CONVENTION EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME

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La Convention protège les droits définis par Locke (1632-1704) dans son traité du gouvernement civil:
"nul n'a le droit de nuire à un autre dans sa vie, sa santé, sa liberté, son bien"
Frédéric Fabre docteur en droit.

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 - LA CONVENTION EUROPÉENNE DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME

- Protocole additionnel n°1 à la Convention de sauvegarde

- Protocole n° 4 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales,

- Protocole n° 7 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme

- Protocole n° 15 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme

- Protocole n°16 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme

- Le règlement de la CEDH du 18 octobre 2021

- La compétence et les matières de la Convention Européenne des Droits de l'Homme

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LA CONVENTION EUROPÉENNE DE SAUVEGARDE

DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES

Les gouvernements signataires, membres du Conseil de l'Europe,

Considérant la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, proclamée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 10 décembre 1948;

Considérant que cette déclaration tend à assurer la reconnaissance et l'application universelles et effectives des droits qui y sont énoncés;

Considérant que le but du Conseil de l'Europe est de réaliser une union plus étroite entre ses membres, et que l'un des moyens d'atteindre ce but est la sauvegarde et le développement des droits de l'homme et des libertés fondamentales;

Réaffirmant leur profond attachement à ces libertés fondamentales qui constituent les assises mêmes de la justice et de la paix dans le monde et dont le maintien repose essentiellement sur un régime politique véritablement démocratique, d'une part, et, d'autre part, sur une conception commune et un commun respect des droits de l'homme dont ils se réclament;

Résolus, en tant que gouvernements d'Etats européens animés d'un même esprit et possédant un patrimoine commun d'idéal et de traditions politiques, de respect de la liberté et de prééminence du droit, à prendre les premières mesures propres à assurer la garantie collective de certains des droits énoncés dans la Déclaration universelle,

Affirmant qu’il incombe au premier chef aux Hautes Parties contractantes, conformément au principe de subsidiarité, de garantir le respect des droits et libertés définis dans la présente Convention et ses protocoles, et que, ce faisant, elles jouissent d’une marge d’appréciation, sous le contrôle de la Cour européenne des Droits de l’Homme instituée par la présente Convention,

Sont convenus de ce qui suit:

Article 1 – Obligation de respecter les droits de l'homme

Les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente Convention:

Titre I – Droits et libertés

Article 2 – Droit à la vie

  1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. La mort ne peut être infligée à quiconque intentionnellement, sauf en exécution d'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délit est puni de cette peine par la loi.

  2. La mort n'est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d'un recours à la force rendu absolument nécessaire:

    1. pour assurer la défense de toute personne contre la violence illégale;

    2. pour effectuer une arrestation régulière ou pour empêcher l'évasion d'une personne régulièrement détenue;

    3. pour réprimer, conformément à la loi, une émeute ou une insurrection.

Article 3 – Interdiction de la torture

Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

Article 4 – Interdiction de l'esclavage et du travail forcé

  1. Nul ne peut être tenu en esclavage ni en servitude.

  2. Nul ne peut être astreint à accomplir un travail forcé ou obligatoire.

  3. N'est pas considéré comme «travail forcé ou obligatoire» au sens du présent article:

    1. tout travail requis normalement d'une personne soumise à la détention dans les conditions prévues par l'article 5 de la présente Convention, ou durant sa mise en liberté conditionnelle;

    2. tout service de caractère militaire ou, dans le cas d'objecteurs de conscience dans les pays où l'objection de conscience est reconnue comme légitime, à un autre service à la place du service militaire obligatoire;

    3. tout service requis dans le cas de crises ou de calamités qui menacent la vie ou le bien-être de la communauté;

    4. tout travail ou service formant partie des obligations civiques normales.

Article 5 – Droit à la liberté et à la sûreté

  1. Toute personne a droit à la liberté et à la sûreté. Nul ne peut être privé de sa liberté, sauf dans les cas suivants et selon les voies légales:

    1. s'il est détenu régulièrement après condamnation par un tribunal compétent;

    2. s'il a fait l'objet d'une arrestation ou d'une détention régulières pour insoumission à une ordonnance rendue, conformément à la loi, par un tribunal ou en vue de garantir l'exécution d'une obligation prescrite par la loi;

    3. s'il a été arrêté et détenu en vue d'être conduit devant l'autorité judiciaire compétente, lorsqu'il y a des raisons plausibles de soupçonner qu'il a commis une infraction ou qu'il y a des motifs raisonnables de croire à la nécessité de l'empêcher de commettre une infraction ou de s'enfuir après l'accomplissement de celle-ci;

    4. s'il s'agit de la détention régulière d'un mineur, décidée pour son éducation surveillée ou de sa détention régulière, afin de le traduire devant l'autorité compétente;

    5. s'il s'agit de la détention régulière d'une personne susceptible de propager une maladie contagieuse, d'un aliéné, d'un alcoolique, d'un toxicomane ou d'un vagabond;

    6. s'il s'agit de l'arrestation ou de la détention régulières d'une personne pour l'empêcher de pénétrer irrégulièrement dans le territoire, ou contre laquelle une procédure d'expulsion ou d'extradition est en cours.

  2. Toute personne arrêtée doit être informée, dans le plus court délai et dans une langue qu'elle comprend, des raisons de son arrestation et de toute accusation portée contre elle.

  3. Toute personne arrêtée ou détenue, dans les conditions prévues au paragraphe 1.c du présent article, doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires et a le droit d'être jugée dans un délai raisonnable, ou libérée pendant la procédure. La mise en liberté peut être subordonnée à une garantie assurant la comparution de l'intéressé à l'audience.

  4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

  5. Toute personne victime d'une arrestation ou d'une détention dans des conditions contraires aux dispositions de cet article a droit à réparation.

Article 6 – Droit à un procès équitable

  1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice.

  2. Toute personne accusée d'une infraction est présumée innocente jusqu'à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.

  3. Tout accusé a droit notamment à:

    1. être informé, dans le plus court délai, dans une langue qu'il comprend et d'une manière détaillée, de la nature et de la cause de l'accusation portée contre lui;

    2. disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense;

    3. se défendre lui-même ou avoir l'assistance d'un défenseur de son choix et, s'il n'a pas les moyens de rémunérer un défenseur, pouvoir être assisté gratuitement par un avocat d'office, lorsque les intérêts de la justice l'exigent;

    4. interroger ou faire interroger les témoins à charge et obtenir la convocation et l'interrogation des témoins à décharge dans les mêmes conditions que les témoins à charge;

    5. se faire assister gratuitement d'un interprète, s'il ne comprend pas ou ne parle pas la langue employée à l'audience.

Article 7 – Pas de peine sans loi

  1. Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d'après le droit national ou international. De même il n'est infligé aucune peine plus forte que celle qui était applicable au moment où l'infraction a été commise.

  2. Le présent article ne portera pas atteinte au jugement et à la punition d'une personne coupable d'une action ou d'une omission qui, au moment où elle a été commise, était criminelle d'après les principes généraux de droit reconnus par les nations civilisées.

Article 8 – Droit au respect de la vie privée et familiale

  1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

  2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Article 9 – Liberté de pensée, de conscience et de religion

  1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l'enseignement, les pratiques et l'accomplissement des rites.

  2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l'ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

Article 10 – Liberté d'expression

  1. Toute personne a droit à la liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorités publiques et sans considération de frontière. Le présent article n'empêche pas les Etats de soumettre les entreprises de radiodiffusion, de cinéma ou de télévision à un régime d'autorisations.

  2. L'exercice de ces libertés comportant des devoirs et des responsabilités peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, qui constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à l'intégrité territoriale ou à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, à la protection de la réputation ou des droits d'autrui, pour empêcher la divulgation d'informations confidentielles ou pour garantir l'autorité et l'impartialité du pouvoir judiciaire.

Article 11 – Liberté de réunion et d'association

  1. Toute personne a droit à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d'association, y compris le droit de fonder avec d'autres des syndicats et de s'affilier à des syndicats pour la défense de ses intérêts.

  2. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, à la défense de l'ordre et à la prévention du crime, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. Le présent article n'interdit pas que des restrictions légitimes soient imposées à l'exercice de ces droits par les membres des forces armées, de la police ou de l'administration de l'Etat.

Article 12 – Droit au mariage

A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit.

Article 13 – Droit à un recours effectif

Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.

Article 14 – Interdiction de discrimination

La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation.

Article 15 – Dérogation en cas d'état d'urgence

  1. En cas de guerre ou en cas d'autre danger public menaçant la vie de la nation, toute Haute Partie contractante peut prendre des mesures dérogeant aux obligations prévues par la présente Convention, dans la stricte mesure où la situation l'exige et à la condition que ces mesures ne soient pas en contradiction avec les autres obligations découlant du droit international.

  2. La disposition précédente n'autorise aucune dérogation à l'article 2, sauf pour le cas de décès résultant d'actes licites de guerre, et aux articles 3, 4 (paragraphe 1) et 7.

  3. Toute Haute Partie contractante qui exerce ce droit de dérogation tient le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe pleinement informé des mesures prises et des motifs qui les ont inspirées. Elle doit également informer le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe de la date à laquelle ces mesures ont cessé d'être en vigueur et les dispositions de la Convention reçoivent de nouveau pleine application.

Article 16 – Restrictions à l'activité politique des étrangers

Aucune des dispositions des articles 10, 11 et 14 ne peut être considérée comme interdisant aux Hautes Parties contractantes d'imposer des restrictions à l'activité politique des étrangers.

Article 17 – Interdiction de l'abus de droit

Aucune des dispositions de la présente Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention.

Article 18 – Limitation de l'usage des restrictions aux droits

Les restrictions qui, aux termes de la présente Convention, sont apportées auxdits droits et libertés ne peuvent être appliquées que dans le but pour lequel elles ont été prévues.

Titre II – Cour européenne des Droits de l'Homme

Article 19 – Institution de la Cour

Afin d'assurer le respect des engagements résultant pour les Hautes Parties contractantes de la présente Convention et de ses protocoles, il est institué une Cour européenne des Droits de l'Homme, ci-dessous nommée «la Cour». Elle fonctionne de façon permanente.

Article 20 – Nombre de juges

La Cour se compose d'un nombre de juges égal à celui des Hautes Parties contractantes.

Article 21 – Conditions d'exercice des fonctions

  1. Les juges doivent jouir de la plus haute considération morale et réunir les conditions requises pour l'exercice de hautes fonctions judiciaires ou être des jurisconsultes possédant une compétence notoire.

    2. Les candidats doivent être âgés de moins de 65 ans à la date à laquelle la liste de trois candidats est attendue par l’Assemblée parlementaire, en vertu de l’article 22.

    3. Les juges siègent à la Cour à titre individuel.

  2. 4. Pendant la durée de leur mandat, les juges ne peuvent exercer aucune activité incompatible avec les exigences d'indépendance, d'impartialité ou de disponibilité requise par une activité exercée à plein temps; toute question soulevée en application de ce paragraphe est tranchée par la Cour.

Article 22 – Election des juges

Les juges sont élus par l'Assemblée parlementaire au titre de chaque Haute Partie contractante, à la majorité des voix exprimées, sur une liste de trois candidats présentés par la Haute Partie contractante.

Article 23 – Durée du mandat et révocation

1. Les juges sont élus pour une durée de neuf ans. Ils ne sont pas rééligibles.

2. Le mandat des juges s’achève dès qu’ils atteignent l’âge de 70 ans.

3. Les juges restent en fonction jusqu’à leur remplacement. Ils continuent toutefois de connaître des affaires dont ils sont déjà saisis.

4. Un juge ne peut être relevé de ses fonctions que si les autres juges décident, à la majorité des deux tiers, que ce juge a cessé de répondre aux conditions requises.

Article 24 - Greffe et rapporteurs

1. La Cour dispose d’un greffe dont les tâches et l’organisation sont fixées par le règlement de la Cour.

2. Lorsqu’elle siège en formation de juge unique, la Cour est assistée de rapporteurs qui exercent leurs fonctions sous l’autorité du président de la Cour. Ils font partie du greffe de la Cour.

Article 25 - Assemblée plénière

La Cour réunie en Assemblée plénière

a) élit, pour une durée de trois ans, son président et un ou deux vice-présidents; ils sont rééligibles ;

b) constitue des chambres pour une période déterminée ;

c) élit les présidents des chambres de la Cour, qui sont rééligibles ;

d) adopte le règlement de la Cour ;

e) élit le greffier et un ou plusieurs greffiers adjoints ;

f) fait toute demande au titre de l’article 26 § 2.

Article 26 - Formations de juge unique, comités,chambres et Grande Chambre

1. Pour l’examen des affaires portées devant elle, la Cour siège en formations de juge unique, en comités de trois juges, en chambres de sept juges et en une Grande Chambre de dix-sept juges.

Les chambres de la Cour constituent les comités pour une période déterminée.

2. A la demande de l’Assemblée plénière de la Cour, le Comité des Ministres peut, par une décision unanime et pour une période déterminée, réduire à cinq le nombre de juges des chambres.

3. Un juge siégeant en tant que juge unique n’examine aucune requête introduite contre la Haute Partie contractante au titre de laquelle ce juge a été élu.

4. Le juge élu au titre d’une Haute Partie contractante partie au litige est membre de droit de la chambre et de la Grande Chambre. En cas d’absence de ce juge, ou lorsqu’il n’est pas en mesure de siéger, une personne choisie par le président de la Cour sur une liste soumise au préalable par cette partie siège en qualité de juge.

5. Font aussi partie de la Grande Chambre, le président de la Cour, les vice-présidents, les présidents des chambres et d'autres juges désignés

conformément au règlement de la Cour. Quand l'affaire est déférée à la Grande Chambre en vertu de l'article 43, aucun juge de la chambre qui a rendu l'arrêt ne peut y siéger, à l'exception du président de la chambre et du juge ayant siégé au titre de la Haute Partie contractante intéressée.

Article 27- Compétence des juges uniques

1. Un juge unique peut déclarer une requête introduite en vertu de l’article 34 irrecevable ou la rayer du rôle lorsqu’une telle décision peut être prise sans examen complémentaire.

2. La décision est définitive.

3. Si le juge unique ne déclare pas une requête irrecevable ou ne la raye pas du rôle, ce juge la transmet à un comité ou à une chambre pour examen complémentaire.

Article 28 - Compétence des comités

1. Un comité saisi d’une requête individuelle introduite en vertu de l’article 34 peut, par vote unanime,

a) la déclarer irrecevable ou la rayer du rôle lorsqu'une telle décision peut être prise sans examen complémentaire ; ou

b) la déclarer recevable et rendre conjointement un arrêt sur le fond lorsque la question relative à l’interprétation ou à l’application de la Convention ou de ses Protocoles qui est à l’origine de l’affaire fait l’objet d’une jurisprudence bien établie de la Cour.

2. Les décisions et arrêts prévus au paragraphe 1 sont définitifs.

3. Si le juge élu au titre de la Haute Partie contractante partie au litige n'est pas membre du comité, ce dernier peut, à tout moment de la procédure, l'inviter à siéger en son sein en lieu et place de l'un de ses membres, en prenant en compte tous facteurs pertinents, y compris la question de savoir si cette partie a contesté l’application de la procédure du paragraphe 1.b).

Article 29 - Décisions des chambres sur la recevabilité et le fond

1. Si aucune décision n’a été prise en vertu des articles 27 ou 28, ni aucun arrêt rendu en vertu de l’article 28, une chambre se prononce sur la recevabilité et le fond des requêtes individuelles introduites en vertu de l’article 34. La décision sur la recevabilité peut être prise de façon séparée.

2. Une chambre se prononce sur la recevabilité et le fond des requêtes étatiques introduites en vertu de l'article 33. Sauf décision contraire de la Cour dans des cas exceptionnels, la décision sur la recevabilité est prise séparément.

Article 30 – Dessaisissement en faveur de la Grande Chambre

Si l'affaire pendante devant une Chambre soulève une question grave relative à l'interprétation de la Convention ou de ses protocoles, ou si la solution d'une question peut conduire à une contradiction avec un arrêt rendu antérieurement par la Cour, la Chambre peut, tant qu'elle n'a pas rendu son arrêt, se dessaisir au profit de la Grande Chambre.

Article 31 - Attributions de la Grande Chambre

La Grande Chambre

a) se prononce sur les requêtes introduites en vertu de l'article 33 ou de l'article 34 lorsque l'affaire lui a été déférée par la chambre en vertu de

l'article 30 ou lorsque l'affaire lui a été déférée en vertu de l'article 43 ;

b) se prononce sur les questions dont la Cour est saisie par le Comité des Ministres en vertu de l’article 46 § 4 ; et

c) examine les demandes d'avis consultatifs introduites en vertu de l'article 47.

Article 32 – Compétence de la Cour

  1. La compétence de la Cour s'étend à toutes les questions concernant l'interprétation et l'application de la Convention et de ses protocoles qui lui seront soumises dans les conditions prévues par les articles 33, 34,46 et 47.

  2. En cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide.

Article 33 – Affaires interétatiques

Toute Haute Partie contractante peut saisir la Cour de tout manquement aux dispositions de la Convention et de ses protocoles qu'elle croira pouvoir être imputé à une autre Haute Partie contractante.

Article 34 – Requêtes individuelles

La Cour peut être saisie d'une requête par toute personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se prétend victime d'une violation par l'une des Hautes Parties contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses protocoles. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à n'entraver par aucune mesure l'exercice efficace de ce droit.

Article 35 - Conditions de recevabilité

1. La Cour ne peut être saisie qu'après l'épuisement des voies de recours internes, tel qu'il est entendu selon les principes de droit international généralement reconnus, et dans un délai de quatre mois à partir de la date de la décision interne définitive.

2. La Cour ne retient aucune requête individuelle introduite en application de l'article 34, lorsque

a) elle est anonyme ; ou

b) elle est essentiellement la même qu'une requête précédemment examinée par la Cour ou déjà soumise à une autre instance internationale d'enquête ou de règlement, et si elle ne contient pas de faits nouveaux.

3. La Cour déclare irrecevable toute requête individuelle introduite en application de l’article 34 lorsqu'elle estime:

a) que la requête est incompatible avec les dispositions de la Convention ou de ses Protocoles, manifestement mal fondée ou abusive ; ou

b) que le requérant n’a subi aucun préjudice important, sauf si le respect des droits de l’homme garantis par la Convention et ses Protocoles exige un examen de la requête au fond.

4. La Cour rejette toute requête qu'elle considère comme irrecevable par application du présent article. Elle peut procéder ainsi à tout stade de la procédure.

Article 36 – Tierce intervention

  1. Dans toute affaire devant une Chambre ou la Grande Chambre, une Haute Partie contractante dont un ressortissant est requérant a le droit de présenter des observations écrites et de prendre part aux audiences.

  2. Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le président de la Cour peut inviter toute Haute Partie contractante qui n'est pas partie à l'instance ou toute personne intéressée autre que le requérant à présenter des observations écrites ou à prendre part aux audiences.

  3. Dans toute affaire devant une chambre ou la Grande Chambre, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe peut présenter des observations écrites et prendre part aux audiences.

Article 37 – Radiation

  1. A tout moment de la procédure, la Cour peut décider de rayer une requête du rôle lorsque les circonstances permettent de conclure:

    1. que le requérant n'entend plus la maintenir; ou

    2. que le litige a été résolu; ou

    3. que, pour tout autre motif dont la Cour constate l'existence, il ne se justifie plus de poursuivre l'examen de la requête.

    Toutefois, la Cour poursuit l'examen de la requête si le respect des droits de l'homme garantis par la Convention et ses protocoles l'exige.

  2. La Cour peut décider la réinscription au rôle d'une requête lorsqu'elle estime que les circonstances le justifient.

Article 38 - Examen contradictoire de l'affaire

La Cour examine l’affaire de façon contradictoire avec les représentants des parties et, s’il y a lieu, procède à une enquête pour la conduite efficace de laquelle les Hautes Parties contractantes intéressées fourniront toutes facilités nécessaires.

Article 39 - Règlements amiables

1. A tout moment de la procédure, la Cour peut se mettre à la disposition des intéressés en vue de parvenir à un règlement amiable de l’affaire s’inspirant du respect des droits de l’homme tels que les reconnaissent la Convention et ses Protocoles.

2. La procédure décrite au paragraphe 1 est confidentielle.

3. En cas de règlement amiable, la Cour raye l’affaire du rôle par une décision qui se limite à un bref exposé des faits et de la solution adoptée.

4. Cette décision est transmise au Comité des Ministres qui surveille l’exécution des termes du règlement amiable tels qu’ils figurent dans la décision.

Article 40 – Audience publique et accès aux documents

  1. L'audience est publique à moins que la Cour n'en décide autrement en raison de circonstances exceptionnelles.

  2. Les documents déposés au greffe sont accessibles au public à moins que le président de la Cour n'en décide autrement.

Article 41 – Satisfaction équitable

Si la Cour déclare qu'il y a eu violation de la Convention ou de ses protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d'effacer qu'imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s'il y a lieu, une satisfaction équitable.

Article 42 – Arrêts des Chambres

Les arrêts des Chambres deviennent définitifs conformément aux dispositions de l'article 44 § 2.

Article 43 – Renvoi devant la Grande Chambre

  1. Dans un délai de trois mois à compter de la date de l'arrêt d'une Chambre, toute partie à l'affaire peut, dans des cas exceptionnels, demander le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre.

  2. Un collège de cinq juges de la Grande Chambre accepte la demande si l'affaire soulève une question grave relative à l'interprétation ou à l'application de la Convention ou de ses protocoles, ou encore une question grave de caractère général.

  3. Si le collège accepte la demande, la Grande Chambre se prononce sur l'affaire par un arrêt.

Article 44 – Arrêts définitifs

  1. L'arrêt de la Grande Chambre est définitif.

  2. L'arrêt d'une Chambre devient définitif:

    1. lorsque les parties déclarent qu'elles ne demanderont pas le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre; ou

    2. trois mois après la date de l'arrêt, si le renvoi de l'affaire devant la Grande Chambre n'a pas été demandé; ou

    3. lorsque le collège de la Grande Chambre rejette la demande de renvoi formulée en application de l'article 43.

  3. L'arrêt définitif est publié.

Article 45 – Motivation des arrêts et décisions

  1. Les arrêts, ainsi que les décisions déclarant des requêtes recevables ou irrecevables, sont motivés.

  2. Si l'arrêt n'exprime pas en tout ou en partie l'opinion unanime des juges, tout juge a le droit d'y joindre l'exposé de son opinion séparée.

Article 46 - Force obligatoire et exécution des arrêts

1. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à se conformer aux arrêts définitifs de la Cour dans les litiges auxquels elles sont parties.

2. L'arrêt définitif de la Cour est transmis au Comité des Ministres qui en surveille l'exécution.

3. Lorsque le Comité des Ministres estime que la surveillance de l’exécution d’un arrêt définitif est entravée par une difficulté d’interprétation de cet arrêt, il peut saisir la Cour afin qu’elle se prononce sur cette question d’interprétation. La décision de saisir la Cour est prise par un vote à la majorité des deux tiers des représentants ayant le droit de siéger au Comité.

4. Lorsque le Comité des Ministres estime qu’une Haute Partie contractante refuse de se conformer à un arrêt définitif dans un litige auquel elle est partie, il peut, après avoir mis en demeure cette partie et par décision prise par un vote à la majorité des deux tiers des représentants ayant le droit de siéger au Comité, saisir la Cour de la question du respect par cette partie de son obligation au regard du paragraphe 1.

5. Si la Cour constate une violation du paragraphe 1, elle renvoie l’affaire au Comité des Ministres afin qu’il examine les mesures à prendre. Si la Cour constate qu’il n’y a pas eu violation du paragraphe 1, elle renvoie l’affaire au Comité des Ministres, qui décide de clore son examen.

Article 47 – Avis consultatifs

  1. La Cour peut, à la demande du Comité des Ministres, donner des avis consultatifs sur des questions juridiques concernant l'interprétation de la Convention et de ses protocoles.

  2. Ces avis ne peuvent porter ni sur les questions ayant trait au contenu ou à l'étendue des droits et libertés définis au titre I de la Convention et dans les protocoles ni sur les autres questions dont la Cour ou le Comité des Ministres pourraient avoir à connaître par suite de l'introduction d'un recours prévu par la Convention.

  3. La décision du Comité des Ministres de demander un avis à la Cour est prise par un vote à la majorité des représentants ayant le droit de siéger au Comité.

Article 48 – Compétence consultative de la Cour

La Cour décide si la demande d'avis consultatif présentée par le Comité des Ministres relève de sa compétence telle que définie par l'article 47.

Article 49 – Motivation des avis consultatifs

  1. L'avis de la Cour est motivé.

  2. Si l'avis n'exprime pas en tout ou en partie l'opinion unanime des juges, tout juge a le droit d'y joindre l'exposé de son opinion séparée.

  3. L'avis de la Cour est transmis au Comité des Ministres.

Article 50 – Frais de fonctionnement de la Cour

Les frais de fonctionnement de la Cour sont à la charge du Conseil de l'Europe.

Article 51 – Privilèges et immunités des juges

Les juges jouissent, pendant l'exercice de leurs fonctions, des privilèges et immunités prévus à l'article 40 du Statut du Conseil de l'Europe et dans les accords conclus au titre de cet article.

Titre III – Dispositions diverses

Article 52 – Enquêtes du Secrétaire Général

Toute Haute Partie contractante fournira sur demande du Secrétaire Général du Conseil de l'Europe les explications requises sur la manière dont son droit interne assure l'application effective de toutes les dispositions de cette Convention.

Article 53 – Sauvegarde des droits de l'homme reconnus

Aucune des dispositions de la présente Convention ne sera interprétée comme limitant ou portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales qui pourraient être reconnus conformément aux lois de toute Partie contractante ou à toute autre Convention à laquelle cette Partie contractante est partie.

Article 54 – Pouvoirs du Comité des Ministres

Aucune disposition de la présente Convention ne porte atteinte aux pouvoirs conférés au Comité des Ministres par le Statut du Conseil de l'Europe.

Article 55 – Renonciation à d'autres modes de règlement des différends

Les Hautes Parties contractantes renoncent réciproquement, sauf compromis spécial, à se prévaloir des traités, conventions ou déclarations existant entre elles, en vue de soumettre, par voie de requête, un différend né de l'interprétation ou de l'application de la présente Convention à un mode de règlement autre que ceux prévus par ladite Convention.

Article 56 – Application territoriale

  1. Tout Etat peut, au moment de la ratification ou à tout autre moment par la suite, déclarer, par notification adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, que la présente Convention s'appliquera, sous réserve du paragraphe 4 du présent article, à tous les territoires ou à l'un quelconque des territoires dont il assure les relations internationales.

  2. La Convention s'appliquera au territoire ou aux territoires désignés dans la notification à partir du trentième jour qui suivra la date à laquelle le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe aura reçu cette notification.

  3. Dans lesdits territoires les dispositions de la présente Convention seront appliquées en tenant compte des nécessités locales.

  4. Tout Etat qui a fait une déclaration conformément au premier paragraphe de cet article, peut, à tout moment par la suite, déclarer relativement à un ou plusieurs des territoires visés dans cette déclaration qu'il accepte la compétence de la Cour pour connaître des requêtes de personnes physiques, d'organisations non gouvernementales ou de groupes de particuliers, comme le prévoit l'article 34 de la Convention.

Article 57 – Réserves

  1. Tout Etat peut, au moment de la signature de la présente Convention ou du dépôt de son instrument de ratification, formuler une réserve au sujet d'une disposition particulière de la Convention, dans la mesure où une loi alors en vigueur sur son territoire n'est pas conforme à cette disposition. Les réserves de caractère général ne sont pas autorisées aux termes du présent article.

  2. Toute réserve émise conformément au présent article comporte un bref exposé de la loi en cause.

Article 58 – Dénonciation

  1. Une Haute Partie contractante ne peut dénoncer la présente Convention qu'après l'expiration d'un délai de cinq ans à partir de la date d'entrée en vigueur de la Convention à son égard et moyennant un préavis de six mois, donné par une notification adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, qui en informe les autres Parties contractantes.

  2. Cette dénonciation ne peut avoir pour effet de délier la Haute Partie contractante intéressée des obligations contenues dans la présente Convention en ce qui concerne tout fait qui, pouvant constituer une violation de ces obligations, aurait été accompli par elle antérieurement à la date à laquelle la dénonciation produit effet.

  3. Sous la même réserve cesserait d'être Partie à la présente Convention toute Partie contractante qui cesserait d'être membre du Conseil de l'Europe.

  4. La Convention peut être dénoncée conformément aux dispositions des paragraphes précédents en ce qui concerne tout territoire auquel elle a été déclarée applicable aux termes de l'article 56.

Article 59 - Signature et ratification

1. La présente Convention est ouverte à la signature des membres du Conseil de l'Europe. Elle sera ratifiée. Les ratifications seront déposées près le Secrétaire général du Conseil de l'Europe.

2. L’Union européenne peut adhérer à la présente Convention.

3. La présente Convention entrera en vigueur après le dépôt de dix instruments de ratification.

4. Pour tout signataire qui la ratifiera ultérieurement, la Convention entrera en vigueur dès le dépôt de l'instrument de ratification.

5. Le Secrétaire général du Conseil de l'Europe notifiera à tous les membres du Conseil de l'Europe l'entrée en vigueur de la Convention, les noms des Hautes Parties contractantes qui l'auront ratifiée, ainsi que le dépôt de tout instrument de ratification intervenu ultérieurement.

Fait à Rome, le 4 novembre 1950, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera des copies certifiées conformes à tous les signataires.

Protocole additionnel n°1 à la Convention de sauvegarde

des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales

Les gouvernements signataires, membres du Conseil de l'Europe,

Résolus à prendre des mesures propres à assurer la garantie collective de droits et libertés autres que ceux qui figurent déjà dans le titre I de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée «la Convention»),

Sont convenus de ce qui suit:

Article 1 – Protection de la propriété

Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international.
Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Article 2 – Droit à l'instruction

Nul ne peut se voir refuser le droit à l'instruction. L'Etat, dans l'exercice des fonctions qu'il assumera dans le domaine de l'éducation et de l'enseignement, respectera le droit des parents d'assurer cette éducation et cet enseignement conformément à leurs convictions religieuses et philosophiques.

Article 3 – Droit à des élections libres

Les Hautes Parties contractantes s'engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans les conditions qui assurent la libre expression de l'opinion du peuple sur le choix du corps législatif.

Article 4 – Application territoriale

Toute Haute Partie contractante peut, au moment de la signature ou de la ratification du présent protocole ou à tout moment par la suite, communiquer au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe une déclaration indiquant la mesure dans laquelle elle s'engage à ce que les dispositions du présent protocole s'appliquent à tels territoires qui sont désignés dans ladite déclaration et dont elle assure les relations internationales.
Toute Haute Partie contractante qui a communiqué une déclaration en vertu du paragraphe précédent peut, de temps à autre, communiquer une nouvelle déclaration modifiant les termes de toute déclaration antérieure ou mettant fin à l'application des dispositions du présent protocole sur un territoire quelconque.
Une déclaration faite conformément au présent article sera considérée comme ayant été faite conformément au paragraphe 1 de l'article 56 de la Convention.

Article 5 – Relations avec la Convention

Les Hautes Parties contractantes considéreront les articles 1, 2, 3 et 4 de ce protocole comme des articles additionnels à la Convention et toutes les dispositions de la Convention s'appliqueront en conséquence.

Article 6 – Signature et ratification

Le présent protocole est ouvert à la signature des membres du Conseil de l'Europe, signataires de la Convention; il sera ratifié en même temps que la Convention ou après la ratification de celle-ci. Il entrera en vigueur après le dépôt de dix instruments de ratification. Pour tout signataire qui le ratifiera ultérieurement, le protocole entrera en vigueur dès le dépôt de l'instrument de ratification.

Les instruments de ratification seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe qui notifiera à tous les membres les noms de ceux qui l'auront ratifié.

Fait à Paris, le 20 mars 1952, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des gouvernements signataires.

Protocole n° 4 à la Convention des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales,

reconnaissant certains droits et libertés autres que ceux figurant déjà dans la Convention

et dans le premier Protocole additionnel à la Convention, tel qu'amendé par le Protocole n° 11

Les gouvernements signataires, membres du Conseil de l'Europe,

Résolus à prendre des mesures propres à assurer la garantie collective de droits et libertés autres que ceux qui figurent déjà dans le titre I de la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée «la Convention») et dans les articles 1 à 3 du premier Protocole additionnel à la Convention, signé à Paris le 20 mars 1952,

Sont convenus de ce qui suit:

Article 1 – Interdiction de l'emprisonnement pour dette

Nul ne peut être privé de sa liberté pour la seule raison qu'il n'est pas en mesure d'exécuter une obligation contractuelle.

Article 2 – Liberté de circulation

  1. Quiconque se trouve régulièrement sur le territoire d'un Etat a le droit d'y circuler librement et d'y choisir librement sa résidence.

  2. Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien.

  3. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet d'autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au maintien de l'ordre public, à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui.

  4. Les droits reconnus au paragraphe 1 peuvent également, dans certaines zones déterminées, faire l'objet de restrictions qui, prévues par la loi, sont justifiées par l'intérêt public dans une société démocratique.

Article 3 – Interdiction de l'expulsion des nationaux

  1. Nul ne peut être expulsé, par voie de mesure individuelle ou collective, du territoire de l'Etat dont il est le ressortissant.

  2. Nul ne peut être privé du droit d'entrer sur le territoire de l'Etat dont il est le ressortissant.

Article 4 – Interdiction des expulsions collectives d'étrangers

Les expulsions collectives d'étrangers sont interdites.

Article 5 – Application territoriale

  1. Toute Haute Partie contractante peut, au moment de la signature ou de la ratification du présent Protocole ou à tout moment par la suite, communiquer au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe une déclaration indiquant la mesure dans laquelle elle s'engage à ce que les dispositions du présent Protocole s'appliquent à tels territoires qui sont désignés dans ladite déclaration et dont elle assure les relations internationales.

  2. Toute Haute Partie contractante qui a communiqué une déclaration en vertu du paragraphe précédent peut, de temps à autre, communiquer une nouvelle déclaration modifiant les termes de toute déclaration antérieure ou mettant fin à l'application des dispositions du présent Protocole sur un territoire quelconque.

  3. Une déclaration faite conformément au présent article sera considérée comme ayant été faite conformément au paragraphe 1 de l'article 56 de la Convention.

  4. Le territoire de tout Etat auquel le présent Protocole s'applique en vertu de sa ratification ou de son acceptation par ledit Etat, et chacun des territoires auxquels le Protocole s'applique en vertu d'une déclaration souscrite par ledit Etat conformément au présent article, seront considérés comme des territoires distincts aux fins des références au territoire d'un Etat faites par les articles 2 et 3.

  5. Tout Etat qui a fait une déclaration conformément au paragraphe 1 ou 2 du présent article peut, à tout moment par la suite, déclarer relativement à un ou plusieurs des territoires visés dans cette déclaration qu'il accepte la compétence de la Cour pour connaître des requêtes de personnes physiques, d'organisations non gouvernementales ou de groupes de particuliers, comme le prévoit l'article 34 de la Convention, au titre des articles 1 à 4 du présent Protocole ou de certains d'entre eux.

Article 6 – Relations avec la Convention

Les Hautes Parties contractantes considéreront les articles 1 à 5 de ce Protocole comme des articles additionnels à la Convention et toutes les dispositions de la Convention s'appliqueront en conséquence.

Article 7 – Signature et ratification

  1. Le présent Protocole est ouvert à la signature des membres du Conseil de l'Europe, signataires de la Convention; il sera ratifié en même temps que la Convention ou après la ratification de celle-ci. Il entrera en vigueur après le dépôt de cinq instruments de ratification. Pour tout signataire qui le ratifiera ultérieurement, le Protocole entrera en vigueur dès le dépôt de l'instrument de ratification.

  2. Les instruments de ratification seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe qui notifiera à tous les membres les noms de ceux qui l'auront ratifié.

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.

Fait à Strasbourg, le 16 septembre 1963, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats signataires.

Protocole n° 7 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme

et des Libertés fondamentales, tel qu'amendé par le Protocole n° 11

Les Etats membres du Conseil de l'Europe, signataires du présent Protocole,

Résolus à prendre de nouvelles mesures propres à assurer la garantie collective de certains droits et libertés par la Convention de Sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée «la Convention»),

Sont convenus de ce qui suit:

Article 1 – Garanties procédurales en cas d'expulsion d'étrangers

  1. Un étranger résidant régulièrement sur le territoire d'un Etat ne peut en être expulsé qu'en exécution d'une décision prise conformément à la loi et doit pouvoir :

    1. faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion,

    2. faire examiner son cas, et

    3. se faire représenter à ces fins devant l'autorité compétente ou une ou plusieurs personnes désignées par cette autorité.

  2. Un étranger peut être expulsé avant l'exercice des droits énumérés au paragraphe 1.a, b et c de cet article lorsque cette expulsion est nécessaire dans l'intérêt de l'ordre public ou est basée sur des motifs de sécurité nationale.

Article 2 – Droit à un double degré de juridiction en matière pénale

  1. Toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation. L'exercice de ce droit, y compris les motifs pour lesquels il peut être exercé, sont régis par la loi.

  2. Ce droit peut faire l'objet d'exceptions pour des infractions mineures telles qu'elles sont définies par la loi ou lorsque l'intéressé a été jugé en première instance par la plus haute juridiction ou a été déclaré coupable et condamné à la suite d'un recours contre son acquittement.

Article 3 – Droit d'indemnisation en cas d'erreur judiciaire

Lorsqu'une condamnation pénale définitive est ultérieurement annulée, ou lorsque la grâce est accordée, parce qu'un fait nouveau ou nouvellement révélé prouve qu'il s'est produit une erreur judiciaire, la personne qui a subi une peine en raison de cette condamnation est indemnisée, conformément à la loi ou à l'usage en vigueur dans l'Etat concerné, à moins qu'il ne soit prouvé que la non-révélation en temps utile du fait inconnu lui est imputable en tout ou en partie.

Article 4 – Droit à ne pas être jugé ou puni deux fois

  1. Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat.

  2. Les dispositions du paragraphe précédent n'empêchent pas la réouverture du procès, conformément à la loi et à la procédure pénale de l'Etat concerné, si des faits nouveaux ou nouvellement révélés ou un vice fondamental dans la procédure précédente sont de nature à affecter le jugement intervenu.

  3. Aucune dérogation n'est autorisée au présent article au titre de l'article 15 de la Convention.

Article 5 – Egalité entre époux

Les époux jouissent de l'égalité de droits et de responsabilités de caractère civil entre eux et dans leurs relations avec leurs enfants au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution. Le présent article n'empêche pas les Etats de prendre les mesures nécessaires dans l'intérêt des enfants.

Article 6 – Application territoriale

  1. Tout Etat peut, au moment de la signature ou au moment du dépôt de son instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation, désigner le ou les territoires auxquels s'appliquera le présent Protocole, en indiquant la mesure dans laquelle il s'engage à ce que les dispositions du présent Protocole s'appliquent à ce ou ces territoires.

  2. Tout Etat peut, à tout autre moment par la suite, par une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l'Europe, étendre l'application du présent Protocole à tout autre territoire désigné dans la déclaration. Le Protocole entrera en vigueur à l'égard de ce territoire le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date de réception de la déclaration par le Secrétaire Général.

  3. Toute déclaration faite en vertu des deux paragraphes précédents pourra être retirée ou modifiée en ce qui concerne tout territoire désigné dans cette déclaration, par notification adressée au Secrétaire Général. Le retrait ou la modification prendra effet le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date de réception de la notification par le Secrétaire Général.

  4. Une déclaration faite conformément au présent article sera considérée comme ayant été faite conformément au paragraphe 1 de l'article 56 de la Convention.

  5. Le territoire de tout Etat auquel le présent Protocole s'applique en vertu de sa ratification, de son acceptation ou de son approbation par ledit Etat, et chacun des territoires auxquels le Protocole s'applique en vertu d'une déclaration souscrite par le dit Etat conformément au présent article, peuvent être considérés comme des territoires distincts aux fins de la référence au territoire d'un Etat faite par l'article 1.

  6. Tout Etat ayant fait une déclaration conformément au paragraphe 1 ou 2 du présent article peut, à tout moment par la suite, déclarer relativement à un ou plusieurs des territoires visés dans cette déclaration qu'il accepte la compétence de la Cour pour connaître des requêtes de personnes physiques, d'organisations non gouvernementales ou de groupes de particuliers, comme le prévoit l'article 34 de la Convention, au titre des articles 1 à 5 du présent Protocole.

Article 7 – Relations avec la Convention

Les Etats Parties considèrent les articles 1 à 6 du présent Protocole comme des articles additionnels à la Convention et toutes les dispositions de la Convention s'appliquent en conséquence.

Article 8 – Signature et ratification

Le présent Protocole est ouvert à la signature des Etats membres du Conseil de l'Europe qui ont signé la Convention. Il sera soumis à ratification, acceptation ou approbation. Un Etat membre du Conseil de l'Europe ne peut ratifier, accepter ou approuver le présent Protocole sans avoir simultanément ou antérieurement ratifié la Convention. Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 9 – Entrée en vigueur

  1. Le présent Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date à laquelle sept Etats membres du Conseil de l'Europe auront exprimé leur consentement à être liés par le Protocole conformément aux dispositions de l'article 8.

  2. Pour tout Etat membre qui exprimera ultérieurement son consentement à être lié par le Protocole, celui-ci entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de deux mois après la date du dépôt de l'instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

Article 10 – Fonctions du dépositaire

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera à tous les Etats membres du Conseil de l'Europe :

  1. toute signature;

  2. le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;

  3. toute date d'entrée en vigueur du présent Protocole conformément à ses articles 6 et 9;

  4. tout autre acte, notification ou déclaration ayant trait au présent Protocole.

En foi de quoi, les soussignés dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.

Fait à Strasbourg, le 22 novembre 1984, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire, qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des États membres du Conseil de l'Europe.

Protocole n° 15 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme

Préambule

Les Etats membres du Conseil de l’Europe et les autres Hautes Parties contractantes à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme et des Libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée « la Convention »), signataires du présent Protocole,

Vu la Déclaration adoptée lors de la Conférence de haut niveau sur l’avenir de la Cour européenne des Droits de l’Homme, tenue à Brighton les 19 et 20 avril 2012, ainsi que les Déclarations adoptées lors des Conférences tenues à Interlaken les 18 et 19 février 2010 et à İzmir les 26 et 27 avril 2011 ;

Vu l’Avis n° 283 (2013) adopté par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 26 avril 2013 ;

Considérant qu’il est nécessaire de veiller à ce que la Cour européenne des Droits de l’Homme (ci-après dénommée « la Cour ») continue de jouer son rôle prééminent dans la protection des droits de l’homme en Europe,

Sont convenus de ce qui suit :

Article 1

A la fin du préambule de la Convention, un nouveau considérant est ajouté et se lit comme suit :

« Affirmant qu’il incombe au premier chef aux Hautes Parties contractantes, conformément au principe de subsidiarité, de garantir le respect des droits et libertés définis dans la présente Convention et ses protocoles, et que, ce faisant, elles jouissent d’une marge d’appréciation, sous le contrôle de la Cour européenne des Droits de l’Homme instituée par la présente Convention, »

Article 2

1A l’article 21 de la Convention, un nouveau paragraphe 2 est inséré et se lit comme suit :

« Les candidats doivent être âgés de moins de 65 ans à la date à laquelle la liste de trois candidats est attendue par l’Assemblée parlementaire, en vertu de l’article 22. »

2Les paragraphes 2 et 3 de l’article 21 de la Convention deviennent respectivement les paragraphes 3 et 4 de l’article 21.

3Le paragraphe 2 de l’article 23 de la Convention est supprimé. Les paragraphes 3 et 4 de l’article 23 deviennent respectivement les paragraphes 2 et 3 de l’article 23.

Article 3

A l’article 30 de la Convention, les mots « à moins que l’une des parties ne s’y oppose » sont supprimés.

Article 4

A l’article 35, paragraphe 1, de la Convention, les mots « dans un délai de six mois » sont remplacés par les mots « dans un délai de quatre mois ».

Article 5

A l’article 35, paragraphe 3, alinéa b, de la Convention, les mots « et à condition de ne rejeter pour ce motif aucune affaire qui n’a pas été dûment examinée par un tribunal interne » sont supprimés.

Dispositions finales et transitoires

Article 6

1Le présent Protocole est ouvert à la signature des Hautes Parties contractantes à la Convention, qui peuvent exprimer leur consentement à être liées par :

ala signature sans réserve de ratification, d'acceptation ou d'approbation ; ou

bla signature sous réserve de ratification, d'acceptation ou d'approbation, suivie de ratification, d'acceptation ou d'approbation.

2Les instruments de ratification, d'acceptation ou d'approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe.

Article 7

Le présent Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l'expiration d'une période de trois mois après la date à laquelle toutes les Hautes Parties contractantes à la Convention auront exprimé leur consentement à être liées par le Protocole, conformément aux dispositions de l'article 6.

Article 8

1Les amendements introduits par l’article 2 du présent Protocole s’appliquent uniquement aux candidats figurant sur les listes soumises à l’Assemblée parlementaire par les Hautes Parties contractantes, en vertu de l’article 22 de la Convention, après l’entrée en vigueur du présent Protocole.

2L’amendement introduit par l’article 3 du présent Protocole ne s’applique pas aux affaires pendantes dans lesquelles l’une des parties s’est opposée, avant l’entrée en vigueur du présent Protocole, à une proposition d’une chambre de la Cour de se dessaisir au profit de la Grande Chambre.
 

3L’article 4 du présent Protocole entrera en vigueur à l’expiration d’une période de six mois après la date d’entrée en vigueur du présent Protocole. L’article 4 du présent Protocole ne s’applique pas aux requêtes au regard desquelles la décision définitive au sens de l’article 35, paragraphe 1, de la Convention a été prise avant la date d’entrée en vigueur de l’article 4 du présent Protocole.

4Toutes les autres dispositions du présent Protocole s’appliquent à la date de son entrée en vigueur, conformément aux dispositions de l’article 7.

Article 9

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil de l’Europe et aux autres Hautes Parties contractantes à la Convention :

atoute signature;

ble dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation;

cla date d'entrée en vigueur du présent Protocole, conformément à l'article 7; et

dtout autre acte, notification ou communication ayant trait au présent Protocole.

 

En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.

Fait à Strasbourg, le 24 juin 2013, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l'Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l’Europe et aux autres Hautes Parties contractantes à la Convention.

 

Protocole n° 16 à la Convention de sauvegarde des Droits de l'Homme

Le protocole n° 16 permet aux Cours suprêmes des 47 Etats membres du Conseil de l'Europe de poser des questions à la CEDH.

La CEDH a voulu créer un réseau des juridictions suprêmes européens et n'a rien à refuser à la Cour de Cassation française et au Conseil d'État français.

En ce sens Monsieur le Président de la CEDH déclare dans son discours de rentrée solennelle du 26 janvier 2018 :

"À cet égard, l’un des éléments majeurs de notre rapprochement est certainement le Réseau des cours supérieures qui a connu, depuis sa création, un extraordinaire succès. Lancé ici même, avec deux juridictions seulement, le Conseil d’État et la Cour de cassation de France, en octobre 2015, il peut aujourd’hui s’enorgueillir de la participation de 64 cours supérieures. Cela témoigne de l’intérêt considérable des cours supérieures pour cet échange d’informations. Puisque je mentionne le Conseil d’État et la Cour de cassation, permettez-moi de remercier les Chefs de ces Cours, le Vice-Président Jean-Marc Sauvé, le Premier Président Bertrand Louvel, et le Procureur Général Jean-Claude Marin, qui ont contribué à la création du Réseau.

J’adresse un salut tout particulier au Vice-Président Jean-Marc Sauvé et au Procureur Général Jean-Claude Marin qui assistent pour la dernière fois, dans leur qualité présente, à cette audience de rentrée. Au fil des ans, c’est plus que des liens institutionnels que nous avons noués avec ces hauts magistrats : une relation d’amitié et de fidélité.

Le Réseau, organe d’échange permanent, est désormais l’un des outils de la subsidiarité, en attendant l’entrée en vigueur du Protocole n° 16 qui institutionnalisera nos rapports. Il ne manque d’ailleurs plus que 2 ratifications pour que cet instrument entre en vigueur et c’est donc l’un de nos vœux pour 2018."

Le 1er août 2018, est entré en vigueur le Protocole n° 16 à la Convention européenne des droits de l’homme pour les 10 États membres qui l’ont signé et ratifié : l’Albanie, l’Arménie, l’Estonie, la Finlande, la France, la Géorgie, la Lituanie, Saint-Marin, la Slovénie et l’Ukraine.

Le Décret n° 2018-989 du 13 novembre 2018 porte publication du protocole n° 16 à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, signé à Strasbourg le 2 octobre 2013.

Le Protocole n° 16 permet à de hautes juridictions telles que désignées par les États membres concernés d’adresser à la Cour des demandes d’avis consultatifs sur des questions de principe relatives à l’interprétation ou à l’application des droits et libertés définis par la Convention ou ses protocoles.

Ces avis consultatifs, qui seront rendus par la Grande Chambre, seront motivés et non contraignants. Les demandes d’avis consultatifs interviendront dans le cadre d’affaires pendantes devant la juridiction nationale. La Cour disposera d’un pouvoir discrétionnaire pour accepter ou non une telle demande.

Le Président de la Cour européenne des droits de l’homme, Guido Raimondi a déclaré :

« L’entrée en vigueur du Protocole n° 16 va renforcer le dialogue entre la Cour européenne des droits de l’homme et les juridictions supérieures nationales. C’est une étape fondamentale dans l’histoire de la Convention européenne des droits de l’homme et un développement majeur de la protection des droits de l’homme en Europe. C’est aussi un nouveau défi pour notre Cour ».

Dix autres pays ont signé le Protocole, mais ne l’ont pas à ce jour ratifié : Andorre, la Bosnie-Herzégovine, la Grèce, Italie, la Norvège, les Pays-Bas, la République de Moldova, la Roumanie, la Slovaquie et la Turquie.

Préambule

Les Etats membres du Conseil de l’Europe et les autres Hautes Parties contractantes à la Convention de sauvegarde des Droits de l’Homme et des Libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée « la Convention »), signataires du présent Protocole, Vu les dispositions de la Convention, notamment l’article 19 établissant la Cour européenne des droits de l’homme (ci-après dénommée « la Cour ») ; Considérant que l’extension de la compétence de la Cour pour donner des avis consultatifs renforcera l’interaction entre la Cour et les autorités nationales, et consolidera ainsi la mise en œuvre de la Convention, conformément au principe de subsidiarité ; Vu l’Avis n° 285 (2013) adopté par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe le 28 juin 2013, Sont convenus de ce qui suit :

Article 1

1 Les plus hautes juridictions d’une Haute Partie contractante, telles que désignées conformément à l’article 10, peuvent adresser à la Cour des demandes d’avis consultatifs sur des questions de principe relatives à l’interprétation ou à l’application des droits et libertés définis par la Convention ou ses protocoles.

2 La juridiction qui procède à la demande ne peut solliciter un avis consultatif que dans le cadre d’une affaire pendante devant elle.

3 La juridiction qui procède à la demande motive sa demande d’avis et produit les éléments pertinents du contexte juridique et factuel de l’affaire pendante.

Article 2

1 Un collège de cinq juges de la Grande Chambre se prononce sur l’acceptation de la demande d’avis consultatif au regard de l’article 1. Tout refus du collège d’accepter la demande est motivé.

2 Lorsque le collège accepte la demande, la Grande Chambre rend un avis consultatif.

3 Le collège et la Grande Chambre, visés aux paragraphes précédents, comprennent de plein droit le juge élu au titre de la Haute Partie contractante dont relève la juridiction qui a procédé à la demande. En cas d’absence de ce juge, ou lorsqu’il n’est pas en mesure de siéger, une personne choisie par le Président de la Cour sur une liste soumise au préalable par cette Partie siège en qualité de juge.

Article 3

 Le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et la Haute Partie contractante dont relève la juridiction qui a procédé à la demande ont le droit de présenter des observations écrites et de prendre part aux audiences. Le Président de la Cour peut, dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, inviter toute autre Haute Partie contractante ou personne à présenter également des observations écrites ou à prendre part aux audiences.

Article 4

1 Les avis consultatifs sont motivés.

2 Si l’avis consultatif n’exprime pas, en tout ou en partie, l’opinion unanime des juges, tout juge a le droit d’y joindre l’exposé de son opinion séparée.

3 Les avis consultatifs sont transmis à la juridiction qui a procédé à la demande et à la Haute Partie contractante dont cette juridiction relève.

4 Les avis consultatifs sont publiés.

Article 5

Les avis consultatifs ne sont pas contraignants.

Article 6

Les Hautes Parties contractantes considèrent les articles 1 à 5 du présent Protocole comme des articles additionnels à la Convention, et toutes les dispositions de la Convention s’appliquent en conséquence.

Article 7

1 Le présent Protocole est ouvert à la signature des Hautes Parties contractantes à la Convention, qui peuvent exprimer leur consentement à être liées par :

a) la signature sans réserve de ratification, d’acceptation ou d’approbation ; ou

b) la signature sous réserve de ratification, d’acceptation ou d’approbation, suivie de ratification, d’acceptation ou d’approbation.

2 Les instruments de ratification, d’acceptation ou d’approbation seront déposés près le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe.

Article 8

1 Le présent Protocole entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date à laquelle dix Hautes Parties contractantes à la Convention auront exprimé leur consentement à être liées par le Protocole conformément aux dispositions de l’article 7.

2 Pour toute Haute Partie contractante à la Convention qui exprimera ultérieurement son consentement à être liée par le présent Protocole, celui-ci entrera en vigueur le premier jour du mois qui suit l’expiration d’une période de trois mois après la date de l’expression de son consentement à être liée par le Protocole conformément aux dispositions de l’article 7.

Article 9

Aucune réserve n’est admise aux dispositions du présent Protocole au titre de l’article 57 de la Convention.

Article 10 Chaque Haute Partie contractante à la Convention indique, au moment de la signature ou du dépôt de son instrument de ratification, d’acceptation ou d’approbation, au moyen d’une déclaration adressée au Secrétaire Général du Conseil de l’Europe, quelles juridictions elle désigne aux fins de l’article 1, paragraphe 1, du présent Protocole. Cette déclaration peut être modifiée à tout moment de la même manière.

Article 11

Le Secrétaire Général du Conseil de l'Europe notifiera aux Etats membres du Conseil de l’Europe et aux autres Hautes Parties contractantes à la Convention :

a) toute signature ;

b) le dépôt de tout instrument de ratification, d'acceptation ou d'approbation ;

c) toute date d'entrée en vigueur du présent Protocole conformément à l’article 8 ;

d) toute déclaration faite en vertu de l’article 10 ; et e tout autre acte, notification ou communication ayant trait au présent Protocole. En foi de quoi, les soussignés, dûment autorisés à cet effet, ont signé le présent Protocole.

Fait à Strasbourg, le 2 octobre 2013, en français et en anglais, les deux textes faisant également foi, en un seul exemplaire qui sera déposé dans les archives du Conseil de l’Europe. Le Secrétaire Général du Conseil de l’Europe en communiquera copie certifiée conforme à chacun des Etats membres du Conseil de l’Europe et aux autres Hautes Parties contractantes à la Convention.

LA COMPETENCE ET LA MATIERE DE LA Conv EDH

La Convention européenne des droits de l’homme ne s’applique pas aux demandes de visas soumises aux ambassades et consulats

Grande Chambre M.N. et autres c. Belgique du 5 mai 2020 requête n° 3599/18

L’affaire concerne un couple de ressortissants syriens et leurs deux enfants qui se virent refuser des visas de court séjour qu’ils avaient sollicités auprès de l’ambassade de Belgique à Beyrouth en vue de demander l’asile en Belgique. Les requérants se plaignaient d’une atteinte à leurs droits garantis par les articles 3 (interdiction de la torture, des traitements inhumains ou dégradants), 13 (droit à un recours effectif) et 6 § 1 (droit à un procès équitable) de la Convention européenne des droits de l’homme. La Cour rappelle que l’article 1 er (obligation de respecter les droits de l’homme) de la Convention européenne limite son champ d’application aux personnes relevant de la juridiction des États parties à la Convention. En l’espèce, elle constate que les requérants ne relevaient pas de la juridiction de la Belgique au titre des faits dénoncés par eux sur le terrain des articles 3 et 13 de la Convention. La Cour estime aussi que l’article 6 § 1 de la Convention ne s’applique pas en l’espèce. En effet, l’entrée sur le territoire belge, qui aurait résulté de l’octroi des visas, ne met pas en jeu un droit de caractère « civil » au sens de l’article 6 § 1. La Cour note enfin que cette conclusion ne fait pas obstacle aux efforts entrepris par les États parties pour faciliter l’accès aux procédures d’asile par le biais de leurs ambassades et/ou représentations consulaires.

FAITS

Les requérants sont un couple de ressortissants syriens et leurs deux enfants. Ils résident à Alep (Syrie). Le 22 août 2016, ils se rendirent à l’ambassade de Belgique à Beyrouth pour y déposer des demandes de visas de court séjour en vue de demander l’asile en Belgique par la suite. Se fondant sur l’article 25 du code communautaire des visas, les requérants invoquèrent des raisons humanitaires impérieuses. Le 13 septembre 2016, l’Office des étrangers (OE) refusa de leur délivrer les visas qu’ils avaient sollicités. Les requérants saisirent le Conseil du contentieux des étrangers (CCE) en extrême urgence. Le 7 octobre 2016, le CCE suspendit l’exécution des décisions de l’OE. Il enjoignit l’État de prendre de nouvelles décisions. Les 10 et 17 octobre 2016, l’OE rendit de nouvelles décisions de refus de délivrance de visas, dont l’exécution fut à nouveau suspendue par le CCE. Le 20 octobre 2016, le CCE enjoignit l’État de délivrer aux requérants un laissez-passer ou un visa valable trois mois afin de sauvegarder leurs intérêts. Par la suite, les requérants introduisirent des recours en annulation contre les décisions de l’OE (du 10 et 17 octobre 2016) mais le CCE les rejeta, étant donné que les décisions de refus de délivrance de visas du 13 septembre 2016 étaient devenues définitives. Ensuite, les autorités belges refusant d’exécuter l’arrêt du CCE du 20 octobre 2016, les requérants saisirent le tribunal de première instance francophone de Bruxelles (TPI), lequel ordonna à l’État de respecter ledit arrêt sous peine d’astreinte. Le 7 décembre 2016, la cour d’appel de Bruxelles rendit un arrêt confirmant la condamnation de l’État à exécuter l’arrêt du CCE du 20 octobre 2016 sous peine d’astreinte. Toutefois, le 30 juin 2017, étant donné l’issue des recours en annulation devant le CCE, la cour d’appel jugea que l’arrêt du 7 décembre 2016 n’était plus d’actualité et qu’aucune astreinte n’était due.

Articles 3 (interdiction de la torture, des traitements inhumains ou dégradants) et 13 (droit à un recours effectif)

L’article 1 er (obligation de respecter les droits de l’homme) de la Convention limite son champ d’application aux personnes relevant de la juridiction des États parties à la Convention. La Cour estime donc qu’elle doit vérifier si les requérants relevaient de la juridiction de la Belgique. La Cour relève que les décisions litigieuses ont été prises par l’administration belge en Belgique. Elles venaient en réponse à des demandes de visas que les requérants avaient remises aux services consulaires de l’ambassade de Belgique à Beyrouth en vue d’être autorisés à entrer en Belgique pour y demander l’asile et échapper à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention auxquels ils disaient être exposés à Alep. Les décisions refusant aux requérants les visas demandés ont ensuite à nouveau transité par les services consulaires de l’ambassade qui en ont informé les requérants. Pour la Cour, en statuant sur les demandes de visas, les autorités belges ont pris des décisions portant sur les conditions d’entrée sur le territoire belge et ont exercé une prérogative de puissance publique. Toutefois, à lui seul, ce constat ne suffit pas à attirer les requérants sous la juridiction « territoriale » de la Belgique au sens de l’article 1 er de la Convention. Pour déterminer si la Convention s’applique en l’espèce, la Cour recherche en outre s’il existe des circonstances exceptionnelles propres à conclure à un exercice extraterritorial par la Belgique de sa juridiction à l’égard des requérants. Il s’agit d’une question de fait qui nécessite de s’interroger sur la nature du lien entre les requérants et l’État défendeur et de déterminer si celui-ci a effectivement exercé son autorité ou son contrôle sur eux. À cet égard, la Cour précise qu’il importe peu que les agents diplomatiques n’aient eu, comme en l’espèce, qu’un rôle de « boîte aux lettres » ou de savoir à qui, de l’administration belge sur le territoire national ou des agents diplomatiques en poste à l’étranger, les décisions sont à attribuer. La Cour observe que les requérants ne se sont jamais trouvés sur le territoire national de la Belgique ; qu’ils ne revendiquent aucune vie familiale ou privée préexistante avec ce pays ; qu’ils n’étaient pas des ressortissants belges demandant à bénéficier de la protection de leur ambassade ; et que les agents diplomatiques n’ont à aucun moment exercé un contrôle de fait sur la personne des requérants. Ils ont librement choisi de se présenter à l’ambassade de Belgique à Beyrouth, comme ils auraient d’ailleurs pu s’orienter vers une autre ambassade, et d’y déposer leurs demandes de visa. Ils ont ensuite pu librement quitter les locaux de l’ambassade belge sans rencontrer aucune entrave. La Cour rappelle que la situation des requérants est fondamentalement différente des affaires d’éloignement que la Cour a examinées depuis l’arrêt Soering2 , dans lesquelles elle a admis que la responsabilité d’un État partie pouvait être engagée au titre de l’article 3 de la Convention quand la décision qu’il a prise d’éloigner un individu expose ce dernier à un risque réel d’être soumis à un traitement contraire à l’article 3 dans le pays de destination. À la différence des requérants, dans les cas de refoulement du territoire, les intéressés se trouvent par hypothèse sur le territoire de l’État concerné ou à la frontière de celui-ci et relèvent dès lors manifestement de sa juridiction. La Cour examine enfin le point de savoir si le fait d’avoir engagé une procédure au niveau national peut constituer une circonstance exceptionnelle suffisante pour déclencher, unilatéralement, un lien juridictionnel extraterritorial entre les requérants et la Belgique, au sens de l’article 1 er de la Convention. Dans l’affaire Abdul Wahab Khan3 , la Cour a clairement jugé que le simple fait pour un requérant d’initier une procédure dans un État partie avec lequel il n’a aucun lien de rattachement ne pouvait suffire à établir la juridiction de cet État à son égard. Pour la Cour, en décider autrement aboutirait à consacrer une application quasi-universelle de la Convention sur la base du choix unilatéral de tout individu, où qu’il se trouve dans le monde, et donc à créer une obligation illimitée pour les États parties d’autoriser l’entrée sur leur territoire de toute personne qui risquerait de subir un traitement contraire à la Convention en dehors de leur juridiction. Aux yeux de la Cour, une telle extension du champ d’application de la Convention aurait en outre pour effet de réduire à néant le principe bien établi en droit international et reconnu par la Cour selon lequel les États parties ont le droit de contrôler l’entrée, le séjour et l’éloignement des nonnationaux, sans préjudice des engagements découlant pour eux des traités, y compris la Convention. Dans ce contexte, la Cour note que la Cour de Justice de l’Union européenne a jugé dans une affaire similaire qu’en l’état du droit actuel de l’Union européenne, la délivrance de visas de long séjour relevait du seul droit national des États membres. Par conséquent, la Cour estime que les requérants ne relevaient pas de la juridiction de la Belgique au titre des faits dénoncés par eux sur le terrain des articles 3 et 13 de la Convention. La Cour note enfin que cette conclusion ne fait pas obstacle aux efforts entrepris par les États parties pour faciliter l’accès aux procédures d’asile par le biais de leurs ambassades et/ou représentations consulaires (voir, N.D. et N.T. c. Espagne4 , § 222).

Articles 6 § 1 (droit à un procès équitable)

Le gouvernement belge fait valoir que le grief des requérants, formellement dirigé contre la nonexécution de l’arrêt du 7 décembre 2016 qui condamne l’État belge à exécuter, sous peine d’astreinte, l’arrêt du CCE du 20 octobre 2016, porte en réalité sur les décisions relatives à l’obtention de visas auxquelles l’article 6 § 1 ne s’applique pas. Les requérants soutiennent que leur grief porte sur un droit subjectif de caractère civil, reconnu par l’arrêt de la cour d’appel du 7 décembre 2016, à savoir celui d’obtenir l’exécution d’une décision de justice obligatoire et exécutoire et qu’il soit mis fin au préjudice résultant de sa non-exécution. La Cour est d’avis que l’entrée sur le territoire belge qui aurait résulté de l’octroi des visas ne met pas en jeu un droit de caractère « civil » au sens de l’article 6 § 1 de la Convention, au même titre que toutes les décisions relatives à l’immigration, l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers. Or, il est de jurisprudence constante que ces matières sont hors du champ de l’article 6 de la Convention. Il est vrai que la procédure suivie ensuite par les requérants devant la cour d’appel de Bruxelles, en vue d’obtenir l’exécution de l’arrêt du CCE du 20 octobre 2016, portait sur le refus de l’État d’exécuter une décision juridictionnelle en matière administrative et que la cour d’appel, pour établir sa juridiction au regard du droit interne, a considéré que la contestation portée devant elle avait un caractère civil. Cela étant, la Cour ne voit dans l’objet de cette action que le prolongement de la procédure en contestation au fond des décisions de refus des visas par l’administration. En tout état de cause, la Cour estime que le contentieux sous-jacent n’acquiert pas une nature « civile » du seul fait que son exécution est poursuivie en justice et donne lieu à une décision judiciaire. Par conséquent, l’article 6 § 1 de la Convention ne s’applique pas en l’espèce.

CEDH

a)      Rappel de la jurisprudence applicable

96.  La Cour rappelle que l’article 1er de la Convention limite son champ d’application aux « personnes » relevant de la « juridiction » des États parties à la Convention.

97.  L’exercice par l’État défendeur de sa « juridiction » est une condition sine qua non pour que celui-ci puisse être tenu pour responsable des actes ou omissions à lui attribuables qui sont à l’origine d’une allégation de violation des droits et libertés énoncés dans la Convention (Al‑Skeini et autres, précité, § 130, et Güzelyurtlu et autres c. Chypre et Turquie [GC], no 36925/07, § 178, 29 janvier 2019). La question de savoir si cet État est effectivement responsable des actes ou omissions à l’origine des griefs des requérants au regard de la Convention est une question distincte et relève du fond de l’affaire (Loizidou c. Turquie (exceptions préliminaires), 23 mars 1995, §§ 61 et 64, série A no 310, et Güzelyurtlu et autres, précité, § 197).

98.  En ce qui concerne le sens à donner à la notion de « juridiction » au sens de l’article 1er de la Convention, la Cour a souligné que, du point de vue du droit international public, la compétence juridictionnelle d’un État est principalement territoriale (Güzelyurtlu et autres, précité, § 178 ; voir aussi Banković et autres, décision précitée, §§ 59-61). Elle est présumée s’exercer normalement sur l’ensemble du territoire de l’État concerné (Assanidzé c. Géorgie [GC], no 71503/01, § 139, CEDH 2004-II).

99.  Conformément à l’article 31 § 1 de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, la Cour a interprété les termes « relevant de leur juridiction » en prenant comme point de départ le sens ordinaire devant être attribué à ces termes et en tenant compte du contexte ainsi que de l’objet et du but de la Convention. Or, si le droit international n’exclut pas un exercice extraterritorial de sa juridiction par un État, les éléments ordinairement cités pour fonder pareil exercice (nationalité, pavillon, notamment) sont en règle générale définis et limités par les droits territoriaux souverains des autres États concernés (Banković et autres, précité, §§ 56 et 59).

100.  Cette conception territoriale de la juridiction des États parties trouve un appui dans les travaux préparatoires de la Convention (Banković et autres, décision précitée, §§ 19-21 et 63). En effet, le texte rédigé par la commission des affaires juridiques et administratives de l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe prévoyait initialement, dans ce qui allait devenir l’article 1er de la Convention, que les « États membres s’engage[aie]nt à garantir à toute personne résidant sur leur territoire les droits (...) ». Les termes « résidant sur leur territoire » ont toutefois été remplacés par les termes « relevant de leur juridiction », car la notion de résidence a été considérée comme trop restrictive et susceptible de différentes interprétations selon les législations nationales.

101.  Cela étant, la Cour a reconnu que, par exception au principe de territorialité, des actes des États parties accomplis ou produisant des effets en dehors de leur territoire pouvaient s’analyser en l’exercice par eux de leur juridiction au sens de l’article 1er de la Convention. Il s’agit là d’une jurisprudence bien établie (voir parmi d’autres : Ilaşcu et autres c. Moldova et Russie [GC], no 48787/99, § 314, CEDH 2004-VII, Medvedyev et autres c. France [GC], no 3394/03, § 64, CEDH 2010, Al-Skeini et autres, précité, § 131, et Güzelyurtlu et autres, précité, § 178).

102.  Dans chaque cas, c’est au regard des faits particuliers de l’affaire qu’a été appréciée l’existence de circonstances exceptionnelles justifiant de conclure à un exercice extraterritorial par l’État concerné de sa juridiction (Banković et autres, décision précitée, § 61, Al-Skeini et autres, précité, § 132, Hirsi Jamaa et autres, précité, § 172, et Catan et autres c. République de Moldova et Russie [GC], nos 43370/04 et 2 autres, § 103, CEDH 2012 (extraits)).

103. Le principe en vertu duquel la juridiction d’un État partie est limitée à son propre territoire connaît une exception quand cet État exerce un contrôle effectif sur une zone située en dehors de son territoire. L’obligation d’assurer dans une telle zone le respect des droits et libertés garantis par la Convention découle du fait de ce contrôle, qu’il s’exerce directement, par l’intermédiaire des forces armées de l’État ou par le biais d’une administration locale subordonnée (pour un résumé de jurisprudence relative à ces situations, voir: Al-Skeini et autres, précité, §§ 138‑140 et 142 ; pour des applications plus récentes de cette jurisprudence, voir : Catan et autres, précité, §§ 121-122, Chiragov et autres c. Arménie [GC], no 13216/05, § 186, CEDH 2015, Mozer, §§ 110-111, précité, et Sandu et autres c. République de Moldova et Russie, nos 21034/05 et 7 autres, §§ 36‑38, 17 juillet 2018).

104.  La Commission puis la Cour ont aussi conclu à l’exercice extraterritorial par un État de sa juridiction quand il fait usage, dans une zone située hors de son territoire, de prérogatives de puissance publique telles que le pouvoir et la responsabilité s’agissant du maintien de la sécurité (X. et Y. c. Suisse, décision précitée, Drozd et Janousek c. France et Espagne, 26 juin 1992, §§ 91-98, série A no 240, Gentilhomme, Schaff‑Benhadji et Zerouki c. France, nos 48205/99 et 2 autres, § 20, 14 mai 2002, Al‑Skeini et autres, précité, §§ 143-150, et Al-Jedda c. Royaume-Uni [GC], no 27021/08, §§ 75‑96, CEDH 2011).

105.  Ensuite, le recours à la force par des agents d’un État opérant hors de son territoire peut, dans certaines circonstances, faire passer sous la juridiction de cet État toute personne se retrouvant sous le contrôle de ces agents (pour un résumé de jurisprudence relative à ces situations, voir : Al‑Skeini et autres, précité, § 136). Il en est allé ainsi dans le cas de personnes remises entre les mains d’agents de l’État à l’extérieur de ses frontières (Öcalan c. Turquie [GC], no 46221/99, § 91, CEDH 2005‑IV). De même, la juridiction extraterritoriale a été admise à raison d’actes par des agents de l’État qui, à travers un contrôle sur des lieux, des bâtiments, un aéronef ou un navire où des personnes étaient détenues, exerçaient un pouvoir et un contrôle physiques sur celles-ci (Issa et autres c. Turquie, no 31821/96, §§ 72‑82, 16 novembre 2004, Al-Saadoon et Mufdhi c. Royaume-Uni (déc.), no 61498/08, §§ 86‑89, 30 juin 2009, Medvedyev et autres, précité, §§ 62‑67, Hirsi Jamaa, précité, §§ 76-82, et Hassan c. Royaume‑Uni [GC], no 29750/09, §§ 75‑80, CEDH 2014).

106.  Ainsi que la Cour l’a rappelé dans l’arrêt Al-Skeini et autres (précité, § 134), la juridiction d’un État partie peut en outre naître des actes ou omissions de ses agents diplomatiques ou consulaires quand ceux-ci, au titre de leurs fonctions, exercent à l’étranger leur autorité à l’égard de ressortissants de cet État ou de leurs biens (X. c. Allemagne, décision précitée, X c. Royaume-Uni, décision précitée, et S. c. Allemagne, no 10686/83, décision de la Commission du 5 octobre 1984, D.R. 40, p. 191) ou quand ils exercent un pouvoir et un contrôle physiques sur certaines personnes (M. c. Danemark, décision précitée, p. 193).

107. Enfin, des circonstances particulières d’ordre procédural ont pu justifier l’application de la Convention en raison d’événements qui ont eu lieu en dehors du territoire de l’État défendeur. Ainsi, à propos d’une procédure civile en dommages-intérêts initiée par les requérants devant les juridictions italiennes sur le fondement du droit national, en raison du décès de leurs proches à la suite de frappes aériennes conduites par l’alliance de l’OTAN contre la République fédérale de Yougoslavie, la Cour a estimé que, malgré le caractère extraterritorial des faits à l’origine de l’action, cette procédure relevait de la juridiction de l’Italie, laquelle était dès lors tenue de garantir, dans le cadre de celle-ci, le respect des droits protégés par l’article 6 de la Convention (Markovic et autres c. Italie, (déc.), no 1398/03, 12 juin 2003, et Markovic et autres c. Italie [GC], précité, §§ 49‑55). Plus récemment, s’agissant de décès survenus en dehors du territoire de l’État défendeur, la Cour a considéré que le fait pour celui-ci d’avoir entamé une enquête pénale au titre de ces faits établissait à l’égard des proches de la victime un lien juridictionnel aux fins de l’article 1er de la Convention entraînant l’obligation pour cet État de satisfaire aux exigences procédurales de l’article 2 (Güzelyurtlu et autres, précité, § 188).

108.  En revanche, dans l’affaire Abdul Wahab Khan précitée, la Cour a rejeté l’argument tiré de la procédure initiée par le requérant, ressortissant pakistanais se trouvant au Pakistan, devant la Commission britannique spéciale de recours en matière d’immigration (« SIAC ») en vue de contester la décision de révocation de son autorisation de séjour au Royaume-Uni. La Cour a considéré qu’à défaut d’autres critères de rattachement, le fait pour le requérant d’avoir initié cette procédure ne suffisait pas à établir la juridiction du Royaume-Uni s’agissant du risque allégué par le requérant de subir au Pakistan des traitements contraires à l’article 3 de la Convention (Abdul Wahab Khan, décision précitée, § 28).

109.  À titre de comparaison, la Cour souligne qu’il y a lieu de distinguer les affaires précitées de celles dans lesquelles les faits présentent des éléments d’extranéité mais qui ne concernent pas l’extraterritorialité au sens de l’article 1er de la Convention. Ainsi en est-il des affaires qui concernent, sous l’angle de l’article 8, des décisions prises à l’égard de personnes, étrangères ou non, se trouvant en dehors des frontières de l’État défendeur mais dans lesquelles la question de la juridiction de cet État n’a pas été mise dans le débat, étant donné qu’un lien de rattachement résultait d’une vie de famille ou d’une vie privée préexistante que cet État avait le devoir de protéger (Nessa et autres c. Finlande (déc.), no 31862/02, 6 mai 2003, Orlandi et autres c. Italie, no 26431/12, 14 décembre 2017, et Schembri c. Malte (déc.), no 66297/13, 19 septembre 2017).

b)     Application au cas d’espèce

110.  La Cour constate tout d’abord que les décisions litigieuses ont été prises par l’administration belge en Belgique. Elles venaient en réponse à des demandes de visas que les requérants avaient remises aux services consulaires de l’ambassade de Belgique à Beyrouth en vue d’être autorisés à entrer en Belgique pour y demander l’asile et échapper à des traitements contraires à l’article 3 de la Convention auxquels ils disaient être exposés à Alep. Les décisions refusant aux requérants les visas demandés ont ensuite à nouveau transité par les services consulaires de l’ambassade qui en ont informé les requérants.

111.  Les requérants soutiennent qu’en l’espèce, la question de la « juridiction » au sens de l’article 1er de la Convention ne se pose pas uniquement sous l’angle de la portée extraterritoriale des décisions litigieuses. Selon eux, en traitant leurs demandes de visas, les autorités belges ont statué sur la question des conditions d’entrée sur le territoire national. Ce faisant, ces autorités ont posé à l’endroit des requérants des actes nationaux les faisant relever de la juridiction de la Belgique.

112. La Cour convient qu’en statuant sur les demandes de visas, les autorités belges ont pris des décisions portant sur les conditions d’entrée sur le territoire belge et ont, de ce fait, exercé une prérogative de puissance publique. Pour autant, à lui seul, ce constat ne suffit pas à attirer les requérants sous la juridiction « territoriale » de la Belgique au sens de l’article 1er de la Convention. La seule circonstance que des décisions prises au niveau national ont eu un impact sur la situation de personnes résidant à l’étranger n’est pas davantage de nature à établir la juridiction de l’État concerné à leur égard en dehors de son territoire (Banković et autres, décision précitée, § 75).

113.  Pour déterminer si la Convention s’applique en l’espèce, la Cour doit rechercher s’il existe des circonstances exceptionnelles propres à conclure à un exercice extraterritorial par la Belgique de sa juridiction à l’égard des requérants. Ainsi qu’elle l’a rappelé ci-dessus (voir paragraphe 102), il s’agit avant tout d’une question de fait qui nécessite de s’interroger sur la nature du lien entre les requérants et l’État défendeur et de déterminer si celui-ci a effectivement exercé son autorité ou son contrôle sur eux.

114.  Il importe peu à cet égard que les agents diplomatiques n’aient eu, comme en l’espèce, qu’un rôle de « boîte aux lettres » ou de savoir à qui, de l’administration belge sur le territoire national ou des agents diplomatiques en poste à l’étranger, les décisions sont à attribuer.

115.  La Cour relève tout d’abord que les requérants ne se sont jamais trouvés sur le territoire national de la Belgique et qu’ils ne revendiquent aucune vie familiale ou privée préexistante avec ce pays.

116.  Ensuite, il n’est pas allégué devant la Cour qu’un lien juridictionnel résulterait d’une quelconque forme de contrôle que les autorités belges exerceraient en territoire syrien ou libanais.

117.  La Cour constate en outre que les requérants mettent en cause le résultat des procédures d’examen de leurs demandes de visas et non des actes ou des omissions des agents diplomatiques de l’ambassade de Belgique à Beyrouth. Néanmoins, ils voient dans les fonctions consulaires de réception et de délivrance des visas une forme de contrôle ou d’autorité exercé, en vertu d’une prérogative de puissance publique, à leur égard, et, à ce titre, ils cherchent appui dans la jurisprudence de la Commission qui a reconnu l’exercice d’une juridiction extraterritoriale du fait des actions et omissions des agents diplomatiques.

118.  À ce sujet, la Cour souscrit à l’argument du gouvernement défendeur et des gouvernements tiers-intervenants selon lequel aucun des précédents cités au paragraphe 106 ci-dessus n’est transposable au cas d’espèce, dès lors que celui-ci ne présente aucun des liens de rattachement qui caractérisaient lesdites affaires. D’une part, en effet, les requérants n’étaient pas des ressortissants belges demandant à bénéficier de la protection de leur ambassade. D’autre part, les agents diplomatiques n’ont à aucun moment exercé un contrôle de fait sur la personne des requérants. Ceux-ci ont librement choisi de se présenter à l’ambassade de Belgique à Beyrouth, comme ils auraient d’ailleurs pu s’orienter vers une autre ambassade, et d’y déposer leurs demandes de visa ; ils ont ensuite pu librement quitter les locaux de l’ambassade belge sans rencontrer aucune entrave.

119.  Même à supposer, à titre subsidiaire, qu’un argument puisse être tiré du contrôle administratif que l’État belge exerce sur les locaux de ses ambassades, il résulte de la jurisprudence rappelée ci-dessus (paragraphe 105) que ce critère ne saurait suffire à faire relever de la juridiction de la Belgique toute personne qui entre dans ces lieux.

120.  La Cour rappelle par ailleurs, en réponse à la comparaison que les requérants font avec l’arrêt Soering précité, que la présente affaire est fondamentalement différente des nombreuses affaires d’éloignement qu’elle a examinées depuis cet arrêt et dans lesquelles elle a admis que la responsabilité d’un État partie pouvait être engagée au titre de l’article 3 de la Convention quand la décision qu’il a prise d’éloigner un individu expose ce dernier à un risque réel d’être soumis à un traitement contraire à l’article 3 dans le pays de destination. À la différence des requérants, dans les cas de refoulement du territoire, les intéressés se trouvent par hypothèse sur le territoire de l’État concerné – ou à la frontière de celui-ci (M.A. et autres c. Lituanie, no 59793/17, § 70, 11 décembre 2018, et, mutatis mutandis, N.D. et N.T. c. Espagne [GC], nos 8675/15 et 8697/15, §§ 104‑111, 13 février 2020) – et relèvent dès lors manifestement de sa juridiction (Banković et autres, décision précitée, §§ 68 et 77).

121.  Enfin, les requérants avancent un argument tiré du fait qu’ils se seraient placés dans le champ de la « juridiction » de l’État belge en entamant au niveau interne des démarches en vue de leur entrée en Belgique et à l’occasion desquelles les instances nationales auraient exercé leur compétence pleine et entière (paragraphe 82 ci-dessus). La Cour a déjà écarté cet argument pour autant qu’il vise à établir une juridiction territoriale de la Belgique à l’égard des requérants (paragraphe 112 ci‑dessus). Elle doit toutefois encore rechercher si le fait d’avoir engagé une procédure au niveau national a pu constituer une circonstance exceptionnelle suffisante pour déclencher, unilatéralement, un lien juridictionnel extraterritorial entre les requérants et la Belgique, au sens de l’article 1er de la Convention.

122.  De l’avis de la Cour, cette approche ne trouve aucun appui dans la jurisprudence. Elle rappelle à cet égard que dans l’affaire Markovic et autres précitée (paragraphe 107 ci-dessus), elle a déclaré irrecevables, à défaut de juridiction, les griefs matériels que les requérants tiraient des dispositions de la Convention autres que l’article 6 (Markovic et autres, décision précitée, et Markovic et autres [GC], précité, §§ 4 et 49-50 ; voir, mutatis mutandis, Banković et autres, décision précitée, §§ 83-84). La procédure établissant la juridiction de la Turquie dans l’affaire Güzelyurtlu et autres précitée (paragraphe 107 ci-dessus) ne peut davantage être comparée à la procédure administrative engagée en l’espèce par les requérants. En effet, la procédure dont il est question dans l’affaire Güzelyurtlu et autres – et qui crée un lien juridictionnel avec la Turquie – était une procédure pénale ouverte à l’initiative des autorités turques (contrôlant la « République turque de Chypre du Nord »). Elle correspond à une démarche d’un État contractant se situant dans le cadre des obligations procédurales découlant de l’article 2. Ceci est très différent d’une procédure administrative engagée à l’initiative de particuliers sans aucun lien avec l’État concerné, si ce n’est la procédure qu’ils ont eux‑mêmes entamée de leur plein gré et sans que leur choix de cet État, en l’occurrence la Belgique, ne s’impose au titre d’une quelconque obligation conventionnelle.

123.  En revanche, la thèse défendue par le gouvernement défendeur et les gouvernements tiers-intervenants trouve à s’appuyer sur la décision adoptée dans l’affaire Abdul Wahab Khan. La Cour y a clairement jugé que le simple fait pour un requérant d’initier une procédure dans un État partie avec lequel il n’a aucun lien de rattachement ne pouvait suffire à établir la juridiction de cet État à son égard (Abdul Wahab Khan, décision précitée, § 28). La Cour considère qu’en décider autrement aboutirait à consacrer une application quasi-universelle de la Convention sur la base du choix unilatéral de tout individu, où qu’il se trouve dans le monde, et donc à créer une obligation illimitée pour les États parties d’autoriser l’entrée sur leur territoire de toute personne qui risquerait de subir un traitement contraire à la Convention en dehors de leur juridiction (ibidem, § 27). Si la circonstance qu’un État partie se prononce sur une demande en matière d’immigration suffisait à faire relever le demandeur de sa juridiction, il pourrait en résulter une telle obligation. Le demandeur pourrait créer un lien juridictionnel en déposant une demande où qu’il se trouve et donner ainsi naissance, le cas échéant, à une obligation au titre de l’article 3 qui n’existerait pas autrement.

124.  Une telle extension du champ d’application de la Convention aurait en outre pour effet de réduire à néant le principe bien établi en droit international et reconnu par la Cour selon lequel les États parties ont le droit de contrôler l’entrée, le séjour et l’éloignement des non-nationaux, sans préjudice des engagements découlant pour eux des traités, y compris la Convention (voir, parmi beaucoup d’autres, N. c. Royaume-Uni [GC], no 26565/05, § 30, CEDH 2008, et Ilias et Ahmed c. Hongrie [GC], no 47287/15, § 125, 21 novembre 2019). Dans ce contexte, la Cour note que la CJUE a jugé dans une affaire similaire à la présente espèce qu’en l’état du droit actuel de l’UE, la délivrance de visas de long séjour relevait du seul droit national des États membres (paragraphes 71-73 ci-dessus).

125.  En conclusion, la Cour estime que les requérants ne relevaient pas de la juridiction de la Belgique au titre des faits dénoncés par eux sur le terrain de l’article 3 de la Convention. Eu égard à cette conclusion, le même constat s’impose s’agissant du grief tiré de l’article 13.

126.  La Cour note enfin que cette conclusion ne fait pas obstacle aux efforts entrepris par les États parties pour faciliter l’accès aux procédures d’asile par le biais de leurs ambassades et/ou représentations consulaires (voir N.D. et N.T. c. Espagne, précité, § 222).

Articles 6 et 13 de la Convention

129.  La Cour considère que la doléance des requérants doit s’analyser comme un grief visant le droit à l’exécution d’une décision judiciaire, au sens de l’article 6 de la Convention. Elle rappelle à cet égard que les exigences de l’article 13 étant moins strictes que celles de l’article 6 § 1, elles se trouvent absorbées par ces dernières (Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 146, CEDH 2000‑XI).

130.  À titre préliminaire, le gouvernement défendeur soulève plusieurs exceptions relatives à la recevabilité de cette partie de la requête fondées sur l’incompatibilité ratione materiae des griefs tirés de l’article 6 § 1 ainsi que sur le non-épuisement des voies de recours internes.

131.  La question se pose de savoir si la Belgique a exercé sa juridiction au sens de l’article 1er de la Convention à l’égard des requérants s’agissant des procédures intentées sur son territoire national. La Cour estime toutefois qu’il n’y a pas lieu à statuer sur cette question étant donné la conclusion à laquelle elle parvient quant à l’applicabilité de l’article 6 § 1 (paragraphe 141 ci-dessous).

132.  Sur ce terrain, le gouvernement défendeur fait valoir que le grief des requérants, formellement dirigé contre la non-exécution de l’arrêt du 7 décembre 2016 qui condamne l’État belge à exécuter, sous peine d’astreinte, l’arrêt du CCE du 20 octobre 2016, porte en réalité sur les décisions relatives à l’obtention des visas, et donc sur un droit de nature politique auquel l’article 6 § 1 ne s’applique pas.

133.  Les requérants soutiennent que leur grief porte sur un droit subjectif de caractère civil, reconnu par l’arrêt de la cour d’appel du 7 décembre 2016, à savoir celui d’obtenir l’exécution d’une décision de justice obligatoire et exécutoire et qu’il soit mis fin au préjudice résultant de sa non-exécution. Ils estiment que l’ordre que la cour d’appel a intimé – et les astreintes qui en étaient l’accessoire –, concernait exclusivement la « voie de fait » commise par l’État en n’exécutant pas une décision exécutoire prononcée par une juridiction administrative. Cette « voie de fait » étant une faute au sens du code civil belge, l’injonction prononcée par la cour d’appel porterait sur une obligation civile de réparation en nature de la faute commise par l’État.

134.  L’existence d’une « contestation » n’étant pas controversée, la tâche de la Cour se limite à déterminer si celle-ci porte sur des « droits et obligations de caractère civil ».

135.  Ainsi que le souligne, en l’espèce, la cour d’appel de Bruxelles dans son arrêt du 7 décembre 2016 (voir paragraphe 32 ci-dessus) et eu égard à l’état du droit belge, l’administration belge – en l’occurrence le secrétaire d’État à l’asile et à la migration et l’OE – disposait, en vertu de l’article 25 du code communautaire des visas, d’une compétence discrétionnaire quant à l’octroi ou au refus de visas de court séjour. Néanmoins, les requérants ont pu saisir une juridiction, en l’occurrence le CCE, qui a, par son arrêt du 20 octobre 2016, suspendu l’exécution des décisions de l’administration et avait compétence pour les annuler.

136.  En pareille hypothèse, si l’article 6 § 1 de la Convention peut trouver à s’appliquer, c’est toutefois à condition que l’avantage ou le privilège, une fois accordé, crée un droit civil (Regner c. République tchèque ([GC], no 35289/11, § 105, 19 septembre 2017).

137.  S’agissant du caractère du droit en cause en l’espèce, la Cour est d’avis, avec le gouvernement belge, que l’entrée sur le territoire belge qui aurait résulté de l’octroi des visas ne met pas en jeu un droit de caractère « civil » au sens de l’article 6 § 1 de la Convention, au même titre que toutes les décisions relatives à l’immigration, l’entrée, le séjour et l’éloignement des étrangers. Or, il est de jurisprudence constante que ces matières sont hors du champ de l’article 6 (voir, parmi d’autres, Maaouia c. France [GC], no 39652/98, § 40, 5 octobre 2000, et Mamatkulov et Askarov c. Turquie [GC], nos 46827/99 et 46951/99, §§ 82‑83, 4 février 2005).

138.  Il est vrai que la procédure suivie ensuite par les requérants devant le juge judiciaire – en l’occurrence la cour d’appel de Bruxelles – en vue d’obtenir l’exécution de l’arrêt du CCE du 20 octobre 2016 portait sur le refus de l’État d’exécuter une décision juridictionnelle en matière administrative et que la cour d’appel, pour établir sa juridiction au regard du droit interne, a considéré que la contestation portée devant elle avait un caractère civil. Cela étant, la Cour ne voit dans l’objet de cette action que le prolongement de la procédure en contestation au fond des décisions de refus des visas par l’administration.

139.  En tout état de cause, la Cour estime que le contentieux sous-jacent n’acquiert pas une nature « civile » du seul fait que son exécution est poursuivie en justice et donne lieu à une décision judiciaire. De la même manière, les procédures d’exécution de l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 7 décembre 2016 participaient de la nature de la procédure d’octroi des visas demandés par les requérants (voir, mutatis mutandis, Pierre-Bloch c. France, 21 octobre 1997, § 51, Recueil 1997-VI, et Panjeheighalehei c. Danemark (déc.), no 11230/07, 13 octobre 2009).

140.  En conséquence, l’article 6 § 1 de la Convention ne trouve pas à s’appliquer en l’espèce. Cette conclusion n’est pas affectée par le fait que les juridictions belges n’ont pas remis en question l’applicabilité de l’article 6 aux procédures en cause. En effet, la Convention ne fait pas obstacle à ce que les États parties accordent aux droits et libertés qu’elle garantit une protection juridique plus étendue que celle qu’elle met en œuvre (article 53).

141.  Cette partie de la requête doit donc être déclarée incompatible ratione materiae avec les dispositions de la Convention, et partant, irrecevable, conformément à l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

142.  L’inapplicabilité de l’article 6 constatée en tout état de cause rend inutile tout examen préalable de l’existence de la juridiction au sens de l’article 1ercombiné avec l’article 6 de la Convention.

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