcer la protection des débiteurs hypothécaires, à faciliter la restructuration de la dette et à favoriser l’accès au logement social, ainsi que le décret-loi royal no 27/2012 du 15 novembre relatif aux mesures d’urgence visant à mieux protéger les débiteurs hypothécaires. Par ailleurs, l’État partie estime que la procédure de saisie hypothécaire réglementée par le Code de procédure civile respecte strictement les exigences découlant du droit à un recours juridictionnel effectif. Il souligne en particulier qu’il incombe au débiteur d’indiquer un domicile où les décisions et actes peuvent lui être notifiés, qu’il peut le modifier en tout temps, que plusieurs tentatives de notification à personne doivent être effectuées avant qu’il ne soit procédé à titre exceptionnel, si la notification à personne est impossible, à une notification par voie d’affichage, qu’à tout moment un débiteur peut saisir une juridiction de jugement en invoquant tout point concernant la défense de ses droits et intérêts, que la procédure peut être suspendue et la nullité des clauses abusives du contrat de prêt hypothécaire demandée et que, à tout moment de la procédure, l’intéressé peut introduire une demande incidente d’annulation des actes de procédure s’il estime que le droit à un recours juridictionnel effectif a été enfreint au cours de la procédure de saisie.
5.1Par un courrier daté du 10 décembre 2014, l’auteure a présenté ses commentaires sur les observations de l’État partie. Elle conteste les arguments selon lesquels elle possède un autre bien immobilier et ne vit pas dans la résidence en question et elle joint des documents attestant que le logement hypothéqué en question est bien son domicile habituel et le lieu où elle vit. Elle fait valoir que l’État partie a accès à différents registres publics et archives, comme le registre d’état civil, celui du fisc et les registres des habitants de chaque municipalité, mais qu’il conteste les faits sans apporter de preuve ni de justificatif. Elle ajoute que, divorcée et sans enfants, elle vit seule dans le logement hypothéqué et que, lorsqu’elle a indiqué, dans le recours qu’elle a formé, que la notification aurait pu lui être remise au domicile d’un proche, elle se référait au domicile de sa mère, dont l’entité créancière connaissait l’adresse.
5.2L’auteure souligne que sa communication pour violation du paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte vient du fait qu’elle n’a pas été notifiée de la demande de saisie hypothécaire et du déclenchement de la procédure, ce qui l’a empêchée de défendre son droit au logement auprès des tribunaux.
5.3D’après l’auteure, le paragraphe 3 de l’article 686 du Code de procédure civile autorise la notification par voie d’affichage uniquement lorsqu’il a été au préalable impossible de notifier le débiteur. En outre, d’après les règles de procédure de l’État partie et la jurisprudence du Tribunal constitutionnel, en règle générale, il n’est procédé à la notification par voie d’affichage que lorsque tous les autres moyens possibles de notification à personne ont été épuisés, et qu’au moins un avis de passage a été déposé dans la boîte aux lettres de l’intéressé.
5.4L’auteure souligne que le tribunal n’a pas agi de la sorte lorsqu’il lui a notifié la mise aux enchères du bien hypothéqué puisque, après deux tentatives infructueuses de notification à personne, un avis a été déposé afin qu’elle en soit informée.
5.5L’auteure fait valoir que les recours qu’elle a formés permettaient au tribunal d’examiner la violation de ses droits fondamentaux au motif de la notification par voie d’affichage et de remédier à cette situation. Elle affirme également que, conformément à la jurisprudence du Tribunal constitutionnel, la demande incidente d’annulation de la décision de mise aux enchères mentionnée par l’État partie ne constitue pas un recours nécessaire et adapté qu’elle devait former avant de pouvoir saisir en amparo le Tribunal constitutionnel.
5.6L’auteure estime que les références de l’État partie à la modification de son ordre juridique en vue de renforcer la protection des débiteurs hypothécaires ne sont pas pertinentes en l’espèce.
6.1Le paragraphe 3 de l’article 8 du Protocole facultatif prévoit que, dans le cadre des règles relatives à l’examen des communications et sur autorisation préalable du Comité, des tiers peuvent fournir des documents pertinents pour l’étude d’un cas. Cette documentation doit être communiquée aux parties intéressées. Le 4 février 2015, le Groupe de travail des communications, agissant au nom du Comité, a autorisé l’organisation non gouvernementale (ONG) International Network for Economic, Social and Cultural Rights à communiquer des documents, conformément à l’article 8 du Protocole et au point 14 du règlement intérieur provisoire du Comité relatif au Protocole facultatif. Le 26 février 2015, le Comité a transmis la contribution de l’International Network for Economic, Social and Cultural Rights du 24 février 2015 à l’État partie et à l’auteure, en leur demandant de lui faire part de leurs observations et commentaires.
6.2L’ONG indique que, en matière de logement, l’État partie connaît une situation générale difficile et préoccupante du fait de la récession économique et du fort taux de chômage et que, entre 2008 et 2010, quelque 400 000 saisies hypothécaires ont été effectuées. Elle indique aussi que la Cour de justice de l’Union européenne a conclu que la loi espagnole offrait une protection « incomplète et insuffisante » aux détenteurs d’hypothèques, en particulier lorsque le bien hypothéqué était le domicile familial. Selon elle, les mesures législatives adoptées par l’État partie, tels le décret-loi royal no 6/2012 et la loi no 4/2013, ne permettent pas de répondre à l’urgence sociale liée aux saisies hypothécaires car le cadre juridique espagnol continue de favoriser les entités financières au détriment des intérêts des personnes touchées.
6.3L’ONG précise que, compte tenu des droits consacrés par le Pacte, une expulsion ne peut être exécutée que dans des circonstances exceptionnelles, après examen de toutes les autres possibilités notamment des autres moyens de s’acquitter de la dette, en consultation avec la ou les personne(s) concernée(s), dans le cadre d’une procédure régulière permettant notamment de former un recours effectif et octroyant un délai de préavis suffisant et raisonnable, et s’il est certain que l’expulsion ne privera pas la personne concernée de logement ou ne l’exposera pas à une violation d’autres droits de l’homme.
6.4L’État partie doit assurer la plus grande sécurité de tenure et notamment prévoir un contrôle judiciaire adapté. En ce sens, l’ONG indique qu’il est indispensable d’assurer un contrôle judiciaire de la procédure de saisie hypothécaire et que les créanciers qui souhaitent recouvrer une créance liée à des titres hypothécaires doivent démontrer à l’autorité judiciaire l’intérêt justifiant la vente du logement d’une personne, compte tenu de toutes les circonstances de chaque cas. L’organe judiciaire doit examiner non seulement la légalité de l’expulsion au regard du droit interne mais également les arguments de fond concernant la proportionnalité et la nécessité de la mesure.
6.5D’après l’ONG, l’État partie doit fournir un préavis suffisant et raisonnable à l’intéressé avant la date d’expulsion prévue. S’agissant de la notification des citations, les tribunaux sud-africains ont reconnu que, lorsque les débiteurs ne s’opposaient pas à des procédures de saisie ou qu’ils négociaient au sujet d’éléments concernant la notification avant l’introduction de l’instance, il convenait de garantir strictement le contrôle judiciaire, et en particulier de s’assurer que la notification de citation avait été dûment effectuée.
7.Par un courrier daté du 12 mars 2015, l’auteure a présenté au Comité ses commentaires sur l’intervention de tiers. Elle maintient que le droit de recevoir une notification avant une expulsion fait partie des garanties judiciaires qui doivent être respectées. Elle réitère que son droit à un recours juridictionnel n’a pas été respecté et que, par conséquent, elle n’a pas pu prendre part à la procédure et défendre comme il convenait son droit au logement auprès des tribunaux en l’absence de notification de la demande de saisie hypothécaire déposée par l’entité créancière et du déclenchement de la procédure par le tribunal.
8.1Le 19 mars 2015, l’État partie a présenté ses observations sur l’intervention de l’ONG. Il maintient que l’auteure a eu accès à tous les recours et qu’elle a bénéficié de toutes les garanties de procédure.
8.2L’État partie affirme que la loi no 1/2013 et le décret-loi royal no 27/2012 visant à protéger les débiteurs hypothécaires contiennent un extraordinaire système de protection qui permet entre autres à l’ancien propriétaire de rester, après l’expulsion, dans son logement pendant deux ans en tant que locataire, et d’obtenir des allocations de logement. De même, il réaffirme que la procédure de saisie hypothécaire régie par le Code de procédure civile respecte scrupuleusement les exigences découlant du droit à un recours juridictionnel effectif.
8.3L’État partie souligne que l’auteure a toujours la jouissance de son logement et que ses droits ne sont pas violés. Par ailleurs, par décision du tribunal du 25 avril 2013, la procédure de saisie hypothécaire a été suspendue afin d’étudier l’éventuel caractère abusif de la clause du contrat de prêt hypothécaire qui fixe les intérêts moratoires, ainsi que le taux de l’intérêt légal.
8.4L’État partie affirme que les notifications relatives à la procédure de saisie hypothécaire ont été réalisées au domicile indiqué par l’auteure, qu’il a été tenté à plusieurs reprises de lui remettre la notification, que, sur l’acte de notification du 28 septembre 2012, la factrice a indiqué qu’« après avoir vérifié que le nom de la débitrice figurait sur la boîte aux lettres, elle était entrée dans l’immeuble, avait sonné à la porte de l’appartement mais n’avait pas obtenu de réponse. Le concierge affirme qu’il travaille ici depuis peu mais que l’intéressée vit bien à cette adresse » et que, par conséquent, on doit en déduire que l’auteure a volontairement refusé de recevoir les notifications concernant la procédure de saisie hypothécaire.
9.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité doit, conformément à l’article 9 de son règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif, déterminer si la communication est recevable. Le Comité n’examinera que les communications répondant aux critères de recevabilité établis dans le Protocole facultatif.
9.2À la lumière des documents mis à sa disposition par les parties en vertu du paragraphe 1 de l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité s’est assuré que la même question n’a pas déjà fait l’objet ni fait l’objet d’un examen dans le cadre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement au niveau international. Par conséquent, le Comité estime qu’il n’existe aucun obstacle à la recevabilité de la présente communication, conformément au paragraphe 2 c) de l’article 3 du Protocole facultatif.
9.3En vertu du paragraphe 2 b) de l’article 3 du Protocole facultatif, le Comité ne peut examiner les violations présumées du Pacte qui portent sur des faits antérieurs à la date d’entrée en vigueur du Protocole facultatif à l’égard de l’État Partie intéressé, à moins que ces faits ne persistent après cette date. En l’espèce, le Comité constate qu’une partie des faits ayant donné lieu aux violations alléguées par l’auteure s’est produite avant le 5 mai 2013, date à laquelle le Protocole facultatif est entré en vigueur pour l’État partie. Cependant, la décision du Tribunal constitutionnel qui a rejeté le recours en amparo de l’auteure a été rendue le 16 octobre 2013. À cette occasion le Tribunal constitutionnel aurait pu examiner les allégations de violation des droits fondamentaux de l’auteure en lien avec la présente communication, étant donné que l’objet de ce recours n’était pas l’examen d’aspects purement formels ou d’erreurs de droit mais bien l’éventuelle violation de droits fondamentaux de l’auteure en lien avec la plainte faisant l’objet de la présente communication. Par conséquent, c’est à cette date-là que se serait produite l’éventuelle violation du droit de l’auteure. De ce fait, le Comité estime qu’il est compétent ratione temporis pour examiner la présente communication.
9.4.Le Comité constate que l’État partie n’a présenté aucune objection quant à l’épuisement des recours internes mentionné au paragraphe 1 de l’article 3 du Protocole facultatif. Bien que l’État partie ait indiqué au Comité que, par la suite, l’auteure avait déposé une requête au tribunal, conformément au paragraphe 3 de l’article 695 du Code de procédure civile, qui a permis de suspendre la saisie hypothécaire tandis qu’était analysée la nature éventuellement abusive d’une clause du contrat de prêt, il n’a en revanche jamais demandé que la communication soit déclarée irrecevable au motif d’un éventuel épuisement des recours internes.
9.5Le Comité considère que si un État partie souhaite faire valoir ce motif d’irrecevabilité, il doit le faire dès le début, de manière claire et en indiquant précisément les recours − suffisants et effectifs − qui auraient dû être épuisés, ce qui n’est pas le cas ici. Le Comité comprend donc que, en ce qui concerne les allégations de l’auteure, les recours prévus par la juridiction interne ont été épuisés après la décision du Tribunal constitutionnel du 5 mai 2013.
9.6L’auteure a présenté la communication au Comité le 28 janvier 2014, dans les délais prévus au paragraphe 2 a) de l’article 3 du Protocole facultatif.
9.7Le Comité considère que la communication remplit les critères de recevabilité énoncés à l’article 3, en particulier au paragraphe 2 e), du Protocole facultatif. Il s’agit d’une communication qui pose la question d’une éventuelle violation du droit de l’auteure à un logement, du fait d’une notification de la procédure de saisie hypothécaire qui n’aurait pas été correctement réalisée, ce qui l’aurait empêchée de se défendre comme il convenait. Le Comité estime que la communication est suffisamment étayée pour être examinée quant au fond.
10.1Le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toute la documentation qui lui a été soumise, conformément à l’article 8 du Protocole facultatif.
10.2L’auteure fait valoir que, suite au non-paiement de plusieurs échéances de remboursement de l’emprunt hypothécaire contracté sur son logement habituel, en 2012, l’entité créancière a engagé une procédure de saisie hypothécaire à son encontre dont elle n’a pas été dûment notifiée. Elle n’a donc pris connaissance de cette procédure qu’une fois la mise aux enchères de son logement ordonnée. De ce fait, elle estime que, dans la pratique, elle n’a pas pu exercer un recours juridictionnel effectif en temps utile, ce qui l’a empêchée de donner juridiquement suite à la demande de saisie hypothécaire et de faire valoir son droit au logement devant les tribunaux, et qui l’a jusqu’à présent privée de moyens de défense et plongée dans l’incertitude et l’angoisse.
10.3L’État partie fait valoir que l’auteure, dans son recours en rétractation, a mentionné un autre domicile familial, laissant entendre que le logement en question ne serait pas son logement habituel, que le tribunal a procédé à la notification du déclenchement de la procédure de saisie hypothécaire conformément à la loi au domicile indiqué par l’auteure dans les documents du prêt, que ce n’est qu’après plusieurs tentatives infructueuses de notification à personne que le tribunal a ordonné la notification par voie d’affichage, conformément au paragraphe 3 de l’article 686 du Code de procédure civile et que ce mode de notification est conforme aux exigences du droit à un recours juridictionnel effectif. En outre, l’État partie soutient que, lors des formalités de notification du 28 septembre 2012, l’auteure a volontairement refusé de recevoir la notification de la demande de saisie hypothécaire et de déclenchement de la procédure par le tribunal (voir par. 8.4 supra). Enfin, l’État partie a indiqué au Comité qu’il n’avait été procédé à aucune expulsion, saisie ou mise aux enchères du logement hypothéqué puisque l’auteure avait présenté un recours ordinaire suspensif, qu’elle vivait donc toujours dans le logement en question et que ses droits n’avaient pas été violés.
10.4S’agissant de la nature du logement hypothéqué objet de la présente communication, le Comité prend note des explications de l’auteure selon lesquelles lorsqu’elle a fait mention d’un autre logement familial durant la procédure de saisie hypothécaire, elle se référait au logement d’un membre de sa famille (voir par. 5.1), elle vit dans le logement en question et elle n’est propriétaire d’aucun autre logement. Les pièces fournies par l’auteure (voit note de bas de page 7, supra), qui n’ont pas été contestées par l’État partie, corrobore ses allégations. Aucune pièce fournie au Comité n’indique que le logement en question n’était pas le domicile habituel de l’auteure ou qu’elle était propriétaire d’un autre logement. Par conséquent, à la lumière des pièces du dossier et des renseignements communiqués par les parties, le Comité estime qu’il s’agit bien du logement habituel de l’auteure.
10.5En ce qui concerne l’absence de l’auteure le 28 septembre 2012, date de la notification de la demande de l’entité créancière et de l’avis de déclenchement de la procédure de saisie du tribunal, le Comité observe que ni la copie de l’avis de passage du Service commun des notifications et des saisies de Madrid en date du 28 septembre 2012, fournie par l’auteure, ni aucun autre document n’indique que l’auteur était présente à son logement habituel et qu’elle a refusé de recevoir la notification du tribunal (voir par. 2.4, et notes de bas de page 3 et 18 supra).
10.6Le Comité ayant examiné les faits de l’espèce, il est d’avis que le problème juridique fondamental posé par la présente communication est de savoir si le droit au logement de l’auteure, défini au paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte, a été violé par l’État partie à l’issue d’une procédure de saisie dans laquelle l’auteure, selon ses dires, n’a pas été notifiée de la demande, ce qui l’a empêché de défendre les droits qu’elle tient du Pacte. Pour répondre à cette question, le Comité commencera par rappeler certains éléments du droit au logement, en particulier ceux qui concernent la protection juridique de ce droit, avant d’examiner les faits.
11.1Le droit de l’homme à un logement suffisant est d’une importance capitale pour la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels et est intégralement lié à d’autres droits de l’homme, y compris ceux énoncés dans le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le droit au logement devrait être assuré à tous sans distinction de revenus ou de toutes autres ressources économiques et les États parties devraient prendre toutes les mesures nécessaires pour en garantir la pleine réalisation. Un grand nombre d’éléments constitutifs du droit à un logement suffisant sont étroitement liés à l’existence de recours internes assurant la jouissance effective de ce droit.
11.2Le Comité rappelle également que chaque personne a droit à un certain degré de sécurité qui garantit la protection légale contre l’expulsion, le harcèlement ou autres menaces et que les évictions forcées sont prima facie contraires aux dispositions du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, et ne peuvent être justifiées que dans les situations les plus exceptionnelles et conformément aux principes applicables du droit international.. De l’avis du Comité, les États parties doivent veiller à ce que les procédures appliquées dans les cas d’expulsion forcée ou les procédures pouvant toucher la sécurité de tenure et éventuellement aboutir à une expulsion respectent les garanties en la matière, notamment la possibilité de consulter véritablement les intéressés et un délai de préavis suffisant et raisonnable à toutes les personnes visées par une expulsion avant la date d’expulsion prévue.
11.3Le Comité rappelle en outre que l’article 2 du Pacte définit plusieurs obligations à effet immédiat. Par conséquent, conformément au paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, les États parties doivent adopter des mesures visant à assurer l’exercice des droits reconnus dans le Pacte « par tous les moyens appropriés, y compris en particulier l’adoption de mesures législatives ». Cela comprend notamment l’adoption de mesures qui garantissent l’accès à des recours judiciaires effectifs pour la protection des droits reconnus par le Pacte étant donné que, comme le Comité l’a noté dans son observation générale no 9, il ne peut y avoir de droit sans moyen de recours permettant de le protéger.
11.4 Par conséquent, en vertu de l’obligation énoncée au paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, les États parties doivent garantir que les personnes dont le droit à un logement suffisant pourrait être touché, par exemple, par des expulsions forcées ou des saisies hypothécaires, disposent d’un recours effectif et adéquat.
12.1Le Comité rappelle que, conformément à son observation générale no 7, la protection appropriée en matière de procédure et le respect de la légalité sont des aspects essentiels de tous les droits de l’homme mais qui sont particulièrement importants s’agissant d’une question comme celle des expulsions forcées, et que ces garanties de procédure sont notamment le fait pour l’État partie de prévoir un délai de préavis suffisant et raisonnable à toutes les personnes concernées avant la date d’expulsion prévue et de fournir à ces personnes un accès aux recours prévus par la loi afin qu’elles puissent se défendre. Le Comité estime que cette protection est également valable et appropriée dans des situations analogues, comme les procédures de saisie hypothécaire dans lesquelles le droit au logement peut être gravement altéré.
12.2Le Comité estime que, pour s’acquitter des obligations évoquées plus haut, les autorités doivent prendre toutes les mesures et initiatives raisonnables pour veiller à ce que les formalités de notification des décisions et actes liés à une procédure administrative ou judiciaire soient dûment et efficacement effectuées afin que les personnes concernées puissent prendre part à la procédure et défendre leurs droits.
12.3La notification par voie d’affichage peut constituer un moyen approprié de notification d’une décision de justice conforme au droit à un recours effectif; le Comité estime toutefois que son utilisation dans des cas susceptibles de donner lieu à une possible violation des droits de l'homme tel le droit à un logement convenable, cas devant faire l’objet d’un contrôle judiciaire, doit être une mesure de dernier recours, surtout en ce qui concerne les décisions qui aboutissent au déclenchement de la procédure. Son utilisation doit être strictement limitée où tous les moyens de notification à personne ont été épuisés, en garantissant une publicité et un préavis suffisants afin que la personne concernée puisse prendre réellement connaissance du déclenchement de la procédure et comparaître en personne.
12.4Par conséquent, une notification indue d’une demande de saisie hypothécaire empêche l’intéressé de défendre son droit au cours de la procédure et entraîne une violation du droit au logement. Le Comité procède donc à l’analyse de la notification du cas à l’examen afin de déterminer si elle a été réalisée dans des conditions acceptables ou non.
13.1Lorsque le Comité examine une communication, il ne lui incombe pas de vérifier si les procédures judiciaires et administratives internes ont été menées dans le respect du droit interne. Sa tâche se limite à examiner si les faits établis de la communication constituent une violation par l’État partie des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte. Le Comité estime donc qu’il appartient en premier lieu aux juridictions des États parties d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans une affaire donnée, ou la manière dont la législation interne a été appliquée, à moins qu’il ne soit établi que cette appréciation, ou cette application, a été clairement arbitraire ou a constitué un déni de justice, ce qui impliquerait la violation d’un droit reconnu dans le Pacte.
13.2D’après les pièces de procédure, le 21 juin 2012, le tribunal a autorisé la procédure de saisie hypothécaire du logement de l’auteure. Celle-ci n’a cependant pris connaissance de cette procédure que le 4 avril 2013 lorsqu’elle a retiré l’avis de mise aux enchères de son logement et n’a donc pas pu se défendre pendant la procédure de saisie. En septembre et en octobre 2012, il a été procédé à quatre reprises à la notification de la décision du tribunal autorisant la procédure, sans succès, puisque l’auteure ne se trouvait pas chez elle, à l’adresse qu’elle-même avait communiquée en tant que domicile. L’agent notificateur a confirmé qu’il y avait une boîte aux lettres à son nom dans cet immeuble et que, à deux reprises au moins, le concierge de l’immeuble était présent, faits qui ont été consignés dans les actes du Service commun des notifications et des saisies de Madrid (voir note de bas de page 3 supra) et qui, par conséquent, étaient ou devaient être connus du tribunal. Le 30 octobre 2012, le tribunal a décidé qu’un avis serait apposé sur le panneau d’affichage des annonces légales du tribunal aux fins de notification, notification dont l’auteure n’a pas eu connaissance en temps utile.
13.3Dans le cas présent, le Comité prend note des efforts répétés du tribunal pour notifier directement à l’auteure l’avis de saisie et le déclenchement de la procédure. Il estime néanmoins que l’État partie n’a pas démontré que le tribunal avait épuisé tous les moyens disponibles pour procéder à une notification à personne, par exemple en expliquant pourquoi aucune note ni avis n’avait été laissé dans la boîte aux lettres ou pourquoi aucun autre moyen de notification prévu par le Code de procédure civile, comme le fait de confier l’avis au concierge ou au voisin présent le plus proche, n’avait été employé, puisqu’il se contente d’indiquer qu’après plusieurs tentatives infructueuses, il avait été décidé de procéder à une notification par voie d’affichage, comme la loi le prévoit. L’État partie n’a apporté aucun élément solide étayant son affirmation selon laquelle l’auteure se serait même cachée une fois pour ne pas recevoir la notification. Par conséquent, le Comité considère que, même si l’on estimait que la notification par voie d’affichage avait été réalisée conformément au Code de procédure civile, cette notification de la demande de saisie hypothécaire doit être appropriée et conforme aux normes du Pacte applicables au droit au logement, comme indiqué aux paragraphes 11.1 et 12.4 plus haut, ces normes n’ayant pas été respectées en l’espèce. La notification n’a donc pas été réalisée dans des conditions acceptables.
13.4Cette grave irrégularité quant à la notification pourrait ne pas entraîner de violation du droit au logement si elle n’avait pas de conséquences majeures sur le droit de l’auteure de défendre la jouissance effective de son logement, par exemple au moyen d’une autre procédure adaptée pour faire valoir son droit et ses intérêts. Cela semble être la position de l’État partie lorsqu’il laisse entendre, sans étayer ce point de vue, que l’incapacité de l’auteure de se manifester dans le cadre de la procédure de saisie n’a pas de conséquences graves puisque, quoi qu’il en soit, les possibilités de défense du débiteur dans ces procédures sont juridiquement très limitées alors qu’il peut saisir une juridiction ordinaire pour contester, sans limitations, le remboursement du prêt hypothécaire. Il rappelle que l’auteure a introduit un recours en vertu du paragraphe 3 de l’article 695 du Code de procédure civile demandant l’annulation de certaines clauses du contrat de prêt hypothécaire, recours qui a eu un effet suspensif sur la saisie et la vente aux enchères de son logement puisque, suite à un récent arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne, ces recours ordinaires permettent même de suspendre la saisie et la vente aux enchères du bien hypothéqué.
13.5Du fait de la spécificité du problème de la notification indue posé par l’auteure, il n’incombe pas au Comité, dans le cadre de la présente communication, d’examiner de manière générale si les normes internes de l’État partie régissant les procédures de saisie et, en fin de compte, de vente aux enchères des biens hypothéqués, qui peuvent être des logements, respectent ou non le droit au logement. Par conséquent, dans le cas d’espèce, le Comité se borne à examiner si la notification indue de l’auteure, qui a déjà été constatée, a vraiment eu ou non des incidences sur le droit de l’auteure de se défendre au point d’impliquer une violation du droit au logement.
13.6D’après le Code de procédure civile en vigueur au moment des faits, dans une procédure de saisie, le débiteur ne peut s’opposer à la mise aux enchères que pour certains motifs très circonscrits, par exemple l’extinction de la garantie hypothécaire ou de l’obligation. Au cours de cette procédure, il ne peut contester, par exemple, des clauses abusives. En revanche, la procédure ordinaire permet au débiteur de contester de manière large et ouverte les conditions du crédit. On pourrait donc avancer que la non-comparution au cours de la procédure de saisie n’est pas particulièrement grave puisque le débiteur disposerait dans tous les cas de la procédure ordinaire pour défendre ses droits. Cependant, pour étayer cette thèse, il faudrait que la procédure ordinaire permette de suspendre la procédure de saisie et la vente aux enchères du logement car, dans le cas contraire, la défense ne suffirait pas à garantir le droit au logement puisque l’intéressé ne pourrait pas empêcher la vente aux enchères de son logement mais uniquement obtenir ultérieurement une indemnisation ou la restitution du bien, le cas échéant. Le Comité constate que la notification indue de l’auteure s’est produite le 30 octobre 2012, lorsque le tribunal a affiché l’avis correspondant. La décision de la Cour de justice de l’Union européenne mentionnée par l’État partie est probablement l’arrêt C-415/11 dans l’affaire Mohamed Aziz c. Catalunya Caixa, rendu le 14 mars 2013, plusieurs mois après cette notification indue. Cependant, comme l’indique cet arrêt de la Cour, il est évident que, jusqu’à ce moment-là, les procédures déclaratives ordinaires ne permettaient pas de suspendre la procédure de saisie hypothécaire. L’auteure a donc été privée de la possibilité de se défendre durant la procédure de saisie pour éviter, en fin de compte, la vente aux enchères sans que, lorsque cette notification indue s’est produite, la procédure ordinaire puisse être considérée comme une éventuelle alternative adaptée puisqu’elle ne permettait pas de suspendre la procédure de saisie.
13.7Par conséquent, le Comité estime que cette notification indue a constitué à ce moment-là une violation du droit au logement à laquelle l’État partie n’a pas remédié par la suite puisque l’auteure n’a pas obtenu gain de cause suite au recours en rétractation contre la décision de mise aux enchères et au recours en amparo auprès du Tribunal constitutionnel qu’elle a formés.
14.Compte tenu de tous les renseignements fournis, le Comité estime que les faits dont il est saisi révèlent que le tribunal n'a pas pris toutes les mesures raisonnables pour notifier correctement à l’auteure la demande de saisie hypothécaire présentée par l’entité créancière (voir par. 13.3 supra) afin de s’assurer que l'auteure était bien informée du déclenchement de la procédure; et, par conséquent, que le tribunal a empêché l'auteure de défendre dans de bonnes conditions son droit au logement devant un tribunal.
15.Le Comité, agissant en vertu du paragraphe 1 de l’article 9 du Protocole facultatif, constate qu’en manquant à son obligation de fournir à l’auteure un recours effectif, l’État partie a violé les droits que celle-ci tient du paragraphe 1 de l’article 11 du Pacte, lu conjointement avec le paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte. À la lumière des présentes constatations, le Comité adresse les recommandations ci-après à l’État partie.
16.L’État partie est tenu d’assurer à l’auteure une réparation utile, en particulier : a) de veiller à ce que la mise aux enchères de son logement ne se fasse pas sans qu’elle bénéficie de la protection appropriée en matière de procédure et d’une procédure respectant la légalité, conformément aux dispositions du Pacte et compte tenu des observations générales nos 4 et 7 du Comité; et b) de rembourser à l’auteure les frais de justice liés à la présente communication.
17.Le Comité considère que, en principe, les réparations recommandées dans le contexte de communications individuelles peuvent inclure des garanties de non‑répétition et rappelle que l'État partie est tenu d’empêcher que des violations analogues ne se reproduisent. Prenant note des mesures prises par l'État partie, y compris le décret-loi royal no 27/2012 et la loi no 1/2013, comme suite à l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne du 14 mars 2013, le Comité estime que l'État partie doit s’assurer que sa législation et sa mise en œuvre sont conformes aux obligations définies dans le Pacte. En particulier, l’État est tenu :
a)D’assurer l’accès aux recours juridiques aux personnes concernées par des procédures de saisie hypothécaire pour non-remboursement d’emprunt;
b)D’adopter des mesures législatives et/ou administratives appropriées afin de veiller à ce que, dans les procédures de saisie hypothécaire, la notification par voie d’affichage soit strictement limitée aux cas où tous les moyens possibles de remettre une notification à personne ont été utilisés, en garantissant une publicité et un préavis suffisants afin que la personne concernée puisse prendre dûment connaissance du déclenchement de la procédure et comparaître en personne;
c)D’adopter des mesures législatives appropriées pour garantir que la procédure de saisie hypothécaire et les règles de procédure établissent des conditions (voir par. 12.1 à 12.4, 13.3 et 13.4 supra) et procédures appropriées à suivre avant qu’il ne soit procédé à la mise aux enchères d’un logement ou à une expulsion, conformément au Pacte et compte tenu de l’observation générale no 7 du Comité.
18.Conformément au paragraphe 2 de l’article 9 du Protocole facultatif et du paragraphe 1 de l’article 18 du règlement intérieur provisoire relatif au Protocole facultatif, l’État partie doit adresser au Comité, dans un délai de six mois, des renseignements écrits sur les mesures prises pour donner effet aux présentes constatations et recommandations du Comité. L’État partie est invité en outre à rendre celles-ci publiques et à les diffuser largement, sur des supports accessibles, afin que tous les groupes de la population en prennent connaissance.
ARTICLE 9
P résentée par : |
Miguel Ángel López Rodríguez (représenté par un avocat, Valentín J. Aguílar Villuendas, de l’Association Pro Derechos Humanos d’Andalousie) |
Au nom de : |
L’auteur |
État partie : |
Espagne |
Date de la communication : |
6 novembre 2013, transmise à l’État partie le 6 décembre 2013 |
Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, institué en vertu de la résolution no 1985/17 du Conseil économique et social,
Réuni le 4 mars 2016,
Ayant achevé l’examen de la communication no 1/2013 présentée en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels,
Adopte ce qui suit :
1.1L’auteur de la communication est Miguel Ángel López Rodríguez, majeur, de nationalité espagnole. Il se déclare victime d’une violation par l’État partie des droits qu’il tient des articles 2 et 9 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (le Pacte). L’auteur est représenté par un conseil.
1.2Le 6 décembre 2013, le Comité a décidé que la recevabilité de la communication serait examinée séparément du fond.
1.3Dans les présentes constatations, le Comité résume d’abord les renseignements et les arguments exposés par les parties. Il examine ensuite les questions de recevabilité et de fond qui se posent dans la communication puis formule des conclusions et des recommandations.
2.1Au moment de la présentation de la communication, l’auteur était incarcéré au centre pénitentiaire de Séville depuis mars 2003. À une date antérieure, la Délégation provinciale de Cordoue du Conseil pour l’égalité et la protection sociale de la Junte d’Andalousie (le Conseil) lui avait accordé une prestation (pension) d’invalidité non contributive d’un montant de 301,55 euros par mois. Par décision du 23 mars 2006, le Conseil a réduit ce montant à 147,71 euros par mois, estimant que, pour fixer la pension, le montant des dépenses liées à la subsistance de l’auteur au centre pénitentiaire, soit 2 062,25 euros annuels, devait être comptabilisé dans les revenus ou les ressources de l’auteur.
2.2Le 1er octobre 2006, l’auteur a déposé une plainte administrative contestant la réduction de sa pension, qui a été rejetée le 11 octobre 2006. Le 27 novembre 2006, l’auteur a fait appel de la décision du Conseil devant le tribunal des affaires de sécurité sociale no 4 de Cordoue en demandant le rétablissement de l’intégralité de sa pension et le recouvrement des montants non versés depuis que la réduction avait été décidée. Il contestait le fait que les dépenses nécessaires à sa subsistance au centre pénitentiaire soient considérées comme des revenus personnels pour calculer ses ressources et déterminer le montant de sa pension d’invalidité non contributive.
2.3Le 17 mars 2008, le tribunal des affaires de sécurité sociale a estimé que le recours de l’auteur était partiellement fondé, a annulé la décision du Conseil du 23 mars 2006, et a ordonné le rétablissement du montant de 301,55 euros ainsi que le recouvrement des sommes non versées à l’auteur depuis que sa pension avait été réduite. Le tribunal a indiqué que la jurisprudence faisait défaut en la matière dans la mesure où le Tribunal suprême s’était prononcé sur le sujet à deux reprises seulement et de façon contradictoire. Le jugement renvoie à deux arrêts du Tribunal suprême : l’un en date du 14 décembre 1999, dans lequel le Tribunal suprême concluait que même si les coûts d’entretien d’un détenu étaient comptabilisés, celui-ci conservait le droit de percevoir la pension non contributive dans son intégralité, et l’autre en date du 20 décembre 2000, dans lequel il adoptait une position contraire. Le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale disposait que le montant correspondant aux dépenses de logement et d’alimentation du détenu au centre pénitentiaire ne constituait pas un revenu du capital ou du travail, dans la mesure où il ne provenait pas d’une activité indépendante ou salariée. Il ne faisait pas non plus partie des prestations reconnues par les divers régimes de prévoyance sociale, car le service fourni par l’administration pénitentiaire ne constituait pas un service public, mais une obligation qui incombait à l’administration en raison de la privation de liberté du détenu. Le Conseil a fait appel du jugement devant le tribunal supérieur de justice d’Andalousie.
2.4Le 10 juin 2009, le tribunal supérieur de justice d’Andalousie a annulé la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale et débouté l’auteur de sa demande. Le tribunal supérieur a indiqué que l’arrêt du Tribunal suprême du 20 décembre 2000 avait été confirmé par un autre arrêt en date du 30 janvier 2008, qui disposait que le montant des frais d’entretien des personnes incarcérées dans des établissements pénitentiaires devait être comptabilisé dans les « éléments matériels et droits […] liés à une prestation » visés à l’article 144.5 de la loi sur la sécurité sociale aux fins de déterminer les revenus et les ressources du bénéficiaire. Il était donc possible de déduire les dépenses d’entretien en prison du montant dû au titre d’une pension d’invalidité non contributive. L’auteur s’est pourvu en cassation aux fins d’unification de la jurisprudence auprès du Tribunal suprême, en invoquant comme précédent un jugement du tribunal supérieur de justice de Castille-et-León en date du 29 novembre 2007.
2.5Le 27 mai 2010, le Parquet général près le Tribunal suprême a estimé que le pourvoi en cassation était recevable, dans la mesure où la pension d’invalidité non contributive était un droit des bénéficiaires, qui était soumis aux mêmes conditions que le reste des prestations du système, les seuls critères requis étant la résidence en Espagne, l’insuffisance des ressources et le degré d’invalidité établi. En outre, les frais d’entretien d’une personne incarcérée ne pouvaient pas être assimilés à un revenu remplaçant celui d’un travail ni à une prestation complémentaire financée par des ressources publiques ou privées, au sens de l’article 12.2 du décret royal no 357/1991, dans la mesure où ils ne correspondaient pas à une activité volontaire du bénéficiaire, mais constituaient une obligation incombant à l’administration pénitentiaire du fait de la privation de liberté du détenu, ainsi que le prévoyait l’article 21.2 de la loi pénitentiaire.
2.6Le 29 septembre 2010, le Tribunal suprême a rejeté le pourvoi en cassation aux fins d’unification de la jurisprudence au motif que la jurisprudence en la matière avait déjà été unifiée par ses arrêts du 20 décembre 2000 et du 15 juillet 2008. Il a estimé que la finalité des prestations non contributives était de garantir des prestations minimum aux personnes démunies, et n’avaient plus lieu d’être s’il était pourvu aux besoins de subsistance des intéressés par d’autres moyens. Par ailleurs, il a indiqué qu’une réduction éventuelle du montant de la pension non contributive d’invalidité n’avait pas d’incidence négative sur les obligations familiales du bénéficiaire, dans la mesure où ces obligations sont traitées par une autre voie. En outre, les frais d’entretien des détenus pouvaient être assimilés à une prestation d’aide sociale. À cet égard, le Tribunal suprême a indiqué que bien qu’il ne s’agisse pas d’une prestation de la sécurité sociale, l’article 144.5 de la loi sur la sécurité sociale n’imposait pas que ce soit le cas puisqu’il visait les « éléments matériels et droits […] liés à une prestation d’aide sociale » d’une manière générale. Une interprétation contraire avantagerait les détenus par rapport à d’autres bénéficiaires ou demandeurs, dont tous les revenus sont pris en considération pour déterminer le plafond des prestations auxquelles ils ont droit.
2.7Le 9 décembre 2010, l’auteur a présenté un recours en amparo devant le Tribunal constitutionnel, en invoquant une violation des droits qu’il tenait des articles 14 (égalité devant la loi), 24.1 (droit à une protection effective) et 25.2 (droit des personnes privées de liberté aux prestations prévues par le régime de sécurité sociale) de la Constitution. En particulier, l’auteur a indiqué qu’il était porté atteinte à son droit à l’égalité devant la loi par rapport à d’autres personnes dans une situation analogue à la sienne qui se trouvaient dans d’autres communautés autonomes de l’État partie, ainsi que par rapport aux détenus non bénéficiaires de prestations non contributives et aux personnes en liberté qui peuvent bénéficier de repas dans des établissements analogues tels que les hôpitaux ou les cantines populaires sans que leurs prestations soient réduites.
2.8Le 29 octobre 2012, le Tribunal constitutionnel a débouté l’auteur de sa demande et indiqué que ses allégations de traitement discriminatoire étaient générales et insuffisantes et n’étaient pas étayées par des éléments de preuve.
3.1L’auteur affirme que les faits exposés font apparaître une violation des droits qu’il tient des articles 2 et 9 du Pacte.
3.2L’auteur fait valoir que l’État partie a porté atteinte à son droit à la sécurité sociale et à l’exercice de ce droit sans discrimination et dans des conditions d’égalité, étant donné que la mesure prise par le Conseil instaure une inégalité de traitement par rapport aux autres détenus, y compris ceux qui sont autonomes sur le plan économique, reçoivent d’autres prestations ou n’en reçoivent aucune mais ne supportent pas les frais nécessaires à leur subsistance ; par rapport aux détenus incarcérés dans d’autres communautés autonomes qui ne se voient pas appliquer de réductions de leurs prestations d’invalidé non contributives, car comme cela a été constaté lors des procédures judiciaires, au moins une communauté aurait modifié et appliqué un critère distinct pour la détermination du montant en considérant que les frais d’entretien en prison ne constituaient pas une prestation d’aide sociale ; et par rapport aux personnes libres qui fréquentent d’autres services publics comme les hôpitaux, les centres d’accueil ou les cantines sociales où ils reçoivent des repas gratuits sans pour autant que leurs prestations de sécurité sociale soient réduites.
3.3L’auteur fait valoir que les autorités n’ont pas pris en considération la Constitution de l’État partie, qui prévoit que les personnes privées de liberté jouissent de tous les droits fondamentaux, ni l’article 3 de la loi pénitentiaire, en vertu duquel les mesures voulues doivent être adoptées pour que les détenus et leur famille conservent les droits aux prestations de la sécurité sociale acquis avant l’incarcération.
3.4L’auteur affirme avoir épuisé tous les recours internes. Bien que les faits ayant porté atteinte à ses droits se soient produits avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif, la violation en question persistait au moment où la communication a été présentée au Comité.
4.1Le 28 février 2014, l’État partie a présenté ses observations sur la recevabilité et demandé que la communication soit déclarée irrecevable conformément à l’alinéa a)du paragraphe2 de l’article 3 du Protocole facultatif.
4.2L’auteur a présenté sa communication plus d’un an après l’épuisement des recours internes, le jugement du Tribunal constitutionnel ayant été publié le 29 octobre 2012. Les jugements du Tribunal constitutionnel qui tranchent les recours en amparo ne sont pas seulement notifiés aux parties ; ils sont également publiés au Journal officiel afin que le public en ait connaissance. Dans le cas de l’auteur, le jugement a été publié au Journal officiel le 28 novembre 2012. Le délai imparti pour la saisine d’une instance internationale doit être décompté non pas à partir de la date de publication au Journal officiel mais à partir de la date à laquelle le jugement est communiqué officiellement à l’intéressé, qui est alors réputé avoir pris connaissance de la décision finale rendue dans l’affaire qui le concerne.
4.3Comme l’a conclu le Tribunal constitutionnel, l’application des règles nationales en matière de sécurité sociale n’a pas porté atteinte aux droits garantis à l’auteur par les articles 2 et 9 du Pacte. Dans son jugement du 29 octobre 2012, le Tribunal constitutionnel a pris note de l’interprétation du Tribunal suprême selon laquelle la prestation alimentaire perçue par une personne en détention est assimilable à une prestation de service public et comptabilisée comme revenu aux fins de la détermination du droit à la pension d’invalidité non contributive.
4.4L’auteur n’a pas été défavorisé par rapport à d’autres bénéficiaires du même type de prestations exécutant une peine d’emprisonnement. Les mêmes règles s’appliquent de la même façon sur l’ensemble du territoire de l’État partie à tous les condamnés bénéficiaires d’une pension non contributive de la sécurité sociale.
5.1Le 20 mars 2014, l’auteur a répondu aux observations de l’État partie sur la recevabilité.
5.2En ce qui concerne la condition prévue à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, l’auteur fait valoir qu’aux termes de l’article 164.1 de la Constitution de l’État partie, « les jugements rendus par le Tribunal constitutionnel sont publiés au Journal officiel accompagnés, le cas échéant, des opinions individuelles s’y rapportant. Ils ont l’autorité de la chose jugée à partir du lendemain de leur publication ». Sans cette formalité indispensable, le jugement est sans effet juridique et ne peut pas faire l’objet d’un recours.
5.3 Par ailleurs, l’auteur indique que le jugement lui a été communiqué le 6 novembre 2012 et non, comme l’a affirmé l’État partie, le 29 octobre 2012. Il ajoute que, conformément à la réglementation nationale, les délais mensuels ou annuels commencent à courir le lendemain du jour où intervient la notification. En tout état de cause, s’agissant d’une personne privée de liberté, il convient d’opter pour une interprétation souple qui tienne compte de sa situation exceptionnelle.
6.1Le 22 mai 2015, l’État partie a présenté ses observations sur le fond de la communication. Il considère qu’aucune violation du droit à la sécurité sociale ne s’est produite, et qu’il n’y a pas eu d’application discriminatoire de la loi.
6.2L’article 41 de la Constitution de l’État partie dispose que les pouvoirs publics assurent à tous les citoyens un régime public de sécurité sociale, qui garantit une assistance et des prestations sociales suffisantes pour faire face aux situations de nécessité, spécialement en cas de chômage. La loi générale sur la sécurité sociale prévoit, dans ce cadre, parmi les critères à remplir pour bénéficier des prestations non contributives, l’absence de revenus suffisants. L’article 145.2 de la loi énonce ainsi : « [l]es montants de la prestation non contributive sont compatibles avec les ressources ou les revenus annuels dont dispose individuellement chaque bénéficiaire, pour autant que ceux-ci n’excèdent pas 35 % du montant annuel de la prestation non contributive ». Par ailleurs, le paragraphe 5 de l’article 144 dispose : « seront considérés comme des ressources ou des revenus à comptabiliser les éléments matériels et les droits de toute nature, qu’ils proviennent du travail ou du capital, ou qu’ils soit liés à une prestation ». Par ailleurs, le décret royal no 3765/1991 dispose que l’on assimilera à des revenus de remplacement des revenus du travail toute autre prestation complémentaire de ces revenus à la charge de fonds publics ou privés, et que l’on prendra en considération les revenus et les ressources de toute nature dont le demandeur est en droit de bénéficier ou de disposer.
6.3La limite prévue au paragraphe 2 de l’article 145 de la loi générale sur la sécurité sociale a été librement appréciée par le législateur, après évaluation des divers intérêts économiques et de l’ensemble des droits protégés par la loi. Cette règle a pour objet d’établir des motifs d’incompatibilité raisonnables et logiques d’après lesquels une prestation publique et son montant effectif ne peuvent être perçus compte tenu des ressources ou des revenus annuels du bénéficiaire, à plus forte raison si elle est financée au moyen du budget de l’État, sans cotisation préalable du bénéficiaire.
6.4La prestation d’invalidité non contributive a été accordée à l’auteur de manière égalitaire et sans discrimination aucune par rapport à toute autre personne se trouvant dans la même situation, c’est-à-dire les autres bénéficiaires de la même catégorie de prestations qui feraient l’objet d’une privation de liberté à la suite d’une condamnation et relèveraient ainsi du régime pénitentiaire. Par son jugement du 29 septembre 2010, le Tribunal suprême a estimé que les autorités administratives avaient correctement appliqué les articles 144 et 145 de la loi générale sur la sécurité sociale au cas de l’auteur et que ce dernier n’avait subi aucun traitement différent de celui appliqué à toute personne se trouvant dans la même situation. Par la suite, le Tribunal constitutionnel a considéré, dans son jugement relatif au recours en amparo de l’auteur, qu’il n’était pas porté atteinte aux droits fondamentaux de l’auteur reconnus dans la Constitution et qu’il n’était pas privé des avantages du régime de sécurité sociale, en particulier de la prestation d’invalidité non contributive. Le Tribunal a aussi constaté que l’auteur n’avait pas reconnu au cours du procès le fait que dans d’autres cas où le bénéficiaire d’une prestation non contributive est aidé par des prestations publiques qui répondent à ses besoins fondamentaux, la situation n’est pas prise en considération aux fins du calcul de la pension non contributive reconnue.
6.5L’État partie soutient que toute personne exécutant une condamnation pénale privative de liberté dans un établissement pénitentiaire bénéficie gratuitement de son entretien à la charge de l’État, à titre de droit subjectif reconnu par la loi. Conformément aux articles 3 et 21 de la loi organique no 1/1979 du 26 septembre 1979 (loi organique générale pénitentiaire), l’administration publique est tenue de veiller à la vie, à l’intégrité et à la santé des détenus, y compris à leur entretien. Il s’agit d’un droit pour le détenu, quelle que soit sa situation personnelle ou patrimoniale. Ces règles n’empêchent pas cependant que, du point de vue de la sécurité sociale, le montant des frais d’entretien soit considéré comme déductible pour fixer le montant d’une autre catégorie de prestations publiques, telle la prestation d’incapacité non contributive. Ainsi, en cas de dépassement de la limite de ressources ou de revenus annuels en vigueur, l’excédent peut être déduit dans une proportion raisonnable compte tenu de la catégorie de prestations considérée.
6.6L’octroi d’une prestation non contributive de la sécurité sociale se fonde sur la reconnaissance d’une situation réelle et objective de nécessité et de précarité du bénéficiaire. Seule la situation personnelle est prise en considération, il n’existe aucune condition liée à l’existence d’apports préalables du bénéficiaire (versements de contrepartie, épargne ou montant des cotisations préalables au régime). Puisqu’il s’agit d’une prestation publique financée par les fonds publics – et donc, par l’effort économique générale du pays – il s’ensuit logiquement que la perception en est réglementée aux termes des articles 144 et suivants de la loi générale sur la sécurité sociale par un régime d’incompatibilités et de déductions. C’est la raison pour laquelle, si le bénéficiaire perçoit en même temps un autre type de prestations publiques à la charge de l’État, sans contrepartie, ni cotisations préalables, une déduction doit être opérée pour en tenir compte.
6.7Lorsqu’une personne perçoit une prestation et se trouve privée de liberté, la prestation correspondant à l’entretien du détenu dans l’établissement pénitentiaire est maintenue, tout en réduisant le montant de l’autre prestation, comme c’est le cas en l’espèce. L’option retenue par le législateur de l’État partie est légitime, au nom de l’intérêt économique de l’État partie en tant que prestataire de biens publics soumis à la rareté.
6.8En pratique, l’auteur n’a pas subi de discrimination par rapport à d’autres personnes privées de liberté dont la situation personnelle est identique et qui perçoivent une prestation d’invalidité non contributive de la sécurité sociale. L’auteur n’a pas établi que d’autres personnes se trouvant dans la même situation, dans le même centre pénitentiaire, n’ont pas fait l’objet d’une déduction de la prestation non contributive dans une proportion équivalente à celle du coût de l’entretien auquel elles ont droit au centre pénitentiaire. Il n’a pas établi non plus que la différence de traitement supposée soit intervenue par rapport à des détenus se trouvant dans d’autres centres pénitentiaires d’autres communautés autonomes, ou dans un autre type d’établissement fermé. Par ailleurs, l’État partie soutient que l’auteur n’a pas établi non plus qu’il existe une différence de traitement comparativement aux personnes séjournant dans d’autres lieux soutenus par des fonds publics comme les hôpitaux, les orphelinats, les maisons de retraite et les centres militaires. Même s’il existait une différence, la comparaison n’est pas pertinente car la situation personnelle objective des personnes qui s’y trouvent n’est pas la même que celle d’une personne condamnée à une peine privative de liberté pour la commission d’un délit.
7.1Par correspondance datée du 10 juillet 2015, l’auteur a présenté ses commentaires sur les observations de l’État partie quant au fond de la communication. Il indique avoir subi un traitement inégal, tant de la part des autorités chargées de la gestion des pensions non contributives que de celle des autorités pénitentiaires. La législation qui régit les prestations non contributives, en particulier les articles 144 et suivants de la loi générale sur la sécurité sociale, ne dispose pas expressément qu’il faille déduire du montant des prestations non contributives des personnes privées de liberté le montant correspondant au coût estimatif de leur entretien. La diminution des prestations appliquée à ces cas est imputable à une décision du Gouvernement central ou des gouvernements régionaux, lorsque les compétences dans ce domaine leur ont été transférées, d’après une certaine interprétation des normes juridiques correspondantes, comme dans le cas du Gouvernement régional de l’Andalousie. En raison du manque de clarté des normes en vigueur, les autorités ont appliqué des critères différents et les tribunaux ont rendu des jugements contradictoires.
7.2L’État partie indique d’un côté que toute personne privée de liberté a droit à son entretien, les frais étant assumés gratuitement par l’État. Néanmoins, en pratique, les personnes visées par la mesure en question supportent leur entretien par une réduction de leurs prestations non contributives. L’auteur ajoute que, conformément à l’article 3 de la loi générale pénitentiaire, des mesures doivent être adoptées pour que les détenus et les membres de leur famille conservent leurs droits aux prestations de la sécurité sociale acquis avant le placement en détention, du fait que les prestations bénéficient aussi à la famille du bénéficiaire.
7.3Au sujet de l’observation de l’État partie selon laquelle il ne serait pas pertinent de comparer le traitement reçu par les personnes privées de liberté dans un centre pénitentiaire avec celui d’autres personnes séjournant dans d’autres lieux financés par des fonds publics comme les hôpitaux, les orphelinats et les maisons de retraite, l’auteur indique qu’il s’abstient de tout commentaire dès lors que cette observation comporte en soi des connotations discriminatoires, et que les personnes privées de liberté bénéficiaires de prestations non contributives sont pénalisées dans l’État partie à titre de peine accessoire, en devant payer leur entretien, par rapport à d’autres catégories de personnes, notamment les personnes hospitalisées ou placées dans des centres de traitement de la toxicomanie. Ainsi, en pratique, les articles 144 et suivants de la loi générale sur la sécurité sociale sont appliqués et interprétés de manière différente pour les bénéficiaires qui seraient privés de liberté.
7.4L’auteur fait valoir que quand bien même le jugement du Tribunal suprême aurait établi que l’entretien dans les hôpitaux publics fait partie de la prestation sanitaire, celui-ci constitue également un droit subjectif, prévu dans la gamme de services communs du système national de santé, qui inclut l’alimentation dans le cas de l’hospitalisation au sein d’un établissement. Ainsi, en dépit de la similitude de situations et de circonstances des bénéficiaires, dans la pratique les personnes qui ne font pas l’objet d’une peine privative de liberté peuvent accéder à une alimentation gratuite financée par des sources publiques ou privées sans que leurs prestations sociales en soient affectées.
8.1À sa cinquante-troisième session, le 26 novembre 2014, le Comité a examiné la recevabilité de la communication.
8.2À la lumière des documents mis à sa disposition par les parties en vertu du paragraphe 1 de l’article 8 du Protocole facultatif, le Comité s’est assuré que la même question n’a pas déjà fait l’objet, ni ne fait l’objet d’un examen dans le cadre d’une autre procédure d’enquête ou de règlement au niveau international. Par conséquent, le Comité estime qu’il n’existe aucun obstacle à la recevabilité de la présente communication, conformément au paragraphe 2 c) de l’article 3 du Protocole facultatif.
8.3Le Comité a pris note de l’argument de l’État partie selon lequel la communication est irrecevable du fait qu’elle a été présentée plus d’un an après l’épuisement des recours internes, soit après expiration du délai prévu à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif. Le Comité a noté cependant que d’après l’attestation établie par le Tribunal constitutionnel le 12 mars 2014, le jugement du Tribunal, par lequel les recours internes ont été épuisés, a été prononcé le 29 octobre 2012 et communiqué au représentant de l’auteur au procès le 6 novembre 2012. À cet égard, le Comité a considéré que le délai prévu à l’alinéaa) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif commence à courir au moment où l’auteur ou son représentant sont suffisamment informés du jugement définitif pour pouvoir élaborer leur communication au Comité et se prévaloir de l’épuisement des recours internes. Quand l’auteur d’une communication a le droit d’être informé de la décision finale de l’instance nationale marquant l’épuisement des recours internes, ou en est informé au moyen d’une copie de la décision, il convient de considérer que le délai prévu à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif commence à courir à partir du lendemain de la date de la notification. Par conséquent, le Comité a estimé qu’il n’était pas empêché, au regard de l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif, d’examiner les griefs que tire l’auteur des articles 2 et 9 du Pacte.
8.4Le Comité a pris note de la position de l’auteur, qui fait valoir que les faits à l’origine de la violation de ses droits, bien qu’ils se soient produits avant l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’État partie, persistaient au moment où la communication a été présentée et qu’il y a donc lieu de considérer que le Comité était compétent pour examiner ses griefs. Le Comité a noté également que l’État partie n’avait pas soulevé d’objections au regard de l’alinéa b) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif. À cet égard, le Comité a constaté que les griefs de violations du Pacte formulés dans la communication ont trait aux décisions des autorités de l’État partie ayant entraîné la réduction de la pension non contributive de l’auteur ainsi qu’à la pension ainsi réduite. Bien que ces mesures, y compris l’ensemble des décisions judiciaires des autorités nationales, aient été prises avant le 5 mai 2013, date de l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour l’Espagne, l’auteur avait continué jusqu’à ce jour de percevoir une pension réduite. Par conséquent, dans les circonstances de l’espèce, le Comité a estimé qu’il n’était pas empêché par l’alinéab) du paragraphe 2 de l’article 3 du Protocole facultatif d’examiner la présente communication.
8.5Le Comité a estimé que les griefs que tire l’auteur des articles 2 et 9 du Pacte avaient été suffisamment étayés aux fins de la recevabilité. En conséquence, il a déclaré la communication recevable en ce qu’elle soulevait des questions au regard des articles 2 et 9 du Pacte.
9.1Le Comité a examiné la présente communication en tenant compte de toute la documentation qui lui a été soumise, conformément à l’article 8 du Protocole facultatif.
9.2L’auteur fait valoir que l’État partie a porté atteinte à son droit à la sécurité sociale du fait que le Conseil pour l’égalité et la protection sociale de la Junte d’Andalousie (le Conseil) a réduit le montant de sa prestation d’invalidité non contributive au motif qu’il était nécessaire de déduire les frais d’entretien de l’auteur au centre pénitentiaire dans lequel il exécute sa peine privative de liberté. L’auteur fait valoir que les personnes privées de liberté doivent jouir de tous leurs droits, et que les autorités doivent donc adopter les mesures voulues pour que les détenus et les membres de leur famille conservent leurs droits aux prestations de la sécurité sociale acquis avant le placement en détention. L’auteur estime également que la décision de réduire le montant de sa prestation constitue un traitement discriminatoire par rapport : a) aux autres personnes privées de liberté, qui n’ont pas à payer leurs frais d’entretien en prison ; b) par rapport aux détenus qui résident dans d’autres communauté autonomes qui ne se voient pas appliquer de réduction de leurs prestations d’invalidité non contributives ; et c) par rapport aux personnes libres qui séjournent temporairement dans des lieux financés par des fonds publics ou qui sont utilisateurs de services publics comme les hôpitaux, les centres d’accueil, les cantines sociales, et les centres de traitement de la toxicomanie, où ils sont alimentés gratuitement, sans diminution d’autres prestations accordées par la sécurité sociale.
9.3L’État partie soutient que la réduction de la prestation d’invalidité non contributive de l’auteur est conforme à la loi, en particulier aux articles 144 et suivants de la loi générale sur la sécurité sociale. Et que, de plus, cette réduction est justifiée puisqu’il s’agit d’une prestation non contributive, dont la reconnaissance découle de l’état de nécessité du bénéficiaire, et non de contributions préalables au système que celui-ci aurait effectuées. D’après l’État partie, comme toute personne privée de liberté a droit à des prestations d’entretien gratuitement, quelle que soit sa situation personnelle ou patrimoniale, il est donc logique que, pour protéger les ressources publiques, les coûts de cet entretien puissent être déduits du montant effectif de la prestation non contributive puisqu’il est déjà pourvu aux besoins du bénéficiaire. L’État partie soutient également qu’il n’y a pas de discrimination étant donné que la réduction a été appliquée égalitairement par rapport à toute autre personne dont la situation personnelle serait identique à celle de l’auteur. Comme il s’agit, en outre, d’une pension non contributive, la comparaison pertinente doit être faite avec les autres bénéficiaires de la même catégorie de prestations qui feraient l’objet d’une privation de liberté à la suite d’une condamnation et relèvent donc du régime pénitentiaire, dans le même centre pénitentiaire ou dans tout autre établissement. Or, d’après l’État partie, l’auteur n’a prouvé, ni devant les tribunaux nationaux ni devant le Comité, l’existence d’un traitement différent par rapport à ces personnes. Par ailleurs, selon l’État partie, l’auteur n’a pas établi non plus qu’il existe une différence de traitement, comparativement aux personnes séjournant dans d’autres lieux financés par des fonds publics, comme les hôpitaux, les orphelinats, les maisons de retraite et les centres militaires. L’État partie fait valoir que même si une telle différence avait existé, la comparaison ne serait pas pertinente dans la mesure où la situation personnelle objective des personnes qui y séjournent n’est pas la même que celle d’une personne condamnée à une peine privative de liberté pour la commission d’un délit.
9.4Le Comité note qu’il n’est contesté par aucune des parties que le Conseil a accordé à l’auteur une prestation d’invalidité non contributive d’un montant de 301,55 euros par mois ; qu’en mars 2003, l’auteur a été incarcéré au centre pénitentiaire de Séville ; et que le 26 mars 2006, le Conseil a réduit le montant de la prestation à 147,71 euros par mois, ayant estimé qu’il convenait, pour établir le montant de la prestation, de comptabiliser dans les revenus ou les ressources de l’auteur le montant correspondant à son entretien au centre pénitentiaire, soit 2 062,25 euros annuels.
9.5Le Comité ayant examiné les faits de l’espèce, vu les allégations de l’auteur et de l’État partie, il est d’avis que les deux problèmes distincts mais connexes posés par la présente communication sont de savoir : a) si la réduction du montant de la prestation d’invalidité non contributive de l’auteur, équivalente au coût de son entretien en prison, constitue en soi une violation directe du droit à la sécurité sociale prévue à l’article 9 du Pacte ; b) si cette réduction constitue un traitement discriminatoire et une violation de l’article 2 du Pacte, lu parallèlement à l’article 9. Pour répondre à ces questions, le Comité commencera par rappeler certains éléments du droit à la sécurité sociale, en particulier ceux qui concernent les prestations non contributives, les personnes handicapées et les personnes privées de liberté, avant d’analyser séparément chacune des questions.
10.1Le Comité rappelle que le droit à la sécurité sociale revêt une importance fondamentale pour garantir la dignité humaine de toutes les personnes confrontées à des circonstances qui les privent de la capacité d’exercer pleinement les droits énoncés dans le Pacte. Ce droit joue un rôle important pour éviter l’exclusion sociale et favoriser l’insertion sociale. Le droit à la sécurité sociale englobe le droit d’avoir accès à des prestations, en espèces ou en nature, et de continuer à en bénéficier, sans discrimination.
10.2Les prestations, en espèces ou en nature, doivent être d’un montant et d’une durée adéquats afin que chacun puisse exercer ses droits à la protection de la famille et à l’aide à la famille, à un niveau de vie suffisant et aux soins de santé. En outre, les États parties doivent respecter pleinement le principe de la dignité humaine, énoncé dans le préambule du Pacte, et le principe de la non-discrimination, de façon à éviter toute répercussion néfaste sur le niveau et la forme des prestations.
10.3Le Comité rappelle que si l’exercice du droit à la sécurité sociale a des incidences financières importantes pour les États parties, ces derniers ont l’obligation d’assurer, au minimum, la satisfaction de l’essentiel de ce droit prévu par le Pacte. Ils doivent notamment assurer l’accès à un régime de sécurité sociale qui garantisse, au minimum, à l’ensemble des personnes et des familles un niveau essentiel de prestations, qui leur permette de bénéficier au moins des soins de santé essentiels, d’un hébergement et d’un logement de base, de l’approvisionnement en eau et de l’assainissement, de denrées alimentaires et des formes les plus élémentaires d’enseignement.
10.4Les États parties sont aussi tenus d’assurer l’exercice du droit à la sécurité sociale quand des individus ou groupes sont incapables, pour des motifs jugés raisonnablement indépendants de leur volonté, de l’exercer eux-mêmes avec leurs propres moyens dans le cadre du système de sécurité sociale existant. Ils doivent adopter à cet effet des régimes non contributifs ou d’autres mesures d’assistance sociale pour aider les individus et les groupes incapables de verser des cotisations suffisantes pour assurer leur propre protection.
10.5S’agissant des personnes handicapées qui, du fait de leur incapacité ou pour des raisons qui y sont liées, ont perdu temporairement leur revenu ou l’ont vu diminuer ou se sont vu refuser un emploi ou qui sont atteintes d’une incapacité permanente, les plans de sécurité sociale et de maintien des revenus revêtent une importance particulière. Ils doivent permettre à ces personnes de bénéficier d’un niveau de vie suffisant, de mener une vie indépendante et d’être intégrées dans la collectivité, de façon digne. En outre, l’aide fournie devrait aussi couvrir les membres de la famille et les autres prestataires informels de soins.
10.6Le Comité rappelle que le Pacte interdit toute discrimination, qu’elle soit de droit ou de fait, directe ou indirecte, dont l’intention ou l’effet est de rendre impossible ou d’entraver la jouissance ou l’exercice sur un pied d’égalité du droit à la sécurité sociale. Conformément au paragraphe 1 de l’article 2 du Pacte, les États parties doivent adopter des mesures concrètes, et les revoir régulièrement si nécessaire, au maximum de leurs ressources disponibles, en vue de réaliser intégralement le droit de toutes les personnes sans discrimination à la sécurité sociale.
11.1Les personnes privées de liberté dans un établissement pénitentiaire jouissent des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte sans discrimination, sauf pour ce qui est des limitations qui sont évidemment rendues nécessaires par leur incarcération. Le Comité rappelle que chacun a certes droit à la sécurité sociale, mais que les États parties devraient être spécialement attentifs aux individus et aux groupes qui de tout temps éprouvent des difficultés à exercer ce droit, dont les détenus.
11.2Le Comité rappelle également que le droit à la sécurité sociale comprend le droit de ne pas être soumis à des restrictions arbitraires et déraisonnables du bénéfice du dispositif de sécurité sociale existant, qu’il soit d’origine publique ou privée, ainsi que le droit de jouir sur un pied d’égalité d’une protection adéquate contre les risques et aléas sociaux. Les conditions d’admissibilité au bénéfice des prestations doivent être raisonnables, proportionnées et transparentes. Le retrait, la réduction ou la suspension des prestations devrait être limité, reposer sur des motifs raisonnables et faire l’objet de dispositions législatives nationales.
11.3Compte tenu de ce qui précède, une prestation non contributive ne peut, en principe, être retirée, réduite ou suspendue par suite de la privation de liberté du bénéficiaire, sauf si la mesure est prévue par la loi, est raisonnable et proportionnée, et garantit au minimum un niveau essentiel de prestations (voir supra, par. 10.3). Le caractère raisonnable et proportionné de la mesure doit être évalué cas par cas, compte tenu de la situation personnelle du bénéficiaire. En conséquence, dans le cas des personnes privées de liberté, la réduction du montant d’une prestation non contributive peut être compatible avec le Pacte si elle est prévue par la loi, et si les mêmes dépenses sont couvertes dans le cadre des services fournis aux personnes privées de liberté dans le centre pénitentiaire.
12.Le Comité rappelle que sa tâche, en examinant une communication, se limite à analyser si les faits décrits dans la communication dénotent une violation par l’État partie des droits économiques, sociaux et culturels énoncés dans le Pacte. Le Comité estime qu’il appartient en premier lieu aux juridictions des États parties d’apprécier les faits et les éléments de preuve dans une affaire donnée, ainsi que la manière dont la législation pertinente a été appliquée, et que son rôle consiste seulement à dire si l’appréciation des éléments probants ou l’application du droit interne ont été manifestement arbitraires, ou ont constitué un déni de justice qui a porté atteinte à un droit reconnu dans le Pacte.
13.1Le Comité examinera en premier lieu si la réduction du montant de la prestation d’invalidité non contributive de l’auteur, équivalente au coût de son entretien en prison (soit une diminution de 301,55 à 147,71 euros par mois) constitue en soi une violation de l’article 9 du Pacte. Le Comité prend note des arguments de l’État partie selon lesquels la prestation ayant un caractère non contributif et étant à la charge de l’État, il y a lieu, lorsque l’État verse concurremment des prestations qu’il prend également à sa charge, d’appliquer une déduction pour en tenir compte ; et que la réduction de la prestation de l’auteur a été effectuée conformément à la loi.
13.2Comme on l’a vu précédemment, la diminution du montant d’une prestation non contributive est compatible avec les obligations énoncées dans le Pacte, pour autant que la mesure soit prévue par la loi et soit raisonnable et proportionnée (voir supra, par. 11.2 et 11.3). Dans le cas de l’auteur, vu les articles 144 et suivants de la loi générale sur la sécurité sociale, la diminution du montant de sa prestation d’invalidité non contributive est due au fait qu’une partie des dépenses essentielles – logement et alimentation – auxquelles correspondait le montant initial de la prestation sont couvertes par l’entretien auquel pourvoit directement et gratuitement l’établissement pénitentiaire, et il apparaît donc qu’elle est autorisée par les articles susmentionnés, conformément à l’interprétation formulée par la juridiction suprême espagnole. Il s’agit donc d’une diminution autorisée par la loi.
13.3Cette diminution constitue en outre un moyen raisonnable d’atteindre un but compatible avec le Pacte, à savoir la protection des ressources publiques, lesquelles sont nécessaires à la réalisation des droits des personnes. Dans le cas particulier des prestations non contributives qui sont exclusivement à la charge de l’État et ne sont pas subordonnées à des contributions préalables du bénéficiaire, les États parties ont une certaine latitude pour disposer des ressources budgétaires de la meilleure façon possible, aux fins de garantir la pleine effectivité des droits reconnus dans le Pacte et d’assurer, notamment, un système de sécurité sociale qui offre à toutes les personnes et toutes les familles un niveau essentiel minimum de prestations (voir supra, par. 10.3). Le Comité estime donc raisonnable qu’afin de répartir plus efficacement les ressources de l’État, une prestation non contributive puisse être éventuellement réduite, si les besoins du bénéficiaire qui ont été pris en compte pour déterminer le montant de la prestation initiale changement. En l’espèce, les besoins de l’auteur ont changé en raison de l’entretien dont il bénéficie dans l’établissement pénitentiaire à la charge de l’État partie.
13.4Enfin, le Comité constate qu’après la mesure en question, l’auteur a continué de recevoir une pension non contributive de 147,71 euros, parallèlement à l’entretien dont il bénéficie dans le centre pénitentiaire où il est incarcéré. L’État partie a donc remplacé la prestation qu’il accordait en espèces lorsque l’auteur était en liberté par une prestation en nature, à savoir la prise en charge de son entretien pendant la période de privation de liberté. À cet égard, le Comité considère qu’un État partie n’a pas toute latitude pour remplacer une prestation en espèces par une autre forme d’assistance. Dans certains cas, le remplacement en lui-même ou le niveau de réduction de la prestation en espèces peut constituer une violation du droit à la sécurité sociale, si cette mesure a un effet disproportionné sur la personne. La compatibilité d’une telle mesure avec les obligations énoncées dans le Pacte doit être évaluée cas par cas. En l’espèce, le Comité considère qu’il n’est pas établi que le remplacement d’une partie de la prestation d’invalidité non contributive en espèces par l’entretien assuré dans le centre pénitentiaire ait des effets préjudiciables graves sur l’auteur. De fait, l’auteur n’a pas présenté d’éléments ou de documents qui indiquent que la mesure en question soit disproportionnée parce qu’elle aurait compromis la satisfaction des besoins essentiels auxquels la prestation non contributive vise à répondre, pour lui ou pour les membres de sa famille (voir supra, par. 10.3) ; ou que cette mesure lui serait particulièrement préjudiciable en raison de son handicap. En conséquence, vu les faits de la cause, le Comité estime que la plainte de l’auteur et les renseignements présentés par ce dernier ne lui permettent pas de conclure que la réduction du montant de la prestation non contributive de l’auteur constitue en soi une violation de l’article 9 du Pacte.
14.1En deuxième lieu, le Comité examinera si la diminution du montant de la prestation non contributive de l’auteur constitue un traitement discriminatoire en ce qui concerne son droit à la sécurité sociale. À cet égard, le Comité rappelle que toute différence de traitement n’est pas constitutive de discrimination, si les critères motivant la différenciation sont raisonnables et objectifs et si l’on cherche à atteindre un but légitime au regard du Pacte. Le Comité prend note de ce que l’auteur est une personne handicapée et qu’il est en outre privé de liberté, ce qui l’expose davantage à la discrimination que le reste de la population (voir supra, par. 10.5 et 11.1). Il s’ensuit que l’examen du Comité quant à la discrimination dont l’auteur a pu faire l’objet doit obéir à des critères plus stricts.
14.2Le Comité analyse tout d’abord les allégations de l’auteur selon lesquelles il n’aurait pas été traité sur un pied d’égalité avec certaines personnes privées de liberté dont les prestations non contributives n’auraient pas été réduites. En l’espèce, le Comité est d’avis que le critère de comparaison proposé par l’auteur paraît approprié dès lors qu’il s’agit, dans le contexte de l’affaire examinée, de personnes dont la situation est sensiblement identique à celle de l’auteur. Certes, les décisions judiciaires et la documentation communiquées par l’auteur paraissent témoigner d’une période pendant laquelle il y aurait eu des décisions judiciaires contradictoires au sujet de l’interprétation et de l’application des articles 144 et suivants et de la loi générale sur la sécurité sociale concernant la méthode de calcul de la prestation non contributive en faveur des personnes privées de liberté. Cependant, l’auteur n’a pas démontré, en se référant par exemple à des normes juridiques ou à leur application, qu’il existe effectivement un traitement différencié lié au calcul de la prestation non contributive des personnes privées de liberté dans d’autres centres pénitentiaires d’autres communautés autonomes. Qui plus est, le jugement du Tribunal suprême du 29 septembre 2010 a établi que la doctrine en la matière a été harmonisée par ses jugements du 20 décembre 2000 et du 15 juillet 2008, qui autorisent la déduction d’un certain montant correspondant aux frais d’entretien du montant des prestations. L’auteur n’a pas prouvé qu’une différence de traitement soit apparue dans la pratique entre les diverses communautés autonomes après lesdits jugements du Tribunal suprême. En conséquence, le Comité n’estime pas nécessaire d’examiner si le traitement inégal présumé entre les diverses communautés autonomes peut constituer une violation du Pacte. Partant, le Comité estime que les éléments dont il dispose ne lui permettent pas de conclure que la décision du Conseil par laquelle la prestation de l’auteur a été réduite constitue un traitement inégalitaire par rapport aux autres personnes privées de liberté des établissements pénitentiaires situés dans d’autres communautés autonomes.
14.3Le Comité passe à l’examen des griefs de l’auteur faisant état d’un traitement inégalitaire par rapport à d’autres personnes privées de liberté qui ne bénéficient pas d’une prestation non contributive et qui reçoivent gratuitement des prestations d’entretien au centre pénitentiaire. D’après l’auteur, il y aurait discrimination dans la mesure où lui-même paierait son propre entretien tandis que les autres détenus n’auraient pas à le faire.
14.4Le Comité est d’avis que l’auteur part en l’espèce d’une prémisse erronée, qui l’amène à établir un point de comparaison impropre. L’auteur part du principe que la prestation financière non contributive fait partie de ses revenus et constituerait un élément de son patrimoine, de sorte que la réduction de ce revenu en contrepartie de son entretien revient pour l’auteur à devoir « payer » l’entretien en question. Or, ce n’est pas le cas dans la mesure où la prestation financière dont il bénéficie est non contributive et présente des caractéristiques semblables à celles décrites au paragraphe 13.3 ci-dessus, et ne constitue donc pas un revenu de l’auteur provenant de l’épargne de ses cotisations, comme dans le cas d’une prestation contributive, mais lui a été accordée en raison de certains besoins qu’il n’était pas en mesure de satisfaire par d’autres revenus ou prestations. Telle est la raison pour laquelle le montant de la prestation initiale peut être réduit : l’auteur perçoit d’autres revenus ou prestations qui lui permettent de satisfaire auxdits besoins. Il n’est donc pas exact que l’auteur doive payer son propre entretien au centre pénitentiaire tandis que d’autres détenus n’auraient pas à le faire, étant donné que, dans son cas, le montant correspondant à l’entretien est pris en considération, en tant que ressource ou que revenu, pour calculer le montant de sa pension non contributive. La situation de l’auteur est différente de celle de personnes privées de liberté qui ne sont pas bénéficiaires d’une prestation non contributive. En conséquence, le Comité estime que les différences de traitement dont l’auteur s’affirme victime ne constituent pas une violation des articles 2 et 9 du Pacte.
14.5Le Comité examine en dernier lieu le grief de l’auteur selon lequel il aurait subi un traitement discriminatoire par rapport aux personnes en liberté qui fréquentent des lieux soutenus par les fonds publics où l’alimentation et parfois l’hébergement leur sont fournis gratuitement, tels que les hôpitaux, les centres d’accueil et les centres de traitement de la toxicomanie, sans que cela motive une réduction des prestations non contributives accordées par la sécurité sociale. Le Comité estime que l’auteur n’a présenté d’éléments pertinents ni de documents qui indiquent qu’une telle différence de traitement existe en pratique ; et que même si les cas invoqués par l’auteur étaient pertinents, il n’y aurait pas eu de traitement discriminatoire à son égard.
14.6Il existe certes des similitudes entre la situation de l’auteur et celle d’une personne en liberté qui serait titulaire d’une pension non contributive et bénéficierait de prestations d’alimentation et d’hébergement gratuites dans un établissement de soins publics, à titre d’exemple un hôpital. Il s’agit dans les deux cas de personnes qui bénéficient d’une prestation financière non contributive et reçoivent une autre prestation en nature de l’État, et l’on pourrait donc en conclure que l’État doit accorder le même traitement pour les deux situations : soit garder la prestation financière inchangée aux deux personnes, ou diminuer celle-ci proportionnellement. Le Comité estime cependant qu’en dépit de ces similitudes, il existe aussi entre les deux situations des différences sensibles qui justifient que l’État puisse leur appliquer un traitement différent sans commettre de discrimination. Le Comité est d’avis que la situation d’une personne privée de liberté en raison d’une condamnation pénale est différente de celle des autres personnes mentionnées par l’auteur (telles qu’un malade recevant des soins dans un hôpital ou une personne bénéficiant de repas dans un centre d’accueil) au moins à deux égards.
14.7En premier lieu, une personne condamnée est privée de liberté pour exécuter une peine imposée par un organe judiciaire pendant une période déterminée, généralement de quelques mois ou de quelques années. Cette personne a donc un statut juridique particulier. Qui plus est, il est relativement aisé de déterminer le coût de son entretien, le caractère suffisant de l’entretien assuré au centre pénitentiaire pour couvrir les besoins ou la partie des besoins auxquels correspondait la prestation non contributive initiale, et la période pendant laquelle l’entretien doit être accordé. À l’inverse, la situation des personnes en liberté qui fréquentent les services publics mentionnés par l’auteur, hôpitaux ou centres de soins notamment, est distincte de la situation d’une personne privée de liberté pour avoir commis un délit, car ces personnes fréquentent en principe ces services de leur propre gré et acceptent éventuellement de séjourner dans ces centres pour obtenir la protection de droits essentiels, pour des périodes dont ils ne peuvent prévoir la durée mais qui sont souvent courtes. Il est donc beaucoup plus incertain, en pareil cas, de parvenir à ce qu’une réduction du montant de la prestation n’ait pas d’incidences sur la satisfaction des besoins pour lesquels la prestation non contributive est prévue. Qui plus est, en raison du caractère indéterminé et temporaire des services, il est très probable que la réduction intervienne après que la personne bénéficiaire ait déjà quitté l’hôpital ou le centre de soins dans lequel elle recevait la prestation.
14.8En second lieu, même si les usagers bénéficient d’un hébergement et de repas dans ces lieux, ces prestations ne doivent pas être entendues comme un service supplémentaire ou autonome, mais comme un élément à part entière des services qui leur sont fournis par l’État pour leur permettre de faire face à la situation de vulnérabilité dont ils sont victimes, généralement de façon temporaire, et qui sont nécessaires pour garantir la protection de droits essentiels comme le droit à la santé ou le droit à l’alimentation.
14.9Partant, le Comité estime qu’il existe des similitudes entre la situation de l’auteur et celle des personnes libres d’après les éléments de comparaison présentés. Néanmoins, compte tenu des différences importantes indiquées dans les paragraphes précédents, l’État partie n’a pas l’obligation d’appliquer un traitement identique aux bénéficiaires de pensions non contributives qui sont privés de liberté et aux personnes libres qui fréquentent des hôpitaux, des centres de soins ou des centres d’accueil. Partant, les différences qui sont alléguées par l’auteur, même si elles étaient avérées, ne constituent pas un traitement discriminatoire eu égard aux articles 2 et 9 du Pacte.
15.Compte tenu des éléments de fait et de droit qui précèdent, le Comité, agissant en vertu du paragraphe 1 de l’article 9 du Protocole facultatif, estime que la diminution du montant de la prestation d’invalidité non contributive de l’auteur ne constitue pas une violation des droits reconnus à l’auteur en vertu des articles 2 et 9 du Pacte.
ACTUALITÉS DES DROITS ÉCONOMIQUES SOCIAUX ET CULTURELS
FRANCE :
1/ Le comité économique vient d'accepter des requêtes rédigées par mes soins, concernant trois professeurs contractuels qui réclament leur salaire des heures réellement travaillées. Les heures supplémentaires pour accueillir les parents d'élèves, les suivre lors de leur stages et assister aux conseils de classe ne sont payées à aucun professeur en France. Pourtant, tout travail mérite salaire !
2/ Suite à une communication individuelle rédigée par nos soins, déclarée recevable contre l'État du Luxembourg, les autorités luxembourgeoises n'ont pas condamné au remboursement de quatre ans de salaires, l'auteur qui avait été licencié pour une faute grave imaginaire, alors qu'il était représentant du personnel et par conséquent salarié protégé. Malheureusement l'employeur s'est présenté devant les juridictions françaises de Metz qui a rendu une décision hallucinante, en motivant qu'à Metz le droit français devait être abandonné au profit du droit luxembourgeois, pour finalement rendre une décision contraire à celle rendue par les autorités judiciaires luxembourgeoises. L'auteur doit rembourser près de 200 000 euros de salaire versé !!!! Naturellement, cette décision française fait l'objet d'un pourvoi en cassation. Malheureusement, la magistrate qui a rendu cette décision, seule, en refusant assistance de ses assesseurs, a été nommée entre temps conseillère à la Chambre sociale de la Cour de Cassation. Elle peut ainsi, bien à l'abri de la contradiction, convaincre ses collègues qui ne sont pas sans reproche, de confirmer son arrêt rendu devant la Cour d'Appel de Metz. Heureusement, le Comité des Droits Économiques, a aussi interrogé la France sur les causes de cette décision, pour s'avoir si la Cour d'Appel de Metz ne se transforme pas en juridiction de rattrapage pour les patrons allemands, belges et luxembourgeois, quand ils n'obtiennent pas gain de cause devant les juridictions de leurs pays. Pour tout savoir sur cette décision de la Cour d'Appel de Metz, cliquez sur le lien bleu : RENÉE MICHÈLE OTT
3/ Nous publions ici la communication individuelle auprès du Comité des Droits Économiques Sociaux et Culturels concernant une famille française expulsée de la maison qu'elle avait achetée, sans être relogée.
4/ Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme : La Déclaration sur l'adoption d'un instrument international contraignant sur les entreprises et les droits de l'homme.
5/ Commission nationale consultative des droits de l'homme : Déclaration garantir un travail décent, un enjeu de l'économie mondiale.
Chapitre VII du titre Ier du livre Ier de la deuxième partie du code de la consommation
Transparence sur les conditions sociales de fabrication d'un produit
Article D. 117-1 du code de la consommation
Au sens et pour l'application de l'article L. 117-1, constituent des conventions internationales relatives aux droits humains fondamentaux :
1° Le pacte international relatif aux droits civils et politiques, ouvert à la signature à New York le 19 décembre 1966 ;
2° Le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ouvert à la signature à New York le 19 décembre 1966 ;
3° La convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination à l'égard des femmes, ouverte à la signature à New York le 1er mars 1980 ;
4° La convention relative aux droits de l'enfant, signée à New York le 26 janvier 1990 ;
5° La convention relative aux droits des personnes handicapées (ensemble un protocole facultatif), signée à New York le 30 mars 2007 ;
6° La
convention n° 29 de l'Organisation internationale du travail concernant le travail forcé, adoptée par la Conférence internationale du travail dans sa 14e
session tenue à Genève le 28 juin 1930 ;
7° La convention n° 87 de l'Organisation internationale du travail concernant la liberté syndicale et la protection du droit syndical, adoptée par la Conférence
internationale du travail dans sa 31e session tenue à San Francisco le 17 juin 1948 ;
8° La convention n° 98 de l'Organisation internationale du travail concernant l'application des principes du droit d'organisation et de négociation
collective, adoptée par la Conférence internationale du travail dans sa 32e session tenue à Genève le 1er juillet 1949 ;
9° La convention n° 100 de l'Organisation internationale du travail concernant l'égalité de rémunération entre la main-d'œuvre masculine et la main-d'œuvre
féminine pour un travail de valeur égale, adoptée par la Conférence internationale du travail dans sa 34e session tenue à Genève le 29 juin 1951 ;
10° La
convention n° 105 de l'Organisation internationale du travail concernant l'abolition du travail forcé, adoptée par la Conférence internationale du
travail dans sa 40e session tenue à Genève le 25 juin 1957 ;
11° La
convention n° 111 de l'Organisation internationale du travail concernant la discrimination (emploi et profession), adoptée par la Conférence internationale
du travail dans sa 42e session tenue à Genève le 25 juin 1958 ;
12° La convention n° 138 de l'Organisation internationale du travail concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi, adoptée par la Conférence internationale
du travail dans sa 58e session tenue à Genève le 26 juin 1973 ;
13° La
convention n° 182 de l'Organisation internationale du travail concernant les pires formes de travail des enfants et l'action immédiate en vue de leur
élimination, adoptée par la Conférence internationale du travail dans sa 87e session tenue à Genève le 17 juin 1999.
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